Haruki Murakami est aujourd’hui l’un des auteurs japonais les plus populaires de sa génération. Ces romans, souvent acclamés par la critique et récompensés, sont régulièrement traduits autour du monde, marquant bien cet aspect international qui semble définir l’œuvre de Murakami. A l’occasion de la sortie en France de son dernier roman IQ84 ( Belfond), un des évènements de la rentrée littéraire, petit retour sur le parcours de cet auteur qui se promène dans les souvenirs.
Après avoir suivi des études de cinéma et de théâtre à l’université de Waseda au Japon, Haruki Murakami a été responsable d’un bar de jazz à Tokyo pendant huit ans, le Peter Cat, un clin d’œil à l’animal qui a accompagné son enfance, figure omniprésente de sa littérature. L’auteur a confié ne pas avoir voulu devenir écrivain par vocation - il souhaitait être scénariste- car il se sentait incapable de bien écrire. C’est avec Ecoute le chant du vent qu’il fait son entrée en littérature en 1979. Ce premier roman, acclamé par la critique et le public, reçoit le prix Gunzo à sa sortie. Il fait partie d’une trilogie autobiographique - qui compte en fait quatre volumes - La Trilogie du rat, à laquelle s’ajoute Le Flipper de 1973 (1980), La Course au mouton sauvage (1982) et Danse, danse, danse (1988), récits empreints de nostalgie, qui restituent les désillusions de l’adolescence du narrateur et de sa vie d’adulte. Après avoir vécu quelques années aux Etats- Unis où il enseignait la littérature japonaise à la prestigieuse université de Princeton, il retourne au Japon en 1995, profondément touché par le tremblement de terre de Kobe, sa ville natale, et l’attentat au gaz sarin de la secte Aun dans le métro de Tokyo. De ce traumatisme naît le bouleversant recueil de nouvelles Après le tremblement de terre, qui rend compte de l’impact de la catastrophe sur l’auteur. L’œuvre de Murakami se caractérise par un goût prononcé pour le fantastique, et un mélange subtil entre imaginaire oriental et occidental (avant de vivre aux Etats-Unis, il a vécu dans le sud de l’Europe) souvent chargé de mélancolie, qui font de son auteur l’un des plus grands représentants de la littérature-monde.
C’est en 1987 que Murakami publie La Ballade de l’impossible, somptueux roman élégiaque, qui devient immédiatement un immense succès au Japon, où il s’est vendu à plus de quatre millions d’exemplaires. Le titre original Norwegian Wood, fait allusion à une chanson des Beatles, qui, écoutée par le narrateur, plonger celui-ci dans le souvenir de sa jeunesse. Ainsi, l’histoire prend place à la fin des années 1960, Watanabe est un jeune étudiant qui vient d’entrer à l’université. Il retrouve Naoko, une belle jeune femme introvertie qu’il a connu dans le passé, et avec qui il va vivre une passion incandescente. Mais l’ombre de la mort de Kizuki, meilleur ami de Watanabe et petit ami de Naoko qui s’est suicidé, plane sur leur amour. Naoko finit par se perdre dans sa souffrance et le couple se sépare. C’est alors que Watanabe rencontre Midori, une jeune femme libérée et indépendante qui semble pleine de vie, et qui est prête à lui offrir son amour. Mais Wanatabe se rend compte que le spectre de la mort n’est jamais très loin. Le roman aborde avec une grande justesse les questions du deuil et de la séparation, et pose par là même les prémisses d'une existence déterminée par les souvenirs. Mais le récit est également celui de la découverte de l’amour par un jeune homme, il se fait ainsi quête initiatique, et nous livre une peinture du premier amour, héroïque et imprévisible.
Si l’auteur a dévoué – et dévoue encore – sa vie à la littérature, il n’en reste pas moins qu’il se passionne pour le cinéma, milieu dans lequel il comptait initialement faire carrière. Il ne semble ainsi pas étonnant que ces œuvres littéraires fournissent une matière propice à l’adaptation cinématographique. Après Tony Takitani adapté en 2004 par Jun Ichikawa, c’est La Ballade de l’impossible qui a été portée à l’écran en 2011 par le réalisateur français d’origine vietnamienne Tran Anh Hùng. Le film, extrêmement esthétisé, parvient parfaitement à rendre compte de l’enfermement dans le deuil des personnages principaux, grâce à un recours régulier à un cadre étouffant. Le dilemme qui tiraille les deux personnages, dépasser le deuil ou se laisser happer, est mis en scène avec beaucoup de délicatesse. Le cheminement du narrateur et personnage principal est montré à travers les constantes allées et venues qu’il entreprend entre sa vie étudiante, ses visites à l’hôpital psychiatrique de Naoko, et sa relation avec Midori.
C’est en 2009 que paraît au Japon IQ84, le dernier roman de Murakami, dont la sortie en France est prévue le 18 août 2011 chez Belfond. Le roman, publié en trois volumes, qui couvrent trois périodes temporelles, a immédiatement rencontré un immense succès, avec l’intégralité du premier tirage épuisé le jour de sa sortie. Le titre apparaît comme un hommage explicite au 1984 d’Orwell, grâce à un jeu sur la prononciation dans la langue japonaise, où la lettre Q et le chiffre 9 sont homophones. L’étrange récit surréaliste oscille entre deux points de vue, que l’on découvre par chapitres interposés, celui d’Aomame, une jeune femme qui commet des meurtres pour une obscure organisation, et celui de Tengo, un auteur non-publié qui enseigne les maths. Cette division en chapitre permet de rendre compte de la notion de vie parallèle expérimentée par les personnages dans le récit. Le roman parvient à mêler habilement la violence, et le meurtre à une réflexion sur l’amour, la vie et l’Histoire.
Haruki Murakami, 1Q84, éditions Belfond
Du 27 novembre au 2 décembre 2024 Montreuil accueille le Salon du Livre et de la Presse Jeunesse en Seine-Saint-Denis.
L'écrivain Boualem Sansal d'origine algérienne qui a obtenu récemment la nationalité française, célèbre pour ses critiques en profondeur des d
Les organisateurs du Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême viennent de faire connaître leurs sélections d'ouvrages et o
Vous avez aimé Le Bureau des Légendes et Le Chant du Loup ?