Alain Gorius est le fondateur d'Al Manar, une maison d'édition de bibliophilie qui se dédie plus particulièrement au dialogue entre les arts et à la littérature des pays du Sud méditerranéen et ceux de la France. Viabooks a rencontré l'inspirateur de ces belles rencontres entre artistes, écrivains et poètes, desquelles naissent souvent des livres rares et créatifs, pour notre plus grand bonheur.
Alain Gorius : J'ai d'abord enseigné la littérature en France, puis au Maroc, à Casablanca. Avec ma femme, nous avons parallèlement ouvert une galerie d'art contemporain, Al Manar, qui est devenue l'une des plus importantes du Maroc. C'est ainsi que nous avons été amenés à éditer quelques catalogues d'artistes : voilà comment les choses ont commencé. Ensuite, j'ai créé la maison d'édition Al Manar en 1998 en France.
-Cela veut dire, "Le phare" en arabe classique. A l'époque notre galerie était au bord de la mer face à un phare. Et le mot était tellement signifiant pour parler d'art...
Nous souhaitons d'abord faire dialoguer un texte écrit avec l'oeuvre d'un peintre - à l'exception de certains cas où le dessin seul "fait' l'histoire. Ensuite, nous essayons d'être un pont entre l'Europe et le Sud. Ainsi nous avons édité par exemple les rencontres entre un texte de Sylvie Germain et des tableaux de Rachid Koraïchi, les poèmes de Salah Stetié avec les peintures de Vladimir Velikovic ou de Gérard Titus-Carmel, les poèmes de Vénus Khoury-Ghata avec les dessins de Dina de Bournazel...
Un texte de Alberto Manguel avec les peintures de Rachid Koraichi, ainsi que Belles et beaux d' Albert Bensoussan et Joël Leick.
Nous les valorisons particulièrement. Car nos livres ne sont pas des livres de divertissement. Un livre d'art est le lieu de " confragation", l'aimantation entre le texte et l'image. Il y a une circulation souterraine de sens. Nous sommes au service de ce texte, qui porte le livre et lui donne son sens.
En général " primum verbum" , c'est à dire, c'est le texte qui préexiste à tout. Puis, un peintre choisi en fonction de ses affinités avec le monde de l'écrivain va "rencontrer" ce texte et il va imaginer non pas une illustration, mais une manière de le magnifier et dialoguer avec lui.
Entre 15 et 24 livres. Nous faisons toujours 20 à 30 tirages de tête, signés numérotés, rehaussés d'oeuvres originales, puis notre tirage oscille entre 600 et 3000 exemplaires.
Nous travaillons en typographie traditionnelle ce qui donne un plus beau relief.
Parlez-nous un peu de Diane de Bournazel, l'artiste dont nous reproduisons une partie des ouvres composant le livre" La Promenade" ?
Diane de Bournazel dessine, peint, encolle, enlumine… et dit, d'un trait de plume, d'une touche d'encre, les rêves qui, gardant la saveur douce-amère de l'enfance, habitent toutes les saisons de la vie. Chez Bournazel l'élégance, le lyrisme du dessin suffisent à suggérer notre rapport au monde. L'image chez elle est poésie ; elle évoque le chemin menant de l'ombre à la lumière - et du jour à la nuit. Et ainsi, donne une représentation poétique du monde.
Le travail de Diane de Bournazel pourrait évoquer celui de Paul Klee. Mais c'est un univers bien personnel qu'elle crée sur toiles ou sur ardoises rustiques, et parfois sur du bois de récupération. Indifférente au règne de l'éphémère, elle fait, même sur grands formats, un travail minutieux de miniaturiste : " J'aime peindre au pinceau à trois poils et à l'huile ; pas d'acrylique, ça manque de sensualité. " dit-elle. De formation autodidacte, elle a suivi des cours,"en dilettante" dans des écoles d'art en France et en Italie, et beaucoup de travail personnel : " Je peins huit heures par jour. " Diane de Bournazel a une passion pour les livres d'artiste: elle découpe, enlumine, assemble avec une patience d'artisan des mots de Robert Desnos, Henri Michaux, Jorge Luis Borges dans des petits ouvrages précieux, qu'elle expose de Paris, à Londres, en passant par Marrakech ou Marseille. Elle est donc très proche de l'esprit d'Al Manar.
Elle s'exprime pour moi par le souci de créer un livre qui soit aussi un objet. Nous choisissons un papier bougffant avec un gramage de 120 g : c'est une sensation tactile si différente et une qualité d'imprerssion exceptionnelle grâce à la typographie. Pour les tirages de tête nous utilisons de très beaux papiers velin. La bibliophilie moderne a commencé vers la fin du XIXème siècle : nous perpétuons cette tradition du livre d'artiste qui est un instant littéraire autant que plastique.
Les deux Plus fort que tout, il y a la passion des livres. Autant pour leur contenu que leur contenant. La passion de l'art aussi car les peintres portent un regard très particulier sur la littérature et la poésie. Ils l'enrichissent. Poètes et écrivains se répondent et communient, tout comme les cultures dialoguent entre elles. C'est peut être asusi cela la bibliophilie, rassembler plusieurs "créateurs" et témoigner de la beauté du livre en tant que tel, mais aussi du geste créatif qui a présidé à sa naissance.
Ø Editions Al Manar
Les livres sont en vente dans certaines librairies, sur Amazon et sur le site de l'éditeur :
Ø Salon de la Bibliophilie contemporaine
Samedi 8 et Dimanche 9 Mai
Lycée Henri IV
23, rue Clovis. 75005 PARIS
http://www.pages-bibliophilie.eu/pagesphp/PAGES_SalonInc.php
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