Fantasy

« Our dark duet » de V. E. Schwab : une fin explosive avec le dernier tome de « Monsters of Verity »

V.E. Schwab, vite devenue une incontournable de la littérature adolescente, conclut une nouvelle saga que nous avions décrite dans une précédente revue comme « envoûtante et forte en rebondissements ». Deuxième et dernier tome de « Monsters of Verity », le roman Our dark duet (Lumen), promet un engouement tout aussi fort que le premier. Analyse.

Petit rappel du premier tome : Verity est une ville assiégée par les monstres, née des crimes commis par des humains pécheurs. Corsai, dévoreurs aux crocs acérés, Malchai, aux vampires buveurs de sang, Sunai, qui aspirent l’âme d’une chanson… August en est un. Kate Harker, au contraire, est humaine. Dans une ville en proie aux flammes et au courroux des monstres, ils mènent pourtant ensemble un combat acharné pour rétablir le bien, et annihiler les monstres. Car ces derniers ne sont pas toujours où on croit…

V. E. Schwab, magicienne du roman de fantasy

On ne la présente plus, V. E. Schwab est incontestablement l’une des plus grandes dans la fantasy moderne. Auteure de La vie invisible d’Addie Larue et Shades of Magic, elle ne cesse de surprendre avec des romans toujours plus haletants et envoûtants. L’autrice américaine résidant en Californie a reçu de nombreux prix et l’éloge de la critique. Elle nous plonge avec Our dark duet dans l’épopée finale que nous attendions après la lecture de This savage song, le premier opus de la saga. Le premier roman nous avait laissés sur de nombreuses interrogations et mystères non résolus, auxquels répond avec brio l’auteure dans une suite très attendue. Il sera ici question de vengeance, de doubles maléfiques, de traque sanglante, et de l’apparition d’un dernier monstre, le plus féroce de tous.

Un roman mystérieux où les monstres jouent du violon

Cela fait des mois que Verity est en proie aux attaques nocturnes permanentes des Malchai et autres Corsai. La mort de Callum Harker, ancien dirigeant du quartier nord et leader craint des monstres de cette partie de la ville, a ébranlé la ville et donné libre cours aux activités des monstres. Les quelques survivants se hâtent à la frontière sud, où August et les forces spéciales de Flynn (leader du quartier sud) décident de leur légitimité à être recueillis. Cela fait des mois qu’August n’a pas vu Kate, la fille de Callum, depuis cette nuit où elle a vraisemblablement tué Sloan, monstre maléfique et bras droit de Callum dans le quartier nord. Seulement Sloan n’est pas mort, et dirige impitoyablement le nord au côté d’Alice, double maléfique de Kate, alors que cette dernière se cache à Prosperity.

Mais Kate a des visions. Un mystérieux éclat d’argent est apparu dans son œil, et ne cesse de grandir, de même que ses réminiscences et visions du passé ou du futur. Futur dans lequel elle voit un monstre, plus gros et sanguinaire que tout ce qu'elle a connu auparavant. Kate retourne donc à Verity, à August, à Sloan, à tout ce danger et à tous ces monstres.

Mais Kate ne deviendrait-elle pas le vrai monstre ? Avec ses visions arrivent des pulsions meurtrières, des envies de violence incontrôlables que l’on ne peut tolérer au quartier sud de Verity. Et August, pourquoi est-il devenu si froid et distant, lui qui avait toujours rêvé d’être considéré comme un homme ? Vont-ils mettre leurs différents et leurs non-dits de côté, arriver à se retrouver pour abattre ce monstre et rétablir l’ordre ?

Des monstres aussi bien extérieurs qu’intérieurs

« Il existait deux sortes de monstres, ceux qui rôdaient dans les rues et ceux qui vivaient dans votre tête. Si elle savait combattre les premiers, les seconds étaient les plus dangereux. Ils avaient toujours, toujours, une longueur d’avance. » - V. E. Schwab

L’intrigue dans Our dark duet est complexe, autant par son déroulé d’actions que par sa psychologie. Les chapitres sont écrits du point de vue des deux protagonistes, alternant entre les idées noires de Kate et les dilemmes intérieurs d’August. La jeune fille, méprisée où qu’elle aille à cause de son funeste nom de famille, se voit obligée de se présenter sous de fausses identités, masquant sa personnalité et son histoire à chaque rencontre, et ne créant donc aucune vraie relation, dans un monde dangereux où les alliés sont cruciaux. August, de son côté, malgré la mort de son diabolique frère Leo, entend encore sa voix dans sa tête, et est poussé malgré lui à agir avec le moins d’empathie et d’humanité. Aussi bien l’un que l’autre, les deux jeunes gens doivent lutter contre des démons tout à la fois réels et concrets, et d’autres enfouis, fantômes de leur passé où des êtres qu’ils ont perdus. V. E. Schwab dépeint avec brio le processus de deuil, encore plus complexe lorsque l’on a conscience que la personne concernée ne méritait pas de vivre.

Un roman basé sur le contraste

« Durant la majeure partie de sa courte existence, il avait classé les hommes en deux catégories : bons ou mauvais, purs ou souillés – avec une séparation nette, une démarcation entre le noir et le blanc. Au cours de ces six derniers mois, pourtant, il avait découvert une infinité de nuances de gris. » - V. E. Schwab

L’auteure américaine aime jouer sur les oppositions, repoussant sans cesse la limite entre le bien et le mal, et embrouillant le lecteur dans des réflexions autour desquelles il doit lui-même se repérer et se faire son propre avis ; Kate Harker, gamine prétentieuse ou héroïne incomprise ? August, monstre dangereux ou garçon effrayé par ses propres responsabilités ? V. E. Schwab apprécie sans aucun doute de déranger le lecteur, afin qu’il se questionne et qu’à la fin de l’ouvrage, des zones d’ombres laissent place à une conclusion personnelle. Car le livre se termine, mais si peu à la fois. Le lecteur à tout le loisir d'imaginer les conséquences des actes des personnages. De plus, le roman fait réfléchir sur les lourdes conséquences qu’une action peut avoir, et ses répercussions sur l'entourage, parfois la société tout entière.

Des dilemmes moraux et des problèmes universels

« Les hommes étaient complexes. Ils se définissaient non seulement par ce qu’ils avaient fait, mais aussi par ce qu’ils auraient fait dans d’autres circonstances. » - V. E. Schwab

Les pensées des personnages sont dépeintes à la première personne, si bien que l’on a l’impression d’être happé à l’intérieur de leur tête et de suivre le processus de l’histoire. Kate est sujette à de nombreux doutes et hésitations, et est en permanence challengée par son propre esprit, surtout alors que ces visions la prennent de court et la tournent elle-même en une créature avide de violence. La jeune fille devra choisir d’en parler à August, craignant ainsi l’exécution, ou le cacher le plus longtemps possible, sous peine de finir par devenir dangereuse. De son côté, August est en dilemme permanent entre sa nature profonde, douce et paradoxalement très humaine, et ses obligations en tant que monstre, surtout lorsque celles-ci sont poussées par les mots vicieux de son grand frère mort à son oreille…

L’envie de tuer

« Finalement, « rituel » n’était qu’un mot savant pour « habitude ». Une action qu’il devenait plus facile de faire que d’éviter. Or les habitudes étaient faciles à prendre – surtout les mauvaises. » - V. E. Schwab

La ville de Verity recèle de bien des problèmes. Les montres pullulent, tyrannisent les habitants et montent les gens les uns contre les autres. Dans un monde postapocalyptique tel celui-ci, l’auteure rappelle qu’il est important de s’accrocher à ses valeurs et ne pas se laisser entraîner dans un cercle vicieux de violence et de lutte. Les deux protagonistes, toujours parallèlement, en sont une métaphore. Kate lutte en permanence contre elle-même afin de ne pas se laisser aller aux pulsions meurtrières qui l’animent depuis que cet éclat argenté est apparu dans son œil. August essaie de ne pas oublier l’humanité que renferme son cœur alors qu’il doit tous les jours aspirer l’âme des pécheurs essayant d’intégrer la zone sud. La vie n’est pas simple à Verity. Mais V. E. Schwab allume tout de même une lumière d’espoir avec une fin aussi attendrissante que satisfaisante. Une belle lecture.

> Our dark duet, de V. E. Schwab, éditions Lumen, 510 pages, 17 euros >> Pour acheter le livre, cliquer sur ce lien
> Pour lire la chronique sur le premier tome, Monsters of Verity, 
de la série de V. E. Schwab, cliquer sur ce lien

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