Daniel Sarfati revient sur l'étrange amitié qui existait entre Virginia Woolf et Katherine Mansfield.
Faite à la fois de fascination et d’admiration mutuelle mais aussi de jalousie et de sentiments amoureux de la part de Virginia. Deux miroirs d'écriture. Deux personnalités fascinantes.
Étrange amitié que celle de Virginia Woolf avec Katherine Mansfield.
Faite à la fois de fascination et d’admiration mutuelle mais aussi de jalousie et de sentiments amoureux de la part de Virginia.
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Quand Katherine Mansfield débarque des « colonies », de Nouvelle-Zélande, elle est tout de suite très bien accueillie par le très intellectuel cercle de Bloomsbury.
Lytton Strachey, l’écrivain, la trouve «définitivement intéressante», le philosophe Bertrand Russell la définit comme «un esprit brillant», et pour Leonard Woolf, le mari de Virginia, elle est «extraordinairement amusante».
Virginia, elle, se méfie.
Elle snobe cette étrangère qui « porte des jupes courtes et chante des negro’s spirituals en s’accompagnant à la guitare.»
Mais force est de reconnaître l’immense talent de Katherine.
Et son charme exotique.
Elle sera l’une des premières auteures à être publiée par Hogarth Press, la maison édition des époux Woolf.
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Katherine Mansfield meurt d’une tuberculose le 8 janvier 1923, à l’âge de 35 ans.
Cela fait une semaine que Katherine est morte.
Serais-je déjà en train de l’oublier ?
Il est curieux de suivre le cheminement de ses propres sentiments.
Suis-je soulagée ? Une rivale de moins ?
Confusion à ressentir si peu d’émotion. »
Virginia Woolf est parfois glaçante par son égoïsme et sa méchanceté.
Mais c’est un masque.
« Dimanche 28 janvier 1923
Katherine est morte en dix minutes d’une hémoptysie, en montant un escalier.
Une certaine tristesse a pesé sur moi tous ces derniers quinze jours. Je pense qu’elle a sa source dans la mort de Katherine.
Un vide, un désarroi auquel je n’ai pu me soustraire.
Il m’a semblé qu’écrire n’avait aucun sens.
Katherine ne me lirait pas.
(...)
Katherine était impénétrable.
M’aimait-elle ? Parfois elle le disait ; elle m’embrassait ; elle me regardait avec des yeux qui semblaient protester d’une éternelle fidélité.
Notre amitié était chose réelle. Peu importe les ragots. »
Virginia Woolf, en réalité, ne s’est jamais remise de la mort de Katherine.
…
Plusieurs années plus tard.
« Samedi 1er juillet 1928
Mai et juin se sont évanouis. L’année se les est laissé voler.
(...)
Toute la nuit dernière j’ai rêvé à Katherine Mansfield et je me demande ce que sont les rêves.
Ils suscitent tellement plus d’émotion que ne le fait la pensée ; il semblait que Katherine fût revenue en personne : je l’avais devant moi, elle faisait naître en moi des sentiments fervents ; elle avait cessé d’être cette reconstitution voulue, d’après mémoire, qu’elle est désormais lorsque je pense à elle.
Une certaine émotion a persisté toute la journée ; et cela bien que j’ai oublié ce qui se passait dans ce rêve, sauf que Katherine était allongée sur un divan entourée d’une foule de femmes au visage triste. »
Cette foule de femmes aux visages tristes, c’est Virginia inconsolable.
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Daniel Sarfati est médecin ORL, passionné par le langage, par les signes, la lecture des mots qui s’écrivent, se lisent sur une page ou sur des lèvres, les histoires qui se vivent ou qui s’inventent.
Portraits de Virginia Woolf à gauche et de Katherine Mansfield à droite. Photos Wikipedia
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