Chronique de Littéraflure

« Les yeux de Mona » de Thomas Schlesser : la peinture dans un regard

Thomas Schlesser est un historien d'art et directeur de Fondation très respecté sur le plan académique. Alors, lorsqu'il se lance dans un roman de vulgarisation de l'art, cela donne « Les yeux de Mona », formidable voyage artistique, pendant lequel un grand-père initie sa petite fille aux magies de la peinture, avant qu'elle ne perde la vue. Littéraflure a été séduit par cet exercice érudit et accessible. Tout comme les milliers de lecteurs qui confirment cet engouement.

À ne surtout pas lire en étudiant les tableaux cités. Ce ne serait pas rendre justice à l’ambition de l’auteur : nous apprendre à voir au-delà de l’œuvre. Il faut convoquer les images avec pour seules indications la description formelle du tableau et les commentaires qu’en font Mona, la petite fille, et Henry, son grand-père érudit.

Un regard initiatique sur l'art

C’est une initiation qui oscille entre « L’histoire de l’art pour les nuls » et le cours magistral d’un universitaire - tantôt simpliste, tantôt virtuose. On l’aura compris, ce livre a le défaut de sa qualité : la vulgarisation. Les plus snobs le bouderont, les autres se laisseront happer par le plaisir de la découverte. Ce fut mon cas.

Honneur aux peintres femmes

Quel bonheur de retrouver Marguerite Gérard (p142), Marie-Guillemine Benoist (p.160), Rosa Bonheur (.p213), Julia Margaret Cameron (p.232), Anna-Eva Bergman (p.422) et l’immense Louise Bourgois (p.437). Je sais, que de femmes, on ne se refait pas.

Sortir du cadre

L’auteur traque le détail, le clin d’œil, l’anomalie qui donnent à l’œuvre son caractère transgressif et sa postérité. L’Histoire ne retient pas le conformisme. Pour la séduire, il faut sortir du cadre, briser les codes et s’affranchir des lieux communs. Cette quête, essentielle et sublime, valait un roman, qu’il faut lire comme on visite un musée, en accélérant le pas dans certaines salles, parce que la vie de Mona tient du prétexte. L’exceptionnelle maturité de cette petite fille manque de crédibilité. Le roman devient catalogue si on met de côté son histoire qui ne manque pas de charme et d’intelligence par ailleurs : l’indicible, ce que l’on refuse de voir, la peur de la perte, et cette magnifique trouvaille, conclure avec l’outrenoir de Soulages.

Le livre de Thomas Schlesser m’a fait penser, dans ses intentions, au « Monde de Sophie » de Jostein Gaarder. L’instruction par le roman est un exercice périlleux (car le didactisme guette). Umberto Eco en reste le maître incontesté.

Le mot de l'éditeur

Cinquante-deux semaines : c’est le temps qu’il reste à Mona pour découvrir toute la beauté du monde. C’est le temps que s’est donné son grand-père, un homme érudit et fantasque, pour l’initier, chaque mercredi après l’école, à une œuvre d’art, avant qu’elle ne perde, peut-être pour toujours, l’usage de ses yeux. Ensemble, ils vont sillonner le Louvre, Orsay et Beaubourg.
Ensemble, ils vont s’émerveiller, s’émouvoir, s’interroger, happés par le spectacle d’un tableau ou d’une sculpture. Empruntant les regards de Botticelli, Vermeer, Goya, Courbet, Claudel, Kahlo ou Basquiat, Mona découvre le pouvoir de l’art et apprend le don, le doute, la mélancolie ou la révolte, un précieux trésor que son grand-père souhaite inscrire en elle à jamais.

Grand roman d’initiation à l’art et à la vie, histoire d’une relation solaire entre une petite fille et son grand-père, Les yeux de Mona, connaît un destin fabuleux : traduit dans plus de vingt pays avant même sa parution en France, c’est un phénomène international.

>« Les yeux de Mona » de Thomas Schlesser, Albin Michel, 496 pages, 22,90 euros >> Pour acheter le livre, cliquer sur le lien

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Littéraflure est le pseudonyme de critique littéraire d'une auteure qui a déjà publié cinq romans et dont l'identité est inconnue. Prochainement elle fera paraître ses Confessions d'une chroniqueuse littéraire.
Son credo : « Je porte aux nues et souvent j’érafle pour que vive la littérature ! »

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