Scrooge au féminin !
Elizabeth Scrooge est une commerçante riche et pingre qui déteste Noël et méprise les pauvres.
La veille de Noël, elle reçoit la visite du fantôme de son ancien associé Jacob Marley, qui lui annonce qu’elle sera hantée par trois esprits : celui des Noëls passés, celui des Noëls présents et celui des Noëls à venir.
Ces esprits lui montrent les erreurs de sa vie, les souffrances qu’elle cause aux autres et le triste sort qui l’attend si elle ne change pas.
Pour ma part,
Ovation pour cette version féminine et féministe du conte Un Chant de Noël de Charles Dickens.
En effet, le talentueux José-Luis Munuera a revisité le grand classique en incarnant Scrooge sous les traits d'une femme d'affaires, au nez caricaturé à l'instar du personnage initial Ebenezer, transformé en Elizabeth pour l'occasion, qui s'abstient de toute bonté et de générosité.
Fidèle au récit canonique, l'album nous entraîne dans un voyage fantomatique dans le passé, le présent et le futur d'Elizabeth Scrooge qui va se confronter à ses choix de vie et à ses regrets.
Comme dans tout conte de Noël, l'histoire aborde les thèmes de l'empathie, de la compassion et de la générosité envers les autres, surtout les plus démunis.
Mais pas que.
L'album ne manque pas d'évoquer la condition féminine au XIXe : à l'époque, les fillettes étaient éduquées pour devenir mère au foyer soumise à leur époux. Contrairement aux mœurs pourtant, Elizabeth s'est imposée dans le milieu des affaires pour devenir la patronne redoutable, ambitieuse et indépendante dont l'enseigne " Marley & Scrooge" demeure prospère malgré ces temps de disette.
Le dessin est magnifique, expressif et réaliste, exécutés au trait fin noir. Les couleurs aquarelles sont contrastées, tantôt sombres, tantôt festives.
Par la force d'un graphisme sublime et soigné, le génie de Munuera a donné un second souffle, moderne et féministe, à ce sempiternel classique de Noël. Surprenant et audacieux, je recommande.
Mention spéciale : La préface de cet album est signée par Dominique Barbéris tandis qu'en postface se trouve la transcription d'une lettre manuscrite retrouvée par Alex Romero curieusement intitulée " À propos du légitime propriétaire de la dinde offerte à Bob Cratchit ".
Ce 23/12/23: En cette période festive, je vous souhaite un merveilleux week-end et que la magie de Noël soit avec vous !
https://www.aikadeliredelire.com/2023/12/lu-approuve-un-chant-de-noel-une.html
Le violon d'Adrien est le récit initiatique d'un adolescent haïtien apprenti musicien prêt à tout pour un violon, un instrument rare dans un pays en proie à la dictature, à la violence et à la pauvreté. Une quête mêlant thriller, leçon de vie et culture haïtienne; ce récit contient des détails à caractère sexuel pouvant heurter les plus jeunes.
Pour ma part,
J'ai adoré ma lecture : captivante et instructive, on ne s'ennuie jamais. Les descriptions sont réalistes, la plume est riche et utilise à l'occasion le créole haïtien en guise d'illustration pour plus d'authenticité. Le récit est fluide, un savant équilibre entre découverte culturelle et leçon de vie.
Car il y a beaucoup d'aspects de la culture haïtienne à observer ici notamment les croyances locales, que je retiendrai à mon sens comme un syncrétisme religieux : un "mix" entre le christianisme évangélique, la phytothérapie et la sorcellerie vaudou héritée du fin fond des âges.
La trame du roman se déroule dans une époque problématique où Haïti est gangréné par l'oppression des "tontons macoutes" à la solde de la dictature présidentielle, vers les années 70, du temps des "gourdes" et du "borlette". Le narrateur y dépeint la pauvreté, la corruption et l'insécurité d'une société au bord de l'implosion où un apprenti violoniste n'y a pas sa place :
« Le violon, c'est pour la musique savante, Adrien. Notre pays est un bateau qui sombre. Il sombrera longtemps avant qu'une main peut-être divine ne le remette à flot. Pendant qu'il sombre, nos femmes et nos hommes ne pensent qu'aux choses les plus triviales qui soient. Je te plains. Tu es perdu dans un monde qui n'est pas le tien. Un petit Haïtien qui rêve de devenir un virtuose du violon ! »
Je n'ai qu'un seul mot pour ce roman de tous les genres riche en actions et en émotions : inclassable.
Coup de cœur.
https://www.aikadeliredelire.com/2023/12/lu-approuve-le-violon-dadrien-de-gary.html
Le violon d'Adrien est le récit initiatique d'un adolescent haïtien apprenti musicien prêt à tout pour un violon, un instrument rare dans un pays en proie à la dictature, à la violence et à la pauvreté. Une quête mêlant thriller, leçon de vie et culture haïtienne; ce récit contient des détails à caractère sexuel pouvant heurter les plus jeunes.
Pour ma part,
J'ai adoré ma lecture : captivante et instructive, on ne s'ennuie jamais. Les descriptions sont réalistes, la plume est riche et utilise à l'occasion le créole haïtien en guise d'illustration pour plus d'authenticité. Le récit est fluide, un savant équilibre entre découverte culturelle et leçon de vie.
Car il y a beaucoup d'aspects de la culture haïtienne à observer ici notamment les croyances locales, que je retiendrai à mon sens comme un syncrétisme religieux : un "mix" entre le christianisme évangélique, la phytothérapie et la sorcellerie vaudou héritée du fin fond des âges.
La trame du roman se déroule dans une époque problématique où Haïti est gangréné par l'oppression des "tontons macoutes" à la solde de la dictature présidentielle, vers les années 70, du temps des "gourdes" et du "borlette". Le narrateur y dépeint la pauvreté, la corruption et l'insécurité d'une société au bord de l'implosion où un apprenti violoniste n'y a pas sa place :
« Le violon, c'est pour la musique savante, Adrien. Notre pays est un bateau qui sombre. Il sombrera longtemps avant qu'une main peut-être divine ne le remette à flot. Pendant qu'il sombre, nos femmes et nos hommes ne pensent qu'aux choses les plus triviales qui soient. Je te plains. Tu es perdu dans un monde qui n'est pas le tien. Un petit Haïtien qui rêve de devenir un virtuose du violon ! »
Je n'ai qu'un seul mot pour ce roman de tous les genres riche en actions et en émotions : inclassable.
Coup de cœur.
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Une psy badass fait son enquête !
Eva Rojas, psychologue, se retrouve mêlée à une enquête policière pour homicide dans une famille catalane, les Monturós, qui a fait fortune dans le cava, le vin emblématique du pays.
À la fois témoin, suspecte et détective amateure, entre secrets, mensonges et meurtres, elle va devoir jouer des pieds et des mains pour résoudre l'énigme et, au passage, prouver son innocence.
Pour ma part, je suis totalement conquise.
J'ai sauté les pieds joints dans cette enquête aux côtés de l'héroïne Eva Rojas, brillante psychologue de métier , dont la dégaine et les méthodes peu orthodoxes me rappellent une certaine Dr Quinn, un autre personnage plus connu sous le nom d' Harley Quinn.
Plus que le titre éloquent, le déroulement et le dénouement de l'enquête que je vous laisse découvrir en lisant l'album, ce sont les thèmes abordés qui m'ont scotchée.
Primo, la famille : un concept sacré en Catalogne. J'ai adoré pénétrer les secrets et les complots de famille, qu'il s'agisse des Monturós, où se déroule l'enquête ou celle d'Eva à travers les trois "voix" spectrales et revanchardes à juste titre, celles de sa grand mère et de ses grandes-tantes, qui l'accompagnent dans toutes ses décisions.
Secundo : la sororité universelle, au delà des conflits et des intérêts personnels. Vous découvrirez au fil de l'histoire comment la solidarité ligue toutes les femmes du récit contre le patriarcat traditionnel chez les Monturós.
Tertio, comme une évidence : le polar. Le récit joue avec les codes du genre policier, en mêlant suspense, rebondissements et humour tonique.
Effectivement, dans cette bande dessinée, les traits sont nets, et les proportions sont réalistes avec un "accent" humoristique enrichi de couleurs contrastées et lumineuses. L'atmosphère est dynamique et le résultat plus que convaincant.
Je suis littéralement fan du personnage d'Eva : solaire, déjantée et flanquée de ses trois "voix".
Je souhaite qu'il puisse y avoir un prochain album de ses aventures.
Coup de cœur : un cadavre, des personnages hauts en couleurs, du cava à gogo, le soleil du pays catalan ; cet irrésistible polar bien ficelé a tout bon! Ma chronique sur aikadeliredelire.com
Sublime reflet
Pour ma part,
La narratrice, sans jamais se nommer, est une écrivaine à succès qui se rend souvent au jardin de Luxembourg pour se ressourcer et y faire des rencontres extraordinaires... Elle observe qu'à l'heure bleue, le lieu devient un espace-temps à part, une capsule entre réalité et fiction, identité et illusion.
Pour la promotion de son tout dernier roman, elle décide de faire intervenir une actrice de sa connaissance, la célèbre Christie S. afin de jouer son rôle lors d'une séance de dédicace vraiment pas comme les autres, avec une mise en scène digne d'un vrai tournage de film, en plein jardin du Luxembourg à Paris. Cerise sur le gâteau (sic) : notez que cette dernière, Christie S., a la particularité de ne pas avoir lu le livre de notre narratrice! Tout ce dédale est en place pour de mystérieuses raisons à découvrir en lisant le roman.
Le récit nous plonge au cœur d'une mise en scène spectaculaire à la hauteur des ambitions d'une artiste pour sa création. Et c'est là qu'on va découvrir les symboles de cette expérience de dédoublement orchestrée par la narratrice.
Un roman court mais dense, de construction soignée, avec une intrigue captivante jusqu'à la fin dans la mesure où des thèmes inattendus seront abordés au fil du récit tels que le cinéma, le souvenir, le spiritisme, la création littéraire et bien d'autre encore.
Un beau moment de lecture à découvrir pour tous les fans de création artistique en général et littéraire en particulier. Je recommande.
+ À lire: Une intrigue de toute beauté au service de thèmes inattendus mais éloquents comme la création littéraire et le spiritisme. Ma chronique sur aikadeliredelire.com
Pour ma part,
Préparez vous pour la bagarre _En bon père de famille, en voilà un titre qui a de la dégaine se dirait- on de prime abord. Pour moi qui ne connaissais pas l'œuvre de Rose Lamy, après coup, je peux dire que cet essai m'a marquée de façon déterminante : j'en ai surligné pratiquement la moitié, c'est vous dire.
L'auteure y raconte son expérience personnelle avec son père, un homme violent qui se cachait derrière le masque du "bon père de famille". Elle analyse comment cette figure juridique et sociale protège les hommes qui commettent des violences envers les femmes et les enfants, et comment elle empêche la reconnaissance et la réparation des victimes :
"Il n’y a rien d’accidentel ou d’affectueux dans un continuum d’actes qui menacent des corps résistant à la domination des bons pères de famille. On ne souhaite pas forcément détruire les femmes et les enfants, on veut les assigner à un rôle subalterne, les dominer, grâce à l’exercice de la violence. La nuance est importante."
Elle décrypte aussi les stéréotypes qui entourent les hommes violents, qui sont souvent présentés comme des monstres ou des exceptions, alors qu'ils sont en réalité des hommes normaux, issus de toutes les classes sociales et de toutes les origines : que l'on soit une célébrité richissime ou de modeste condition, quelque soit l'endroit sur Terre, il se trouve que le système profite toujours aux "bons pères de famille".
Rose Lamy nous invite à remettre en question le système de domination patriarcal qui produit et maintient ces violences, et à chercher des moyens de le transformer.
"Ce livre n’est pas une étude exhaustive ou statistique sur les auteurs de violences intrafamiliales, mais une réflexion sur les secrets et les silences, et la force de ces vies qui cherchent à dire et à écrire."
C'est un livre courageux, lucide et nécessaire, qui mêle intime et politique avec brio que je recommande sans réserve à toute personne s'intéressant au féminisme et à la sociologie du genre.
+ À lire absolument : Engagé, nuancé et percutant, cet essai contribue au débat féministe contemporain.
#Enbonspèresdefamille#NetGalleyFrance
Lire ma chronique sur aikadeliredelire.com
Au menu: huis clos tendu aux pépites de révélations
Dans un appartement luxueux à Paris, quatre collègues et amis de longue date avec des personnalités aux antipodes les unes des autres vont se mettre à table.
Tout d'abord, il y a Étienne, le maître des lieux, avocat insatiable, toujours à l'affût de ses intérêts et imbu de lui-même.
Puis il y a sa compagne Claudia, kinésithérapeute, complexée qui a passé la journée aux fourneaux et apparemment au bord du malaise vagal.
Ensuite Rémi, le meilleur ami d'Étienne, professeur d'économie qui a de plus en plus de mal à cacher sa liaison amoureuse avec une autre. Bien sûr, Étienne est au courant.
Et enfin l'invitée d'honneur Johar, qui est la compagne de Rémi et surtout future Directrice Générale influente, ce qui représente un atout stratégique pour les affaires d'Étienne.
Pour ainsi dire, au fil du repas, les tensions montent, les révélations éclatent et les vies basculent.
Pour ma part,
Dans la mesure où j'affectionne particulièrement le genre huis-clos pour son côté théâtral avec tension dramatique qui monte crescendo jusqu’au dénouement inattendu, je n'en ai fait qu'une bouchée.
Avec une écriture maîtrisée et subtile, des dialogues et des descriptions réalistes et crédibles, le récit alterne les points de vue des quatre protagonistes: leurs pensées, leurs émotions et leurs motivations.
Ce simple dîner sera révélateur de leurs aspirations, de leurs frustrations et de leurs choix respectifs.
L’auteure met en scène deux amis de très longue date, Étienne et Rémi et leurs deux femmes aux profils opposés, Claudia et Johar, qui vont se confronter aux attentes, aux pressions et aux jugements des hommes et de la société.
En interrogeant le rôle des femmes dans le couple, dans la famille et dans le travail, cette histoire aborde avec finesse des thèmes sensibles comme le sexisme, la maternité, la vie conjugale, la carrière, le prestige etc.
Et puisque chacun désire intimement se libérer de sa situation oppressante, d'une manière universelle, ce huit clos parle d’émancipation.
Brillant. Adroit. Efficace. Je recommande et en redemande.
Un de mes meilleurs romans lus en 2023.
Un simple dîner sur aikadeliredelire.com
Trois quadras célibataires et endurcis, les Insolents
Alex, Parisienne et musicienne de profession, a aujourd’hui la quarantaine avancée. Son mode de vie actuel, sa récente rupture avec Jean et son intuition la poussent à quitter la ville des Lumières. Sans avoir visité la maison au préalable, elle déménage pour s'isoler dans le Finistère, à deux pas de la mer, non sans laisser perplexes ses amis de toujours, Margot, éditrice et Jacques, galeriste.
Pour ma part,
"Les insolents sont ceux qui insultent ou blessent par une audace excessive".
Le titre me rappelle cette citation dont je ne me souviens plus de l’auteur (Jean Cocteau peut-être mais je n’en ai pas la certitude, n’hésitez pas à me corriger). En tout cas, c’est avec cet état d’esprit que j’embarque dans le récit.
En trois parties, quelques chapitres aux intitulés éloquents ,"Tu mourras seule et mal sapée" par exemple, et des interludes comme dans les chansons, j'ai découvert une tranche de vie, se déroulant sur quelques mois, qui raconte l'histoire d'Alex et son installation dans sa nouvelle existence loin des mondanités de la capitale.
Ce récit à la troisième personne nous ramène quelques temps avant la pandémie du COVID-19 et ses confinements.
J’ai apprécié ma découverte : les raisons de quitter Paris et de plaquer le microcosme culturel ultra sélectif pour se consacrer à la solitude, à la contemplation et à la débrouille ; effectivement, il n’est pas facile de se déplacer en milieu rural sans permis ni vélo, encore moins d’allumer un feu de bois et j’en passe et des meilleures.
J’ai lu avec intérêt les parts d’ombres et de lumières d’Alex, Margot, Jacques et comparses décrites par la plume d’Ann Scott, tantôt "pop", tantôt déchaînée et parfois carrément sanglante mais toujours avec un joli retour au calme. Vous en découvrirez toutes les subtilités en lisant le livre.
J’ai enfin applaudi leur insolence bien à elles et eux. Toutes et tous, pour des raisons qui leurs sont propres, vivent la recherche du bonheur en dehors des codes institutionnels "classiques" : mariage, famille, parentalité, et l’assument pleinement. Cette liberté "insolente" farouchement défendue est principalement la source de leurs échecs amoureux respectifs. Heureusement que l'amitié demeure fidèlement au fil des décennies.
Les Insolents est in fine une ode à l’exil et à l’amitié sincère, à la confiance au-delà des instincts et des pulsions, l’histoire de trois âmes sœurs inséparables malgré le temps et l’espace.
https://www.aikadeliredelire.com/2023/10/babelio-masse-critique-les-insolents.html
Le journal intime de Simone Grivise, "embochée" et "collabo"
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https://www.aikadeliredelire.com/2023/07/lu-et-approuve-vous-ne-connaissez-rien.html
Chartres, août 1944: Simone Grivise, qui a aimé un soldat allemand nazi, Otto Weiss, pendant l’Occupation doit affronter la haine et le mépris après la Libération.
Vous ne connaissez rien de moi est le portrait d’une femme libre et passionnée, qui a vécu une histoire d’amour interdite et qui assume complètement ses choix.
Attention: Ce roman historique est librement inspiré de la photographie La tondue de Chartres, de Capa.
Pour ma part,
Voici un roman époustouflant aux thèmes aussi larges que controversés.
Écrit à la première personne avec un registre de langage à faire fuir le plus grossier des charretiers mais dont la maitrise et la dextérité relève de la sophistication et en alternant les époques pour créer du suspense et du contraste entre le présent et le passé, l'auteure nous plonge dans le destin tragique de deux amants interdits pendant l'occupation allemande.
Mais pas que.
Le récit est avant tout l'histoire d'une famille d'après-guerre qui rêve d'ascension sociale. À sa tête, la mère Grivise qui a dû maintenir cahin-caha les affaires familiales tandis que le père Grivise, ancien soldat de la Grande Guerre se contente de vivoter dans son ombre, honteux de n'avoir jamais combattu au front avec honneur bref le genre à fuir dès que possible. Puis il y a les deux filles: Madeleine, la grande sœur dévouée et Simone, sur qui reposent tous les espoirs. En effet, Simone a droit à l'école privée, des cours particuliers en dépit d'une situation générale de plus en plus précaire.
Malgré une scolarité consciencieuse, Simone est victime de sa naïveté et de la misogynie propre à cette époque d'entre-deux guerres. Comme dans un journal intime, elle se confie et raconte, dans un langage graveleux mais libérateur dont elle a le secret, des situations difficiles et injustes. Je vous épargne les détails, vous les découvrirez en lisant le livre.
Enfin, c'est le roman de la ruine d'un fanatisme de jeunesse hitlérienne: avec la maturité et forte de son amour pour Otto, Simone réalisera que le régime nazi, qu'elle admirait tant autrefois, n'est qu'un miroir aux alouettes derrière lequel se dissimule l'Horreur. Mais pour l'heure, il est trop tard ...
Je salue l'immense prise de risque de l'auteure en traitant le thème tabou de la collaboration pendant l'occupation allemande, un sujet à controverse à prendre avec d'infinies précautions. Un premier roman tout simplement prodigieux!
+ À lire pour comprendre pourquoi et comment d'autres choisissent ou se résignent à collaborer avec l'ennemi: de la genèse de la lâcheté à la trahison suprême. Et à relire avec du recul et une grande ouverture d'esprit, juste pour écouter la voix de ceux à qui plus rien ne sera jamais pardonné.
- S'abstenir si vous êtes du genre impatient et pour éviter toute polémique: au début, pour des raisons qui lui sont propres, Simone fera l'apologie du nazisme et de l'occupation allemande avant de connaitre toute la vérité. Prévoir de bien lire jusqu'à la toute fin pour assister à son changement de pensée.
Indociles et insurgées : les oubliées de Fresnes
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Contre toute attente, La révolte des filles perdues n'est pas la reconstitution romancée de la grande révolte des pupilles de Fresnes qui défrayé la chronique au printemps 1947.
Dans l'immédiate après guerre, mai 1947, une centaine de jeunes filles de 16 à 21 ans incarcérées à la prison de Fresnes se sont soulevées, molestant les gardiens et saccageant la prison avant d'être canalisées.
C'est en partant de ce fait historique, que l'auteure imagine le destin de l'un des plus grands ténors du barreau des années 2000, Me Serge Valère, livré à sa naissance à l'Assistance publique et dont la mère pourrait bien avoir pris part à la grande révolte de Fresnes.
Pour en avoir le cœur net, ce dernier embauche une généalogiste, Elvire Horta, aussi zélée côté professionnel que paumée côté personnel (un aspect qu'elle se garde bien de dévoiler à son client, cela va de soi).
Au fur et à mesure de ses recherches, nous entrons dans le cœur de la mutinerie : qui étaient ces "filles perdues", quels ont été les manquements dont elles furent l'objet pour finir derrière les murs de ce centre d'éducation surveillé, dans quelles conditions ont-elles vécu leur enfermement ?
Pour ma part ,
Il y a des mots, la magie de quelques lettres à peine, qui, dès leur évocation, m'enchantent et me transportent : "révolte" en fait partie.
J'ai aimé le style, la construction et les apartés : dans ce roman, il y a la narration proprement dite puis la voix d'Elvire Horta, à laquelle je me suis plus ou moins identifiée dans la mesure où j'ai ressenti qu'elle porte en elle une braise, celle de la colère, que le moindre souffle est à même de raviver.
C'est cette dernière qui, au fil de ses investigations pour le compte de Serge Valère, anime le récit de ses réflexions incisives existentielles très souvent et sur la judéité et la politique parfois.
Pour ainsi dire, j'ai davantage découvert l'histoire d'une enquête, la mise en lumière d'un fait historique significatif de la condition féminine.
J'ai apprécié ma découverte mais l'épopée et l'enchantement présagés par le titre et auxquels je m'attendais n'étaient pas au rendez-vous.
J'aurais aimé plus de drame pour rythmer le récit en général: in fine, cela m'a tout de même paru assez long.
Mention spéciale: Vous trouverez à la fin du livre les sources et les références avec la liste des centres d'archives , des ouvrages et de la presse consultée. Ce roman est donc le fruit d'un important travail de recherche de l'auteure; sans qui cette révolte des Filles perdues aurait bien failli tomber dans l'oubli.
+ À lire: une œuvre singulière pour (re)découvrir la France d'après-Guerre et les Trente Glorieuses où les filles rebelles et marginales étaient enfermées dans des institutions répressives et violentes comme la prison de Fresnes.
- S'abstenir si et seulement si vous préférez les péripéties intenses : ce roman n'est ni une épopée ni une reconstitution historique, mais principalement le récit d'une enquête généalogique.
#LExperience #NetGalleyFrance
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https://www.aikadeliredelire.com/2023/08/netgalley-lu-et-approuve-lexperience-de.html
Pour ma part,
Léo, bientôt 45 ans, est au bord du burn-out. Sa vie lui échappe et il ne sait plus quoi faire pour s’en sortir, les détails sont à découvrir en lisant le livre.
Mais ce jour là, il décide d’entrer dans une salle de cinéma au hasard, sans connaitre la programmation en cours. Il se retrouve seul avec une femme et un écran noir qui lui adresse la parole.
Comme un miroir révélateur, l’écran lui pose des questions sur sa vie et lui fait vivre des situations absurdes, qui vont l'entrainer à se remettre en question.
Caméra cachée? Secte? Magie? L’écran est-il un ami, un ennemi, un coach, un thérapeute ? Quel est le but de cette expérience ? Léo va-t-il réussir à sortir de cette salle de cinéma transformé ?
Franchement, ce ne fut pas long, j'ai tout bonnement dévoré cette histoire surréaliste qui nous ressemble: insolite, à la fois décalée et définitivement actuelle.
J'ai a-do-ré le côté développement personnel et ludique du roman: ce n'est pas tous les jours que l'on se retrouve à interagir face à un écran de cinéma omniscient qui pose des questions existentielles: Léo est poussé à se connaître mieux, à changer ce qui ne lui convient pas et à accepter ce qui ne peut être changé.
Ce roman court (ou nouvelle?) invite à faire le bilan de sa vie, à se libérer de ses peurs, de ses regrets, de ses illusions et à trouver un sens à son existence en ces temps étranges et quelque peu désorientés.
Enfin, ce livre est avant tout un digne hommage aux salles obscures, aux cinémas, à nos "cinés", qui sont nos lieux d’évasion quand on en a besoin.
+ À lire en moins d'une heure que vous soyez fan de cinéma, de développement personnel ou non: ne passez pas à côté de cette parenthèse introspective romancée dont on a tous grand besoin parfois.
Je tiens à remercier NetGalley et les éditions Plon pour cette découverte éditoriale mémorable.
Le mythe de Faust 2.0
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Pour ma part,
Saisissant. Magistral.
David Smith est un sculpteur dépressif désespérément méconnu et fauché, prêt à tout pour sortir de son anonymat et rejoindre la cour des grands dans un New York culturel toujours plus sélectif et exigeant.
Cet abattement le conduit à pactiser avec la Mort en personne, sous les traits de son vieil oncle Harry, la vie contre la gloire et la postérité à l'instar de Pollock, Kadinski, Koons et consorts.
Un dessin aux traits encre de chine, tout en bichromie noire comme la nuit et bleue comme le blues; un découpage précis et parfaitement maîtrisé, des cadrages ingénieux et vertigineux: que des atouts pour cette adaptation 2.0 du fameux mythe de Faust.
Ainsi, avec un récit émouvant et de nombreux rebondissements, l'histoire de David Smith nous interroge sur la place de l’œuvre et de l’artiste dans notre société. Comment l'art transcende-t-il l'existence? D'où viennent la rage et la soif de célébrité, leurs effets sur l'élan créatif? Les artistes sont-ils finalement des messagers ou de simples mortels comme les autres?
En explorant les thèmes de la création, du sacrifice, de la passion et de la mort, Scott McCloud déploie ici toute sa maîtrise narrative et graphique, dans un style épuré et élégant.
À travers plus de 500pages, Le Sculpteur est un chef-d'œuvre incontestable, un roman graphique qui vous marquera longtemps.
+ À lire: le pacte faustien revisité et calibré à la perfection, Le Sculpteur de Scott McCloud est littéralement un blockbuster du roman graphique.
- S'abstenir si et seulement si vous avez des réserves sur le caractère trop perfectionniste ou trop didactique. Ici, pas de place pour la spontanéité et l'originalité.
La Renaissance de Patrick, à 50ans
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Pour ma part,
Par ce superbe album aquarelle aux dessins sans prétention, il est démontré que l’art peut être un moyen de se libérer de ses blocages et de se réconcilier avec soi-même.
En effet, Patrick, qui mène une vie morose et solitaire, houspillé par sa mère, va découvrir des aspects cachés de sa personnalité et de son histoire familiale grâce à la Joconde et à Léonard de Vinci.
Cette aventure métaphorique est l'opportunité pour notre héro de soigner enfin ses blessures d'enfance grâce à l’introspection et en s’ouvrant à la beauté et à la créativité.
Un bel hommage à l’art de la Renaissance et à Léonard de Vinci qui a marqué un tournant dans l’histoire de la culture et de la pensée humaine.
+ À lire pour passer un beau moment aquarelle et philosophique avec la Joconde. Et fêter la quête de soi et du sens de la vie.
- S'abstenir peut-être si l'on est du genre puriste car cet album est un pot-pourri de drame psychologique, de fantastique, d'art-thérapie et de feel-good. Un mélange plutôt inattendu.
Une Parisienne entre deux mondes
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Pour ma part,
J'ai découvert cet album après avoir été surprise et éblouie par Nettoyage à sec. Autrement dit, l'œuvre de Joris Mertens m'est parvenue dans l'ordre antéchronologique.
Malgré ce couac de mon fait, j'ai reconnu la patte de l'auteur dès le début : son style graphique aux dessins élégants, foisonnants et esquissés avec des couleurs tantôt contrastées, tantôt monochromes à l'exception du rouge cramoisi qui ressort comme un élément clé du récit.
Très influencé par son expérience dans le cinéma et la télévision, l'auteur joue aussi sur les échelles de plans, les pleines pages et les zooms pour créer une narration visuelle dynamique et expressive.
Béatrice est une jeune femme qui s’ennuie dans sa vie monotone et qui se laisse séduire par un album de photos qui lui raconte une autre histoire, plus romantique et passionnante. En s’identifiant à la femme de l’album, elle bascule dans un monde imaginaire où elle revit les moments du couple, mais elle perd aussi le contact avec la réalité à s'oublier elle même, ce, au sens propre comme au figuré.
Le message de Béatrice de Joris Mertens peut être vu comme une réflexion sur le pouvoir des images et la tentation de vivre par procuration, de fuir le présent pour se réfugier dans le passé ( clin d'œil à nos rapports envers les réseaux sociaux, mais ça, c'est une autre histoire ).
Magistral, grandiose, comme à l'accoutumée avec Joris Mertens.
+ À lire et à relire tout simplement pour le plaisir d'être en contact avec un chef-d'œuvre.
- S'abstenir si l'absence de phylactères vous pose problème; détail que j'ai failli oublier de vous dire : l'album est entièrement muet.
Alice au pays des actes manqués
#Demainmêmeheure#NetGalleyFrance
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Pour ma part,
Je suis mi-figue mi-raisin.
La flèche de l'Empire State Building sur fond azur parsemé de ballons de toutes les couleurs en première de couverture présage une lecture radieuse et décontractée.
Le décor est on ne peut plus attractif: le tout - New-York New-York, l'Upper East Side et le Pomander Walk des années 90 à nos jours.
Tous les clichés et les codes de la classe privilégiée newyorkaise sont au bel et bien au rendez-vous. Sans compter d'innombrables références à la pop culture américaine d'hier et d'aujourd'hui, j'ai retenu notamment Clueless, The Craft, Retour vers le futur pour le cinéma et Mariah Carey, Mary J.Blige et Dr Dre pour la chanson.
Les thèmes explorés sont pleins de profondeur: la vieillesse, la jeunesse, le deuil, l'amour paternel, les remords, les regrets et par dessus tout les univers parallèles, ce qui n'est déjà pas simple par essence.
Mais je n'ai pas été transportée malgré les promesses fantastiques d'un voyage spatio- temporel, pour cause d'un manque global de fluidité et d'équilibre dans le récit.
J'ai trouvé le démarrage trop lent et il y a trop de longueurs superflues, ce n'est que vers la quatrième partie, sur six, que les péripéties prennent un rythme intéressant.
En revanche, je ne doute pas que ce roman ferait une bonne adaptation cinématographique pour un film familial de type tranche de vie à la Grosse Pomme avec une sublime touche de fantastique.
ALERTE SPOILER: Je suis restée sur ma faim: j'aurai tellement aimé une petite conclusion, un clin d'œil en guise d'épilogue au sujet de la longévité du chat Ursula.
+ À lire car cela reste un roman au potentiel thématique très fort: un inévitable adieu entre père et fille.
- S'abstenir si comme moi, vous avez l'œil critique car le récit manque d'équilibre: il y a trop de longueurs superflues rendant la lecture monotone par moments.
Un crayon à la main, Claire a envie de griffonner ce qui lui passe par la tête. Et pour commencer, tous ces mots en M : mentir, malade, médecin, merdique, mort, mortalités, murs, monstres, maison, métamorphose, matrice, mer, montagne, monde…Mathilde. Les aligner ces mots, qu’ils émergent, qu’ils disent, qu’ils s’éclatent.
#Fuirlesmots #NetGalleyFrance: Une fugue salvatrice
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Virevoltant dans le passé et le présent, Fuir les mots est à la fois le récit d'un burnout éthique dans le milieu médical manifesté par une "fugue" ainsi que d'une profonde introspection. Il y a des moments dans la vie pro ou perso où l'on n'a pas de meilleur choix possible que de faire un break pour se ressourcer et mieux se retrouver.
Ce roman écrit à la troisième personne nous plonge dans les réflexions de Claire, une médecin qui participe à l'aide médicale à mourir et qui décide de quitter son compagnon et son travail pour se lancer dans un périple contemplatif, où elle se coupe des mots et se reconnecte à la nature et à son passé.
C'est ainsi que les souvenirs que l'on croyait oubliés refont surface: les plus beaux comme les plus douloureux... Je ne vous en dis pas plus, vous le découvrirez en lisant le roman.
C'est un récit à la fois terre-à-terre et poétique, avec d'éloquentes descriptions du paysage canadien et qui aborde des thèmes sensibles comme la fin de vie, le deuil, la relation mère-fille, le silence et la communication.
Mention spéciale pour les extraits de chansons, les références littéraires et les peintures sublimes de l'auteure en couverture et qui viennent jalonner le récit.
+ À lire si votre souhait est d'ouvrir votre esprit sur la question de l'accompagnement médical à la fin de vie.
Une destinée : percer les mystères des arc-en-ciels
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Pour ma part,
Ce récit nous ramène à une époque où l’arc-en-ciel, comme tout autre phénomène naturel, répondait d’une explication mythique ou divinatoire. Il s’agit du Grand Siècle, le XVIIe, où la peste faisait rage tandis que l’instruction était réservée aux élites.
Plus que l’histhttps://www.aikadeliredelire.com/2023/07/lu-approuve-larc-en-cieliste-laura.htmloire en elle-même, ce sont les couleurs qui sont fantastiques : à travers sept chapitres aux couleurs de l’arc-en-ciel, cet album one-shot raconte la quête initiatique du jeune Lord Hayden Springworth. En effet, sa fascination pour les arc-en-ciel le conduira vers sa vocation de scientifique par des chemins inattendus.
L'expérience de lecture est éblouissante : les illustrations sont amusantes et talentueuses à la fois. Les couleurs utilisées sont vives et chatoyantes. Le coloriage au crayon donne du relief et de la profondeur: les dessins sont pleins de caractère, riches de détails soignés fidèles à l’ambiance Grand Siècle du récit.
C’est le genre d’album jeunesse à offrir pour un ouvrir un œil critique sur le contraste entre la science et le folklore à une certaine époque de notre histoire et par ce biais, davantage guider vers l'instruction et le progrès. Je recommande.
On va rejouer La tempête de Shakespeare
#MatempêtePessanShakespeare #NetGalleyFrance
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Pour ma part,
Dans la vie, il arrive que plusieurs tempêtes s’abattent au même moment, au même endroit. À commencer par celle annoncée par la météo, comme ce matin là. Puis celle du dramaturge, patrimoine mondial de littérature et intarissable source d’inspiration, Shakespeare. Enfin, la tempête que l’on garde en soi… cette frustration et cette amertume qui tourbillonnent dans la tête.
Écrite à la troisième personne, cette tranche de vie raconte le déroulement de cette simple journée d’orage en cinq actes, pour reprendre le chapitrage de l'illustre dramaturge, dans l’intimité d’une petite famille citadine dont la maman Anne est enseignante, contrainte de se rendre à son poste malgré l'orage qui s'annonce, puis la petite Miranda qui n'a pas crèche aujourd'hui et le papa David ayant l'originalité d’être un comédien metteur en scène, grand fan de Shakespeare mais sans travail.
Sans prétention ni pathos larmoyant mais toujours empreint de cette colère sourde, ce sentiment d’injustice, ce court roman illustre les ressentis et les réflexions existentiels de David. Ce dernier, fidèle à son âme d’artiste, ayant fait le choix professionnel du statut d’intermittent du spectacle et s’étant vu refuser le budget pour réaliser son projet, (vous découvrirez pourquoi en lisant le livre) ressent la réprobation de son entourage à commencer par celle d’Anne, qui n’a jamais osé se prononcer à ce sujet mais qui n’en pense pas moins.
Cette tranche de vie m'a particulièrement émue et révoltée contre les préjugés dont sont affublés les intermittents du spectacle.
Le récit interroge sur la capitalisation de l’art en général et le futur des intermittents du spectacle en particulier: to be or not to be, that is the question_ être ou ne pas être, telle est la question, on ne peut plus shakespearienne.
Coup de cœur ! Parmi mes meilleurs romans lu en 2023.
Je tiens à remercier chaleureusement NetGalley et la maison d'édition Aux Forges de Vulcain pour cette découverte éditoriale enthousiasmante.
#MatempêtePessanShakespeare #NetGalleyFrance
La Divine Comédie de Dante revue par les frères Brizzi
Lu et Approuvé sur aikadeliredelire.com
Inconsolable depuis la disparition de sa bien-aimée Béatrice, Dante accepte de traverser les Neuf Cercles de l'Enfer afin de la rejoindre au Paradis.
Le poète latin Virgile le guidera dans cette odyssée de tous les dangers.
C'est ainsi que nos voyageurs se retrouvent à descendre chacune des strates foisonnantes d'âmes damnées torturées pour l'éternité par des monstres représentant leurs péchés.
Le texte initial de Dante (1265-1321) est un vaste cantique composé de chants versifiés sur le thème de l'enfer selon l'église catholique.
L'œuvre des frères Brizzi est une adaptation graphique de ce grand classique de la littérature italienne et/ou mondiale et concerne en essence la partie Enfer de la Divine Comédie.
Pour ma part, la vision dantesque de l'enfer est ici bel et bien au rendez-vous: sombre et sublime, le grandiose dans l'horreur.
Le chant canonique a été entièrement adapté à la mise en bulle. À cette fin, il a été remplacé par des textes de narration et de conversation au langage contemporain synthétisant l'essentiel de l'esprit du poète. Cette opération apporte un regard actuel sur ce monument de la littérature médiévale.
L'album est gorgé d'illustrations riches et vertigineuses librement inspirées des gravures de Gustave Doré(1832-1883).
Chaque planche, du début à la fin, est dessinée au crayon noir et blanc nuancé à l'infini. Les contours des dessins sont vaporeux et soignés à la perfection. L'on obtient un résultat éblouissant, somptueux qui nous amène à "admirer" des monstres, des démons et autres créatures infernales de tout poil.
Un album chef d'œuvre aux milles splendeurs claires et obscures.
+À lire pour redécouvrir le monument littéraire de la Divine Comédie sous un nouveau jour.
Vendre et acheter la Tour Eiffel : Le pourquoi du comment.
Thomas est un homme qui doute de nature. Aujourd’hui père de famille séparé de sa conjointe et au chômage après avoir travaillé deux décennies dans la pub, il s’interroge sérieusement et tente, bon gré mal gré, de trouver des réponses. Surtout le jour où son fils lui demande en guise de devoir pour l’école de retracer son arbre généalogique. Cet évènement le ramène à sa propre expérience enfant, trente ans plus tôt, où il apprit que son arrière-grand-père, dans les années vingt, a fait l’acquisition de la Tour Eiffel. Histoire vraie ? Thomas se dit que le moment est venu d’en avoir le cœur net.
Bien que le narrateur nous emmène avec lui parcourir à pied, en train ou en voiturette tous les chemins de Marennes et de Paris, L’invention de l’histoire est une quête avant tout introspective. L’heure est venue pour lui de remettre en question sa croyance depuis toujours : sa famille a-t-elle vraiment acheté la Tour Eiffel à ce Victor Lustig, mondialement connu comme « l’homme qui vendit la Tour Eiffel » et le plus grand arnaqueur de son siècle? À ce sujet, vaste est le questionnement de l’homme qui doute...
À travers les joies, les peines et les autodérisions de Thomas et animé par la franche camaraderie de sa médiathèque, quartier général et haut-lieu de ses investigations, ce livre est tout simplement drôle. Et l’on comprend à la fin le pourquoi du comment vendre et acheter la Dame de Fer de Paris.
Pour ma part, j’ai beaucoup ri. Je recommande.
Le roman d’un adieu aux lieux de l’enfance.
La maison familiale située Chemin du Péré au bord de la Charente,à quelques encablures de l’océan, où les enfants avaient pour habitude de passer les vacances , est vendue. Aujourd’hui est la dernière occasion de la visiter avant que n’y aménagent les nouveaux acquéreurs.
Lors de cette excursion, la narratrice, sans jamais se nommer, nous raconte les souvenirs heureux des lieux de son enfance.
À ses côtés, nous revisitons tous les recoins du domaine : la bâtisse, le jardin, le poulailler… avec immanquablement une anecdote amusante en réserve.
Arrive ensuite le moment de regarder les albums aux photographies anciennes. À la vue de ces images et de ces portraits, elle se remémore l’histoire de ses grand-parents Valentino et Giacomina arrivés en France depuis l’Italie dans les années quarante. Braves et travailleurs, le Nonno et la Nonna sont le socle de la famille. Ils ont eu quatre enfants et tous ont été naturalisés français.
Enfin nous partons en exploration en direction de l’Avenue de l’Île Madame. Sur place, nous découvrons le fort Lupin et autres lieux historiques d’une lumière différente. À la manière d’une guide, la narratrice nous explique le passé de ces lieux qu’on appelle le mur de l’Atlantique.
En toute aisance et confidence, Olivia Ressenterra nous transporte vers des endroits et des lieux-dits aux noms pittoresques et parfois méconnus. Le mur de l’Atlantique raconte le pèlerinage de la narratrice et, entre les lignes, la nostalgie du bonheur simple et rustique. Avec pléthore d’images et détails à foison, ce roman est un tendre hommage à la mémoire de ses grands-parents et à sa famille. Je recommande chaleureusement.
Numéro deux ou d’après moi « à la poursuite du rôle perdu ».
David Foenkinos nous raconte dans cette fiction romanesque, de sa plume originale dont il a le secret, l’histoire d’un certain Martin Hill. Mais d’abord qui est Martin Hill ? Serait-il une grande célébrité du cinéma? Une superstar de la musique ? Un artiste plasticien contemporain au sommet de son art ? Que nenni. Martin Hill est tout simplement le candidat malheureux à la sélection finale pour le rôle… d’Harry Potter. En effet, comme le monde entier ne l’ignore pas, l’enfant sorcier grandissant dans l’univers fantastique de J.K Rowling est interprété par l’acteur Daniel Radcliffe.
Ce livre raconte pour ainsi dire les circonstances de ce casting crucial et l’histoire de ce garçonnet dont le destin bascula dans l’ombre en 1999 à la suite de cette audition manquée. Tandis qu’Harry Potter, sous les traits de Daniel Radcliffe, devient un succès cinématographique et commercial, Martin grandit avec la certitude d’avoir fondamentalement raté l’opportunité et échoué son destin. Cette amertume devient l’origine de son manque d’assurance. Cette angoisse perpétuelle l’empêche littéralement de s’épanouir et d’avancer. Sans compter les vicissitudes d’ordre familial qu’il rencontrera.
Impossible de ne pas éprouver de l’empathie pour Martin Hill. À travers son récit, l’auteur met en exergue une société où les perdants n’ont pas droit de cité et sont condamnés à vivre le reste de leurs jours exclus dans la honte et le mépris. Cela s’adresse à nous qui avons été, un jour ou l’autre, devancé, dépassé, désillusionné, rejeté bref Numéro deux. Mais par bonheur, le salut existe. Il demeure dans l’amour, le partage et l’humanité.
Un héros inoubliable au destin fortuit décrit par le romancier avec délicatesse, en toute finesse, à la manière d’une aquarelle. Numéro deux est un roman incontournable à lire sans la moindre hésitation .
Il était une fois une fillette abandonnée qu'on appelait "la Fille des marais"...
Le premier roman de fiction de la zoologiste de renommée Délia Owen nous transporte au cœur de l'Amérique profonde des marécages à travers le portrait naturaliste d'une héroïne pas comme les autres.
L'histoire commence vers 1950 dans l'état de la Caroline du Nord, dans la petite ville de Barkley Cove au sein d'une famille vivant dans une cabane au beau milieu du marais côtier.
Il s'agit de la famille Clark. Il y a Pa, vétéran de la seconde guerre mondiale. Blessé à la jambe, il est devenu inapte au combat et touche une maigre pension depuis. Puis il y a Ma, s'occupant du foyer et des enfants. Elle a choisi de quitter la vie citadine ainsi que sa famille aisée pour vivre avec son mari à Barkley Cove. Enfin, il y a les cinq enfants, dont la petite dernière Kya alors âgée de 7ans.
Le cauchemar commence lorsque Pa se met à "taquiner la bouteille" pour n'être rien de plus qu'un mari violent et cruel envers les siens. Face aux sévices et aux coups, Ma tomba en dépression et se retira, à proprement parler, de son rôle de mère en quittant Barkley Cove sans se retourner. Ce fut alors le début de la fin : les enfants, presque tous adultes, abandonnèrent également les lieux. Tous sauf Kya, qui ,encore trop jeune pour comprendre ce qui arrive, resta avec son père.
Au début, plus ou moins solidaires face à l'abandon, ils restèrent ensemble tant bien que mal.
Enfin, un beau jour, Pa disparu à son tour sans laisser la moindre trace. C'est ainsi que Kya se retrouva seule face à son destin.
Comment grandir et se (re)construire seule avec pour seule ressource une nature infiniment sauvage ?
Comment échapper aux services sociaux et aux préjugés des gens de la ville ?
Comment choisir la solitude d'un marais plutôt que l'étouffement d'une vie citadine avec ses codes et ses convenances?
Comment retrouver la confiance après avoir vécu la trahison de l'abandon ?
Ainsi commence le récit de notre héroïne mais l'histoire ne s'arrête pas là. Le récit est raconté en deux temps, le temps de l'enfance et le temps de l'enquête. Là -dessus, je ne vous en dit pas plus et vous laisse le découvrir au fil du roman.
Ce roman est un chef-d'œuvre foisonnant de détails psychologiques, poétiques, paysagistes, botaniques, animaliers et parfois... culinaires (certains passages sont littéralement savoureux!).
C'est un roman multipolaire dans le sens où plusieurs fronts sont traités.
Tout d'abord, il s'agit de l'illustration de la pression sociale propre aux petites villes du temps de la ségrégation raciale (avant la loi de 1964) où tout le monde redoute de fréquenter les Noirs et "la racaille des marais"; où il est de bon ton de se soucier du "qu'en dira-t-on". C'est encore le temps de l'obscurantisme, de l'étroitesse d'esprit et des préjugés.
Ensuite, l'histoire est le manifeste de la liberté de vivre en marge du système. En effet d'autres univers existent au-delà de la ville, de ses gens et de ses contraintes, et l'amour sincère est possible delà des liens de parenté et de la nécessité primitive de se reproduire.
C'est également le roman initiatique. Nous assistons à la transformation d'une jeune fille en femme digne, indépendante et assoiffée de connaissances.
Enfin c'est une ode à la vie sauvage et à la préservation des marécages contre leur assèchement et l'exploitation immobilière. Délia Owen y décrit habilement l'écosystème fragile des marais, le rôle et l'importance de chaque être vivant, animal ou végétal, en ce lieu si particulier.
Ce roman best-seller a dernièrement été adapté au cinéma. Là où chantent les écrevisses est un conte d'apprentissage, d'indépendance et de liberté.