Marc-Edouard Nabe: retour sur le trublion de la littérature française

Nabe est-il le Pialat français de la littérature? En tous les cas, tout laisse à le faire croire. Voilà quelqu'un qui a publié près de 27 livres et qui cherche, avec succès, à s'auto-éditer.

Un auteur provocateur:

Dès son premier livre publié en 1985 "Au régal des vermines", Nabe crée la polémique en se définissant dans la lignée des Rebatet, Céline ou Léon Bloy (des écrivains qui sentent le soufre). Il est accueilli sur le plateau d'"Apostrophes" de Bernard Pivot, où Georges-Marc Benamou n'hésite pas à le cogner en direct. La LICRA portera plainte contre ce livre et l'auteur pour incitation à la haine raciale. Nabe, dès son premier roman, est ainsi considéré comme  un talentueux auteur polémiste et pamphlétaire. 

Depuis 1985, il écrit environ un roman par an sur divers sujets originaux, comme Billie Holiday ou met en scène son propre suicide dans "Je suis mort". C'est un écorché vif, quelqu'un d'original et unique dans le monde de l'édition française, mais dont l'esprit libre (voire le délire de persécution?) renvoie bien paradoxalement à des auteurs comme Léon Bloy ou même Céline. Pour en revenir au cinéaste Maurice Pialat; ce réalisateur se considérait comme trop original ou atypique dans le monde cinématographique face aux pesanteurs ou corporatisme des techiniciens ou producteurs français. Serait-ce de même pour Nabe?

Un exemple pour d'autres écrivains?:

Ce qui est foncièrement intéressant dans le cas Nabe, voilà un auteur qui reprend pratiquement intégralement les droits de ses romans (sur ses 27 romans, il a récupéré les droits de 22, dont "je suis mort" chez Gallimard ou "Régal des vermines" paru chez Barrault). L'avantage, c'est qu'il peut les réediter quand il veut. Cette histoire fait suite à son éviction en 2005 des éditions du Rocher qui le mensualisait  (maison d'édition rachetée par les laboratoires Pierre Fabre en 2005). Nabe s'est retourné juridiquement contre eux et a ainsi récupéré la propriété éditoriale de ses livres de cette maison.

Monsieur Nabe préféra donc créer son propre site Internet pour s'auto-éditer lui-même (comptant aussi sur les nombreux fans qui le suivent depuis ses débuts littéraires). Son dernier livre fait 700 pages ("l'homme qui arrêta d'écrire"). Particularité de ce livre: pas d'indications habituelles (sur l'éditeur, le prix...). A quoi bon d'ailleurs, ce livre n'étant pas fait pour être vendu en librairie. Voilà ainsi Nabe, auteur sulfureux qui prend en charge sa propre production et ne dépend plus du bon vouloir ou des caprices des maisons d'édition ou de libraires récalcitrants (un exemple pour d'autres écrivains à succès?).