Dans la chambre du jeune Lucas, tout avait toujours trouvé sa place.
Sa mère lui avait appris l'importance de mettre les choses en ordre. Les livres étaient soigneusement rangés par ordre alphabétique – malgré quelques petites erreurs – dans un gros coffre en bois rangé au-dessous d'une petite étagère blanche sur laquelle reposaient plusieurs figurines de soldats et de héros de bandes dessinées. À côté de cette étagère, en contrebas, il y avait un petit bureau sur lequel étaient ordonnées les affaires d'école du petit.
Tous les soirs, lorsqu'il rentrait, il suspendait son lourd cartable au dossier de sa petite chaise en bois. Puis il rangeait ses affaires, sur son bureau, selon ce dont il aurait besoin pour faire ses devoirs. Les cahiers avec lesquels il devrait travailler à gauche, les autres à droite en attendant de réviser. Sa trousse au milieu. Et tout au fond, contre le mur de la chambre, trois pots de crayons, stylos et feutres. Et dessous les pots, un gros tas de feuilles blanches, qui n'attendaient qu'à ce qu'on écrive ou dessine dessus.
À l'opposé du bureau, sur la droite de la porte d'entrée, il y avait le lit de Lucas. C'était lui qui le faisait tous les matins, comme les grands ! Mais il n'ignorait pas que sa mère repassait derrière lui pour arranger ce qui n'avait pas été fait correctement. Non pas qu'elle le crût incapable de bien faire, mais à l'âge de Lucas c'était normal d'encore faire des erreurs.
Au milieu de la chambre, entre le lit et le bureau, il y avait un magnifique tapis rond de couleur rouge. Dessus, reposait une merveilleuse structure construite en cubes de bois. C'était visiblement une sorte de château fort. Lucas l'avait construit avec son meilleur ami.
Et puis, il y avait la fenêtre dans le renfoncement de la chambre, à gauche. Elle était devancée par une banquette sur laquelle la mère de Lucas avait eu l'idée d'installer plusieurs coussins. Des bleus et des rouges. L'enfant aimait souvent s'y installer pour regarder les étoiles, enfin, quand les arbres du jardin ne gênaient pas trop la vue !
Oui, tout était toujours parfaitement en ordre dans la chambre de Lucas. Tout, ou presque. Il y avait cet ours en peluche que le garçon avait nommé d'après un surnom que sa mère lui donnait lorsqu'il était encore tout petit, celui-ci ne tenait décidément pas en place. La pauvre maman avait souvent dû gronder son enfant pour qu'il ne le laisse plus traîner n'importe où.
Une fois, elle l'avait retrouvé sous les couvertures. Une autre fois encore, allez savoir comment, le petit ourson marron s'était retrouvé en haut de l'étagère, au milieu des figurines de Lucas qu'il avait fait tomber pour faire un peu plus de place. La dernière fois, la peluche s'était installée au bureau de l'enfant.
Ce n'était pas drôle pour la mère de Lucas d'avoir à lui dire sans cesse de faire plus attention à ce jouet. Après tout, ils savaient tous que ce n'était pas un ourson comme les autres. Non, celui-ci, c'était Lulu, et c'était le meilleur ami de Lucas ! Hors de question de le perdre encore, se disait la maman !
Elle se souvenait toujours avec effroi de la mésaventure qu'ils avaient eu avec la pauvre peluche. Ils l'avaient oubliée en forêt et, allez savoir quel miracle s'était produit, c'était un cerf qui le leur avait ramené ! Pouvez-vous y croire ? De fait, la mère du garçon s'était montrée très vigilante à ce qu'il ne perde plus jamais Lulu.
Alors, la jeune femme avait recommandé à Lucas de définir une place où ranger son ami lorsqu'il ne l'emportait pas avec lui. Ils avaient décidé que de le mettre sur le lit, tourné en direction de la porte de la chambre, serait sans doute le mieux à faire. Comme ceci, Lulu ne pourrait pas manquer son ami qui rentre de l'école. La première chose que verrait Lucas en rentrant dans sa chambre, ce serait Lulu.
Mais les choses n'étaient pas aussi simples et la peluche ne restait jamais bien longtemps sur le lit. Elle avait d'autres choses à faire.
Cette fois-ci Lulu s'était retrouvé sur la banquette, sous la fenêtre. Il était installé entre deux gros coussins dans lesquels il donnait presque l'impression de se noyer. Heureusement, la maman ne le remarqua pas. C'était Lucas qui l'avait retrouvé, le soir venu.
LUCAS – Lulu, je t'avais prévenu de te remettre sur le lit à quatre heures, pour que maman ne me dispute pas si jamais tu avais encore bougé !
L'ours en peluche roula sur lui-même pour retomber sur le sol juste devant la banquette. Alors il leva un bras et se frotta derrière le crâne avant de se relever tout doucement. Il avança jusqu'à son meilleur ami.
LULU – Je suis désolé Lucas, je sais que personne ne doit découvrir notre petit secret...
Le jouet parlant faisait ici référence à l'extraordinaire magie à laquelle vous veniez d'assister. Depuis qu'il avait été perdu en forêt, on lui avait confié le merveilleux don de la vie. Ce qu'il y avait de plus étrange, c'était qu'il était capable de se souvenir de toute la non-vie qu'il avait eue avant de pouvoir bouger et parler. Ce sont ces nouvelles capacités qui permirent à Lulu de traverser la forêt où il avait rencontré Rhen le cerf courageux, l'Ours puissant et Lila l'oiseau-mouche qui l'avaient beaucoup aidé.
Lila.
C'était ce miracle qui avait permis aux deux meilleurs amis de se retrouver.
LULU – … Mais depuis quelque temps, il y a quelque chose qui m'intrigue.