" Je la regarde qui attend, les yeux grand ouverts sur quelque songe miraculeusement préservé. La lumière écrase les ombres sur ses cheveux blonds et ça me prend par surprise pour la centième fois. Tout est froid ici, déserté ; pas assez pourtant pour éteindre son sourire. Un sourire à éclabousser les étoiles… Comme le sien, avant. Avant qui me ramène à elle pour qui je réécris l’histoire :
“Il était une fois, il y a très longtemps, un Royaume flamboyant. Doté de domaines prospères et ouvert aux riches marchands couverts d’or et de soies. Là, qui faisaient battre les cœurs et vibrer la Cour, un roi fort comme le temps et une reine Belle comme le jour…
– N’importe quoi !
– Qu’y a-t-il, Ana ?
– Le temps n’est ni fort ni rien, les gens vieillissent et puis voilà !
– Fort comme un lutteur, si tu préfères ?
– Et le jour… Enfin, ça, je sais pas.
– C’est beau, mon cœur : éclatant. A faire danser les poussières, tourbillons magiques de l’aube rose au crépuscule enflammé. Enfin, bref :
“Le couple aimé de tous se lamentait de n’avoir point descendance. Et les donjons, et les cours, les allées, les chemins, les chapelles, les terres, les chasses, les forêts lointaines, tout et tous résonnaient aux échos de la longue plainte : « Ô fortune cruelle, pourquoi nous imposer ce pesant fardeau qui transforme un berceau en froid tombeau…
– Tu m’as dit qu’il n’y avait plus de forêt sur la Terre (...) ", page 165.