Délinquant et homosexuel revendiqué, admirateur des grands criminels et des terroristes, Genet a toujours fasciné. Haï par la droite, encensé par Sartre, Foucault et Derrida, il s'est efforcé toute sa vie de subvertir la morale judéo-chrétienne occidentale. Aujourd'hui, le personnage de Genet est devenu un symbole de résistance à l'injustice et à l'oppression ; mais cette vision escamote totalement l'"autre Genet", le pupille de l'Assistance publique choyé par sa famille d'accueil, le déclassé aigri et antisémite que fascinent les crimes de la Milice et les camps de la mort nazis.
Une nouvelle approche de Genet s'impose. L'étude de son dossier à l'Assistance publique, resté inédit à ce jour, et les parallèles entre son esthétique et l'idéal fasciste permettent de déconstruire les interprétations bien-pensantes.
Fondée sur les travaux de Bourdieu, Ricoeur et Jauss, l'étude d'Ivan Jablonka est une tentative d'histoire-problème dans la tradition de l'école des Annales, mais rapportée au domaine de la littérature. Pour cette raison, Les Vérités inavouables de Jean Genet ne constituent pas seulement une biographie démystificatrice ; c'est aussi un essai sur l'un des plus grands auteurs contemporains, propre à éclairer son univers littéraire et plus généralement l'histoire culturelle de la France au XXe siècle.