Le romancier Meir Shalev livre avec « Ne le dis pas à ton frère », un roman haletant et subtil, où la sensualité valse tour à tour avec la peur et la douleur. Alors que les liens amoureux se distendent, la souffrance continue à faire en sourdine ses sanglots. Les rapports familiaux laissent l’écho d’une petite musique non moins ténébreuse. Entrez dans la danse macabre des sentiments.
Le romancier Meir Shalev livre un roman haletant et subtil, où la sensualité valse tour à tour avec la peur et la douleur. Alors que les liens amoureux se distendent, la souffrance continue à faire en sourdine ses sanglots. Les rapports familiaux laissent l’écho d’une petite musique non moins ténébreuse. Entrez dans la danse macabre des sentiments.
La peur est-elle un sentiment plus puissant que le désir ? Le nouveau roman de Meir Shalev, s’amorce sur le mode érotique et vire très vite au thriller. Le beau, le sublime Itamar, coach sportif et ancien instructeur sportif de Tsahal, raconte à son frère Boaz une (més)aventure qui lui est arrivée vingt ans avant. Itamar – Itta pour sa maman – a survécu, puisqu’il est toujours là pour raconter cette histoire. Celle d’une rencontre dans un bar qui vire au cauchemar.
Dans ce onzième roman, la peur l’emporte bien sur la sensualité. Sans jamais complètement s’en séparer. Les deux sentiments s’entremêlent dans un corps-à-corps trouble. Délicieuse, sulfureuse partition pour jouer la petite musique du suspense, d’abord sourde, lancinante, qui devient, à certains moments, plus violente.
Après une vision humaniste de la Bible (Ma Bible est une autre Bible) et un roman sur la conception baroque d’un enfant (Le pigeon voyageur), tous deux parus aux Éditions des Deux-Terres, le romancier israélien montre une nouvelle fois son art de la narration. Meir Shalev pique au vif la curiosité du lecteur.
Ne le dis pas à ton frère témoigne d’un art du portrait qui est la marque des romans classiques. Chaque personnage est à sa place, joue son rôle à la perfection et ne laisse transparaître ses motivations qu’au fil du temps. Les facettes de leur personnalité se dévoilent lentement, au gré des anecdotes que les deux frères échangent sur leur enfance. Leurs traits de caractère, séduisants ou irritants, sont autant de notes de musique qui reviennent former le motif et offrir les variations d’une mélodie qui, en famille, est plus souvent dissonante qu’harmonieuse.
Le dialogue voluptueux de l’inconnue avec Itta se tisse avec celui qu’il entretient avec son frère à vingt ans de distance, sans qu’on ne puisse les distinguer visuellement dans le texte. En filigrane, à travers les audaces et les cachoteries, les faiblesses et les malices, c’est l’art de la manipulation qui est le mieux partagé par tous ces personnages au caractère bien trempé. Israéliens.
Boaz est ingénieur spécialiste de la sécurité de sous-marins. Il traque les failles de son frère, car ses parents lui ont assigné le rôle de protecteur… de son grand frère. Il ne se prive pas non plus de se railler de ses faiblesses de séducteur malheureux dans ce jeu où le physique ne fait pas tout.
Le souvenir d’un grand amour continue dire qu’il serait malheureux serait un pléonasme, tant c’est ici le contraste entre ses deux protagonistes qui en a fait le sel, l’essence, et finalement la déchéance. L’égoïsme est un autre trait de caractère formidablement partagé par ces héros de la guerre des sentiments.
Amour filial, amour conjugal, passion fugace laissent chacun entendre l’écho d’une musique ténébreuse. Dont parfois s’échappent les trilles d’un souvenir heureux, moment de bonheur trop bref que seule la littérature peut enchâsser dans l’éternité, tel un bel insecte, ou une jolie fleur, pris dans l’ambre.
> Ne le dis pas à ton frère, de Meir Shalev. Traduit de l’hébreu par Sylvie Cohen. Gallimard, 268 pages, 23 euros. >> Pour acheter le livre, cliquer sur ce lien
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