Cette fois, l'histoire se déroule sur fond de conflit Iran-Irak. La petite Marjane a grandi. C'est désormais une adolescente déterminée et à la langue bien pendue. Son tempérament indépendant et son goût de la liberté s'accommodent mal des contraintes que fait peser le nouveau régime. À l'école, Marjane et ses copines laissent s'exprimer leur esprit frondeur : elles adorent tourner en dérision les séances de supplice virtuel, organisées par les professeurs en hommage aux soldats tombés au front… ! Mais l'heure est à la gravité. Et pendant que Marjane se rend à sa première boum avec un pull plein de trous tricoté par sa mère, les jeunes Iraniens pauvres sautent sur des champs de mines. À leur cou est accrochée une clé dérisoire censée leur ouvrir les portes du paradis…
Persepolis rend bien compte des contradictions et des tourments qui assaillent une jeune fille prise entre son désir de vivre sa jeunesse et le carcan imposé par les tenants de la révolution islamique. Le ton du récit est toujours juste. Il oscille entre l'humour et la gravité, entre l'émotion et la légèreté, entre la drôlerie et l'horreur. Le graphisme simple et lisible ne se perd pas en vains effets de style pour mieux se concentrer sur les personnages, leurs expressions, leurs joies, leurs désillusions. À la fin de ce second volume – Persepolis en comptera quatre –, Marjane s'envole pour l'Europe à la demande de ses parents, soucieux de mettre leur fille en sécurité. Le moment est poignant. À l'image de ce livre tout entier, porté par une écriture superbe. Persepolis est une véritable leçon de vie et d'amour : le journal d'une jeune fille qui dit adieu à son enfance avant de plonger dans l'inconnu pour commencer une nouvelle vie. Bouleversant. --Gilbert Jacques