Chronique de Littéraflure

« L'origine des larmes » de Jean-Paul Dubois : la mort en double

Comment juger un parricide post-mortem ? C'est la question qui sous-tend le dernier livre de Jean Paul-Dubois : « L'origine des larmes » (L'Olivier). Un texte qui nous plonge dans la noirceur de l'âme humaine  du narrateur, Paul. La chroniqueuse Littéraflure applaudit ce texte, qui explore avec brio les ressorts de la haine d'un fils pour son père.

Portrait de Jean-Paul Dubois, capture d'écran d'une vidéo YouTube Portrait de Jean-Paul Dubois, capture d'écran d'une vidéo YouTube

L’écrivain qui a reçu le Goncourt, on l’attend au tournant. On guette le faux pas, l’accident industriel.

Raté. Jean-Paul Dubois nous a encore écrit un grand roman, avec pour incipit un acte en apparence insensé qu’il analyse chapitre après chapitre : un parricide post mortem. Rien que ça.

Comment juger un parricide post-mortem ?

Paul Sorensen parle ainsi de son père, Thomas Lanski : « (…) désaxé, dangereux, pervers, irrigué en permanence d’un flux malveillant. Dans cet univers inversé, mon seul et unique projet fut de grandir contre lui. »

Un père sans scrupule

Lanski, un homme sans scrupules (p.31), cruel (p.112), qui méritait bien de mourir deux fois. Mais qu’en dit la justice ? À quoi condamne-t-on un tueur de cadavre ?

À expliquer son geste ! Il aura ses raisons, ses circonstances atténuantes, ses motivations profondes. Les mettre à jour, c’est le boulot de Guzman, le psychiatre auquel Paul a l’obligation de raconter sa vie.

Raconter une vie  à l'ombre de la mort

Enfin sa vie… Façon de parler. Du drame originel de sa naissance à son rôle de patron d’une entreprise (Stramentum) spécialisée dans la confection de housses pour macchabées, il semble que la mort ait été son unique et fidèle compagne.

Portraits de famille

La réussite de ce roman tient à ses fabuleux portraits. Celui du narrateur, Paul Sorensen, un homme à la dérive, privé d’amour maternel, qui s’en remet à l’IA pour sonder son âme, tel un Dorian Gray. Celui de l’odieux Lansky, en plaçant le diable dans les détails, comme ces petites phrases toutes faites qu’il utilise pour déstabiliser ses interlocuteurs (p.39) ou sa manière de se goinfrer d’hosties en blasphémant (p.64).

Ce bouquin est une tuerie.

Les mots de l'éditeur

Paul a commis l’irréparable : il a tué son père. Seulement voilà : quand il s’est décidé à passer à l’acte, Thomas Lanski était déjà mort… de mort naturelle. Il ne faudra rien de moins qu’une obligation de soins pendant un an pour démêler les circonstances qui ont conduit Paul à ce parricide dont il n’est pas vraiment l’auteur.
L’Origine des larmes est le récit que Paul confie à son psychiatre : l’histoire d’un homme blessé, qui voue une haine obsessionnelle à son géniteur coupable à ses yeux d’avoir fait souffrir sa femme et son fils tout au long de leur vie. L’apprentissage de la vengeance, en quelque sorte.
Mélange d’humour et de mélancolie, ce roman peut se lire comme une comédie noire ou un drame burlesque. Ou les deux à la fois.

> L'origine des larmes de Jean-Paul Dubois, Editions de l'Olivier, 256 pages, 21 euros >> Pour acheter le livre, cliquer sur ce lien

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Littéraflure est le pseudonyme de critique littéraire d'une auteure qui a déjà publié cinq romans et dont l'identité est inconnue. Prochainement elle fera paraître ses Confessions d'une chroniqueuse littéraire.
Son credo : « Je porte aux nues et souvent j’érafle pour que vive la littérature ! »

 
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