Résumé
Cette édition vous présente deux ouvrages fondateurs du concept de désobéissance civile
:
- LA DÉSOBÉISSANCE CIVILE, de Henry David THOREAU
- ON THE DUTY OF CIVIL DISOBEDIENCE, sa version originale en anglais
- LE DISCOURS DE LA SERVITUDE VOLONTAIRE, d’Étienne de la BOETIE et son introduction, notes et références de Paul Bonnefon ainsi que,
- LE MÉMOIRE INÉDIT TOUCHANT L’ÉDIT DE JANVIER 1562
La désobéissance civile est le refus assumé et public de se soumettre à une loi, un règlement, une organisation ou un pouvoir jugé inique par ceux qui le contestent, tout en faisant de ce refus une arme de combat
pacifique.
Le terme fut créé par Henry David THOREAU, le philosophe anti-esclavagiste américain du XIXème, dans son essai La Désobéissance civile (On the Duty of Civil Disobedience), publié en 1849, à la suite de son refus de payer une taxe destinée à financer la guerre contre le Mexique. Si la désobéissance civile est une forme de résistance, elle se distingue pourtant de la révolte au sens classique, qui oppose la violence à la violence. La désobéissance civile, plus subtile, refuse d'être complice d'un pouvoir illégitime et de nourrir ce pouvoir par sa propre coopération.
Le principe est utilisé aujourd'hui au sein des démocraties pour lutter contre certaines lois lorsque les militants estiment que la légalité ne parviendra pas à modifier ces lois.
Ce plaidoyer contre la puissance aveugle du gouvernement et critique acerbe des mécanismes d’asservissement des appareils de l’État, formule un modèle de révolte inédit qui, de
Martin Luther King aux États-Unis à
Gandhi en Inde, ou
Mandela en Afrique du Sud changera profondément l’histoire politique et sociale du XIXe et du XXe siècle.
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Mais, l'idée de la résistance à une loi injuste est née bien avant le XIXe siècle. La Boétie, dès le XVIe siècle, a démontré l'efficacité du procédé dans son Discours de la Servitude volontaire, devenant l’un des premiers auteurs à dire que les sujets ne sont pas contraints à une obéissance passive et aveugle : ils ont le droit et le devoir de juger le prince et de lui refuser leur soutien s’il a manqué à sa charge. Remettant en cause la légitimité des puissants, il porte un regard neuf sur la relation dominant/dominé et soutient une thèse originale : un peuple peut résister sans violence par la désobéissance et provoquer l'effondrement d'un État illégitime, car, dit-il, le pouvoir le plus féroce tire toute sa puissance de son peuple.
Mais le Discours n’est pas un appel à la révolte, mais un appel à la raison.
Texte bref, parfaitement construit, scintillant, paradoxal, le
Discours de la servitude volontaire est un mode d’emploi pour ne pas être dupe du pouvoir. C’est en comprenant ses mécanismes, non en luttant contre la tyrannie qu’on parvient à l’abattre. Voici la parole de celui qui n’a que 16 ans quand il rédige ce texte plein de sagesse.
Le peuple seul fait lui-même sa servitude ou sa liberté parce qu’il fait ou défait le tyran. Le défaire, ce n’est pas le tuer, c’est tout simplement refuser de le servir. "Soyez résolus de ne le servir plus et vous voilà libres."
L’œuvre, rebaptisée
Le Contr’un en 1574 par les protestants persécutés, devint un outil de contestation politique contre le roi de France catholique, puis fut considérée ensuite comme un pamphlet contre la monarchie. Elle sera réimprimée sous la Révolution (et plagiée par Marat dans Les chaînes de l’esclavage, puis contre Napoléon III.
C’est au XIXe siècle que le texte sera reconnu comme une œuvre majeure, une des premières à avoir théorisé ce que l’abolitionniste américain Henry David THOREAU avait appelé la désobéissance civile.
Unique et inclassable, la pensée de la Boétie deviendra une référence littéraire pour ceux qui luttent contre un pouvoir politique injuste.