Bruno Corty est passionné par la littérature américaine depuis l’adolescence. Après avoir rencontré nombre de ses auteurs, il nous livre avec son « Dictionnaire amoureux de la littérature américaine » (Plon), son abécédaire amoureux, un voyage dans le temps et l’espace, un hommage à celles et ceux qui l’ont fait rêver. Sarah Sauquet l'a écouté évoquer sa passion lors d'une conversation avec Natalie Vigne, dans le cadre des formidables soirées « In the Mood for books ».
Une collection éminemment et délicieusement subjective
Inconditionnelle de la collection, je mesure la subjectivité de l’exercice du dictionnaire amoureux, et j’aime la façon dont des écrivains et experts que j’admire peuvent s’emparer de leurs thèmes de prédilection comme le polar (Pierre Lemaitre), le Québec (Denise Bombardier) ou la chanson française (Bertrand Dicale), pour ne citer que mes titres préférés, afin de nous en offrir une vision singulière, labyrinthique et ainsi renouvelée.
Rédacteur en chef du Figaro littéraire, Bruno Corty nourrit depuis toujours une passion pour la littérature américaine.
Une conversation
Au cours d’une conversation à bâtons rompus avec Natalie Vigne, Bruno Corty a d’abord évoqué les artistes qui l’ont amené à la littérature américaine (la pop culture était à l’honneur) avant de rappeler que ce livre n’aurait pas existé sans des passeurs auxquels il rend hommage dans l’avant-propos du livre.
Natalie et lui ont ensuite passé en revue plusieurs entrées du dictionnaire, et je vous livre quelques morceaux choisis qui ne donnent qu’un très mince aperçu de cet ouvrage riche, écrit par un passionné qui parle avec sensibilité, humour et justesse de ses « amis américains » pour reprendre l’expression de Bertrand Tavernier.
Les incontournables
- « Les Américains sont des génies du melting-pot. La littérature américaine peut absorber des gens qui viennent de l’étranger, et écrivent avec leur culture. »
- « Hemingway est un de ceux qui a le mieux compris les images et l’art de la mise en scène. Ses nouvelles sont des bijoux, c’est un styliste incroyable. »
- « Isaac Bashevis Singer est le conteur yiddish par excellence. Il écrit en yiddish, et c’est Saul Bellow qui le traduit. Il raconte les petits, moyens et gros ennuis devant lesquels on fuit. »
- « Philip Roth est un type étonnant qui n’a pas le génie de Saul Bellow et est dans son ombre. Il choque sa communauté. C’est un dingue, c’est un obsédé. »
- « Cormac McCarthy était très intègre, fascinant, il faisait partie des grands invisibles, comme Salinger ou Pynchon, qui refusaient toute concession. »
- « Bret Easton Ellis est l’enfant terrible des lettres américaines. Il est ultra doué et se décide à faire un jour une critique des années Reagan. Il pousse tous les curseurs au maximum et l’Amérique le déteste. »
- « Stephen King a été moqué pendant des années. Quand on lui décerne ses premiers prix, l’Amérique se réveille. Personne n’a écrit aussi bien sur l’Amérique des motels, l’Amérique des gamins. »
Les résonances musicales
La soirée s’est finie en musique et nous avons notamment écouté « Moby Dick » de Led Zeppelin, l’indétrônable « I am the Walrus » et « To be Young, gifted and black », interprété par Aretha Franklin.
Un très grand merci à Natalie, merveilleuse maîtresse de cérémonie, dont les soirées littéraires sont des moments suspendus à savourer telles des respirations.
A propos : le mot de l'éditeur
Il était une fois l’Amérique. Dès l’enfance, Bruno Corty a plongé dans ses espaces infinis, marché avec Thoreau, descendu le Mississippi avec Mark Twain, pris la mer avec Jack London et Herman Melville, tremblé avec Edgar Allan Poe. Pendant ses études, il s’est passionné pour les romans de Dos Passos, Faulkner, Fitzgerald, Hemingway. Devenu journaliste littéraire à la fin des années 80, il a découvert, sur les conseils d’amis éditeurs, les littératures de genre, du fantastique au polar. Il a eu la chance de rencontrer beaucoup d’auteurs : Norman Mailer, John Irving, James Ellroy, Don DeLillo, Russell Banks, Paul Auster, Richard Ford, Jim Harrison, James Salter, Stephen King… Son Amérique à lui raconte la Génération perdue, la Deuxième Guerre mondiale, la Chasse aux sorcières, la Beat Generation, les années Kennedy et Marilyn, le Nouveau Journalisme, le Viêt-Nam, Dylan prix Nobel. C’est New York et Los Angeles, San Francisco et la Louisiane, Jim Morrison et Patti Smith, Elia Kazan et Michael Cimino, des chanteurs, des poètes, des cinéastes devenus écrivains. La littérature américaine a deux siècles. C’est peu et c’est gigantesque au regard du nombre de ses chefs d’œuvres : de Moby Dick à Sanctuaire, de La Lettre écarlate à L’Attrape-cœurs, de Gatsby le magnifique au Dahlia noir, de Manhattan Transfer à L’Adieu aux armes.
>Dictionnaire de la littérature américaine de Bruno Corty, Plon, 624 pages, 28 euros >> Pour acheter le livre, cliquer sur ce lien
------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Professeure de lettres et autrice,
Sarah Sauquet a notamment publié
Les 1000 livres qui donnent envie de lire (Glénat, 2022). Elle est aussi la co-créatrice des huit applications littéraires
Un texte Un jour. Qu’il s’agisse d’enseigner, d’écrire, ou d’établir des ponts entre cultures classique, populaire et contemporaine, son travail tourne autour d’un objectif : celui de susciter l’envie de se cultiver. Son dernier livre :
Petites chroniques de culture populaire chez Librisphaera.