Au nom de toutes les femmes

Deux livres pour saluer le courage des iraniennes : un essai, « Des iraniennes, Femme, vie, liberté » et un roman, « Badjens» de Delphine Minoui

Depuis la mort de Mahsa Amini en Iran le 16 septembre 2022 pour cause de voile « mal ajusté », la révolte des iraniennes n'a cessé de grandir. Deux livres viennent faire écho au courage de ces femmes : le remarquable document politique des Editions des femmes- Antoinette Fouque, « Des Iraniennes, Femme, vie, liberté, 1979-2024 »ainsi que le roman de Delphine Minoui, « Badjens » (Seuil), plongée poétique dans le quotidien de quelques-unes de ces femmes audacieuses et courageuses, qui crient leur résistance en chantant.

Depuis la mort de Mahsa Amini en Iran le 16 septembre 2022 pour cause de voile « mal ajusté », a révolte des iraniennes n'a cessé de grandir. Malgré la répression sanglante du régime iranien.  Deux livres viennent faire écho au courage de ces femmes : le remarquable document politique des Editions des femmes -Antoinette Fouque, Des Iraniennes, Femme, vie, liberté,1979-2024 ainsi que le roman de Delphine Minou, Badjens (Seuil) qui nous plonge avec poésie, dans le quotidien de quelques-unes de ces femmes audacieuses et courageuses, qui crient leur révolte en chantant.

Un livre politique : Des Iraniennes, Femme, vie, liberté, 1979-2024 (Editions des femmes), le journal de bord de leurs actions courageuses

Voilà le premier livre politique qui traite de la lutte des femmes en Iran depuis les grandes manifestations de 2022 et la naissance du mouvement « Femme, vie, liberté ». Edité par les Editions des femmes- Antoinette Fouque, cet ouvrage remarquablement documenté et illustré, permet de prendre la mesure du courage et de la force de résistance des femmes iraniennes. Il ne s'agit pas d'opinion mais de faits. Il ne s'agit pas de fantasme mais de réalité. Il s'agit pour nous lecteurs de comprendre et de ne pas croire aux fake news qui circulent souvent sur le sujet.

Il y a deux ans, la mort de Mahsa Amini

Il y a deux ans, la mort de Mahsa Amini, une jeune femme kurde iranienne morte le 16 septembre 2022 alors qu'elle était détenue par la police des mœurs pour un voile « mal ajusté » , a déclenché l'une des plus importantes vagues de contestation qu'ait connues la République islamique. Dans les jours suivant sa mort, des dizaines de milliers d’Iraniennes et Iraniens sont descendus dans la rue pour exprimer leur colère, en scandant le slogan « Femme, vie, liberté » . Ces manifestations, qui ont duré plusieurs mois, ont été violemment réprimées par les autorités iraniennes. 

Le mouvement « Femme, vie, liberté » ne s'est pas arrêté malgré les répressions

Depuis la naissance du mouvement « Femme, vie, liberté », les Iraniennes sont soumises à une répression extrêmement violente : meurtres, arrestations arbitraires, tortures, conditions de détention inhumaines… Contre la misogynie et l’autoritarisme, les protestations et manifestations initiées par les Iranien·nes sont relayées dans le monde entier. Ce soulèvement fait écho à celui de mars 1979, où des milliers de femmes se sont mobilisées à Téhéran pour défendre leurs droits. À ce moment-là déjà, à l’initiative d’Antoinette Fouque, des militantes du MLF- Psychanalyse et Politique s’étaient rendues sur place pour documenter cette révolte, main dans la main avec elles.

Le témoignage de  Nargess Mohammadi, prix Nobel de la paix en 2023

«  En tant que femme, et comme des millions d’autres femmes iraniennes, j’ai toujours été confrontée à l’enfermement de la culture patriarcale, au pouvoir religieux et autoritaire, aux funestes lois discriminatoires et oppressives, et à toutes sortes de restrictions dans tous les domaines de ma vie. […] La triste vérité, au fond, est que le gouvernement autoritaire, misogyne et religieux de la République islamique nous a volé notre vie. » Nargess Mohammadi, prix Nobel de la paix. 2023

Un livre collectif

Ce livre collectif, allie les époques (1979, 2022) et les pays (France et Iran). Il s’inscrit dans la chaîne de solidarité qui soutient le combat des femmes iraniennes. Il comprend des archives inédites et des entretiens avec des militantes d’hier et d’aujourd’hui ; il restitue et transmet le témoignage des luttes passées et présentes. Cet ouvrage a été réalisé par des militantes du MLF-Psychanalyse et Politique et de l’Alliance des femmes pour la démocratie, avec la collaboration de militantes iraniennes du mouvement « Femme, vie, liberté » et de toutes celles qui ont témoigné de 1979 à 2024 de leur combat.
Il a été réalisé par des militantes du MLF-Psychanalyse et Politique et de l’Alliance des femmes pour la démocratie, avec la collaboration de militantes iraniennes du mouvement « Femme, vie, liberté » et de toutes celles qui ont témoigné de 1979 à 2024 de leur combat.

Les bénéfices de la vente de ce livre seront reversés à des associations de femmes iraniennes en lutte pour le démocratie et la défense de leurs droits.

> Des Iraniennes, Femme, vie, liberté 1979-2024 , Collectif- Editions des femmes- Antoinette Fouque, 239 p., 25 € >> Pour acheter le livre, cliquer sur le lien 

Un roman: Badjens de Delphine Minoui, la résistance des femmes en chantant

« Bad-jens : mot à mot, mauvais genre. En persan de tous les jours: espiègle ou effrontée. » Comme nous le montre la romancière d'origine iranienne Delphine Minoui, les femmes poursuivent la lutte en Iran sans jamais se présenter comme des victimes passives. Elles risquent leur vie, mais elles le font avec une force qui force l'admiration. Elles se mettent en mouvement dans tous le sens du terme, en échappant ainsi à leur destin tout tracé.

L' audace courageuse des jeunes iraniennes 

Le roman se situe à Chiraz, à l'automne 2022. Au cœur de la révolte « Femme, Vie, Liberté », une Iranienne de 16 ans escalade une benne à ordures, prête à brûler son foulard en public. Face aux encouragements de la foule, et tandis que la peur se dissipe peu à peu, le paysage intime de l’adolescente rebelle défile en flash-back : sa naissance indésirée, son père castrateur, son smartphone rempli de tubes frondeurs, ses copines, ses premières amours, son corps assoiffé de liberté, et ce code vestimentaire, fait d’un bout de tissu sur la tête, dont elle rêve de s’affranchir.

Bad-girl, Bad-ass ou Bad-jens ?

Son surnom, Badjens, a été choisi dès sa naissance par sa mère. L'héroïne y puisse l'énergie de sa propre émancipation, au sein d'une génération en pleine ébullition. L'auteure, lauréate du prix Albert-Londres et grand reporter au Figaro, qui couvre depuis vingt-cinq ans l’actualité du Proche et Moyen-Orient, livre ici un texte porté par une langue qui sonne comme une poésie en mouvement, rythmée par un souffle rapide, urgent. Comme un slam. Les adjectifs, le rythme des mots, les silences aussi, ponctuent la vie de toutes ces jeunes bien décidées à ne plus subir.
Comme l'a déclaré Delphine Minoui lors d'un entretien organisé par Cultura à Paris à l'occasion de la rentrée littéraire : « J'ai voulu me situer dans la tradition poétique iranienne, avec un rythme d'aujourd'hui. Comme on le ferait d'un slam ou d'une chanson.» Les mots de Dephine Minoui claquent et chantent au fil des pages. Cette non condescendance par rapport à ses héroïnes est la plus belle marque de respect et d'affection de l'auteure pour elles. 

Liberté, j'écris ton nom

Car les amies qui entourent Badjens célèbrent la vie et ses frivolités. Elles portent du rouge à lèvres en secret, aiment la mode, sont au courant de tout grâce à Internet, rêvent de liberté, d'amour et de complicité. Cette plongée dans l'énergie de vie de ces jeunes filles est comme un film en caméra embarquée au cœur de la jeunesse iranienne, qui résiste et veut joyeusement croire à son futur. Liberté, j'écris ton nom... Une autre Résistance fut aussi célébrée par la poésie et a vaincu. 

> « Badjens », de Delphine Minoui, Seuil, 160 p., 18 € >> Pour acheter le livre, cliquer sur ce lien

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