Loin de la polémique actuelle qui touche Sylvain Tesson, Littéraflure, la chroniqueuse souvent mordante au pseudonyme bien choisi, nous explique pourquoi elle n'a pas été envoûtée par le dernier livre de l'auteur : « Avec les fées » (Editions des Equateurs). Selon elle, pas de magie à bâbord le long de l'Atlantique, mais une longue évanescence.
On m’avait annoncé de grandes chevauchées lyriques, un romantisme à couper le souffle… Mais c’est plus Le Guide du Routard que Chateaubriand. Trop de chutes de ton. Pour qualifier ma déception, je reprends son bon mot de retour d’une Galice défigurée par le béton :
« J'étais parti chercher le roi Arthur et l’enchanteur Merlin, je me retrouvais chez Leroy-Merlin ».
Tesson fige tout sur son passage. Dans ses voyages, il collectionne l’immobilité. Il s’évertue à trouver dans la nature ce qu’elle a d’éternel et d’immémorial. Il jouit de souligner l’intemporalité des paysages, l’immanence des éléments. Une manière de se rapprocher des dieux ou plutôt, de s’éloigner des hommes et de les rendre insignifiants. À coups de métaphores, il s’épuise à narrer l’infinie beauté d’un promontoire (il n’est jamais assez rassasié de ce mot) ou d’un rivage.
Le génie de l’homme est célébré à regret, sauf quand il illustre une histoire lointaine qu’il affectionne (ex : l’Irlande). Tesson aime le passé et pour lui, le présent n’est qu’un passé en devenir.
Autre manière de tout figer, cette manie de résumer une idée par une phrase définitive et prétentieuse. Je vous en cite quelques-unes :
« La tristesse dans la beauté ne fait jamais de mal à l’âme »,
« La certitude d’un ordre de la beauté tranquillise les âmes instables »
et d’autres perles aux pages 68, 76, 113, 170…
Elles sont parfois hasardeuses :
« Le phoque, contrairement à l’Anglaise, n’essaye pas de perdre du poids avant l’été ».
Les fées ont bon dos ! Elles portent sur leurs frêles épaules les fantasmes et les errances d’un auteur qui peine à l’admettre : « le merveilleux émane du réel ». Et puis, las, il donne cette définition qui nous illumine : « Est féérique ce qu’on déclare l’être ». Allez, ça, c’est fée !
À vouloir percer le mystère, traquer le merveilleux, Tesson en détruit l’essence : l’évanescence. Sa quête est un contresens, prétexte à sa posture.
> Sylvain Tesson, Avec les fées, Editions des Equateurs, 224 pages, 21 euros
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Littéraflure est le pseudonyme de critique littéraire d'une auteure qui a déjà publié cinq romans et dont l'identité est inconnue. Prochainement elle fera paraître ses Confessions d'une chroniqueuse littéraire.
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