« Les cités rebelles » et « L’oiseau de feu », d’Ann Sei Lin aux éditions Lumen sont les deux premiers tomes de « Les monstres de papier », trilogie retentissante nous transportant dans un univers épique et visuellement saisissant, rappelant l'esthétique soignée des films du Studio Ghibli. Un voyage dans tous les sens du terme.
Début d'une série qui promet beaucoup, l’histoire d’Ann Sei Lin peut être classée en fantasy « silkpunk », terme qui désigne des univers essentiellement créés par des auteurs asiatiques (uchronies, univers imaginaires), et où certaines matières tiennent une place importante, notamment la soie (d'où le nom), le bambou, et ici le papier. Les romans de style asiatique ont le vent en poupe depuis l'année dernière, et ce n’est pas pour nous déplaire !
Ann Sei Lin est bibliothécaire et autrice de fantasy de profession, mais est aussi grande amatrice de livres et de tout ce qui touche à l’imagination. Bien qu'elle réside aujourd'hui à Londres, elle a vécu plusieurs années à Chiba, au Japon. Lorsqu'elle n'est pas en train d'écrire, elle se cultive, s'adonne aux jeux vidéo ou essaie pour la centième fois au moins de réussir un lapin en origami. Les Cités rebelles (Rebel Skies, 2022) a été son premier roman.
Dans le premier tome, Kurara n'a jamais connu d'autre vie que celle de servante au Midori, un immense hôtel flottant dans le ciel. Un jour, pourtant, le gigantesque vaisseau est attaqué et abattu par un shikigami, un de ces redoutables monstres de papier qui, de temps à autre, perdent la raison et sèment la destruction au sein de l'empire. Par chance, la jeune fille parvient à en réchapper, ce qui n'est pas le cas de son meilleur ami, grièvement blessé. Sa survie, elle ne la doit qu'à Himura. Pliomage comme elle – quoique plus bourru dans son genre –, il est capable de donner forme et vie à ses créations de papier et a choisi de mettre ses talents au service d'un équipage de chasseurs de shikigami. Un nouveau chapitre s'ouvre alors dans la vie de l'adolescente. Désormais passagère de l'Orihime, la voilà partie pour écumer le ciel, direction la cité céleste de Sola-Il. Son objectif ? Implorer l'aide de la princesse Tsukimi, seule capable de soigner son compagnon de toujours. Mais pour que cette dernière accepte de la recevoir, il va lui falloir devenir la meilleure pliomage de tout l'empire – rien que ça... Apprentissage de la magie, traques haletantes de shikigami et luttes fratricides pour le pouvoir sur fond de rébellion... Le ciel est un monde bien périlleux, où monstres de papier et orques-cumulus sont loin d'être les seuls dangers qui menacent ! Le premier roman d'Ann Sei Lin plante le décor d'une trilogie silkpunk qui s'annonce épique et qui ravira tous les fans du Studio Ghibli.
Dans le deuxième tome, Kurara a vécu bien des aventures depuis qu'elle a rejoint l'Orihime et son équipage de chasseurs de shikigami. Après avoir échappé de peu aux griffes de la princesse impériale et à la fureur d'un dragon de papier qui a ravagé la cité céleste de Sola-Il, la voilà désormais clouée au sol, privée de vaisseau. Pas de temps à perdre, elle et ses compagnons doivent gagner le Grand-Courant par leurs propres moyens... et ce avant Tsukimi ! Car la fille de l'empereur, déterminée à asservir tous les shikigami de Mikoshima, ne renoncera devant rien ni personne pour voir son terrible plan aboutir. Afin d'éviter à ses semblables un sort pire que la mort, Kurara doit à tout prix s'entretenir avec Suzaku, un véritable phénix de papier traqué par tous mais jamais encore vaincu. Lui seul pourrait détenir les réponses aux questions qu'elle se pose sur sa véritable nature. Parviendra-t-elle à le sauver ou causera-t-elle leur perte à tous ?
Dès les premières pages, nous sommes plongés dans cet univers qui devrait séduire les fans de Miyazaki, de steampunk, et de fantasy. Le lecteur se perd dans les aventures de Kurara, jeune héroïne, tout en découvrant un monde rempli de merveilles, de magie, et, il faut bien l'admettre, de cruauté. Les personnages incarnent des personnalités fortes, chacun d'eux a des objectifs clairs et les poursuit avec une détermination impressionnante, parfois au détriment des autres. Ils sont tous uniques, ce qui est de plus en plus rare de nos jours dans cette littérature. Leurs personnalités et leurs manières de s'exprimer sont distinctes, et on s'attache rapidement à eux, que ce soit Kurara, la jeune fille plongée dans son monde de rêves, Sayo au caractère bien trempé, Tomoe, la technicienne fougueuse, ou même Humura, avec sa froideur glaciale.
L'inclusion d'éléments japonais dans cet univers peut être notée, que ce soit le culte du lotus ou les petits détails comme les kotos, la soupe miso, le hakama, l'obi, et bien d'autres encore. Tout cela se marie harmonieusement avec la vision de l'auteure, qui y ajoute la pliomagie, une forme d'art qui permet de manipuler le papier à la guise de son utilisateur. L’intégration en a été subtilement réussie. L'auteure a également eu le génie de lier les termes inventés propres à son monde à des racines japonaises, comme le mot shikigami, dont la signification s'éclaire grâce à la décomposition en "shi" (évoquant la mort), "ki" (peut-être lié au feu), et "gami" (qui vient de "kami", signifiant papier).
Parmi ces thèmes, on retrouve notamment la question du racisme entre les terrestres et les célestes, ainsi que la fidélité en amitié et la relation de soumission entre les pliomages et leurs créations de papier. L'un des points forts du roman réside d'ailleurs dans le système de magie basé sur la manipulation du papier, permettant aux pliomages de créer des objets et des créatures impressionnants. En plus de cette magie, l'autrice instaure un univers à la technologie avancée, ; vaisseaux volants à moteur et à voile, villes flottantes ou terrestres, le récit se déroule entre ciel et terre. Ainsi, c’est une lecture divertissante et visuellement imaginative, qui ravira les jeunes amateurs de fantasy à la recherche d'un peu d'originalité et d'aventure. Tout en étant accessible aux plus jeunes, il offre également des thématiques intéressantes à explorer, faisant de cette saga jeunesse une série prometteuse pour l'avenir.
> « Les monstres de papier », Anne Sei Lin, premier tome « Les cités rebelles » 16 euros pour 431 pages, deuxième tome « L’oiseau de feu » 17 euros pour 445 pages
> Visionner la bande annonce qui présente le livre d'Ann Sei Lin :
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