Chronique de Littéraflure

« Monique s’évade » d'Édouard Louis : voyage au bout de l'ennui ?

Littéraflure a lu « Monique s’évade »  d'Édouard Louis et a été déçue. Elle en attendait une lumière et n'en a trouvé qu'une fugitive étincelle à la fin du livre. Auparavant, la froideur et l'ennui l'ont saisie. Cette évasion l'a clouée sur place.

J’avais lu son premier roman publié il y a dix ans, « En finir avec Eddy Bellegueule », une autofiction qui avait le mérite de la sincérité. Un vrai coup de poing. J’ai acheté « Monique s’évade » avec les mêmes attentes : me faire bouger.

Une première partie qui laisse de marbre

La première partie de ce roman (80% du livre) ne m’a procuré aucune émotion. Le calvaire de sa mère y est décrit de manière mécanique. On frise le documentaire, d’autant que l’auteur n’a qu’une idée en tête : montrer que dans toute société, la femme est systématiquement victime de sa précarité (« Combien de femmes changeraient de vie si elles obtenaient un chèque ? »), que seul l’argent peut la rendre libre (beau passage sur Virginia Woolf p.110). Ça m’a rappelé une statistique selon laquelle le plus grand taux de divorce est en Charente-Maritime, là où les salaires des femmes sont les plus élevés (sièges des mutuelles et assurances).

Le propos est d’Édouard Louis est louable, en tous cas plus authentique (p.84) que celui de Grégoire Delacourt (dans La liste de mes envies), dont nous avions parlé. L’un est crédible, l’autre est opportuniste.

Quand vient l'ennui 

Malheureusement, cette histoire de déménagement (l’évasion) est ennuyeuse, voire horripilante, car l’auteur se met en scène, écrit avec le miroir d’une vanité d’autant plus indécente qu’elle contraste avec la désarmante simplicité de sa protagoniste.

Mais, soudain une étincelle...

Une étincelle apparaît dans la (courte) deuxième partie, quand Monique quitte la France pour la première fois de sa vie et assiste à la pièce de théâtre dont elle est l’inspiratrice. Victimaire, voyeuriste et répétitif, ce petit roman ne doit son salut qu’à l’émouvant récit de son voyage et de son modeste triomphe.

Ce qu'en dit Edouard Louis

« Une nuit, j’ai reçu un appel de ma mère. Elle me disait au téléphone que l’homme avec qui elle vivait était ivre et qu’il l’insultait. Cela faisait plusieurs années que la même scène se reproduisait : cet homme buvait et une fois sous l’influence de l’alcool il l’attaquait avec des mots d’une violence extrême. Elle qui avait quitté mon père quelques années plus tôt pour échapper à l’enfermement domestique se retrouvait à nouveau piégée. Elle me l’avait caché pour ne pas « m’inquiéter » mais cette nuit-là était celle de trop.
Je lui ai conseillé de partir, sans attendre. Mais comment vivre, et où, sans argent, sans diplômes, sans permis de conduire, parce qu’on a passé sa vie à élever des enfants et à subir la brutalité masculine ?
Ce livre est le récit d’une évasion. » 

> Monique s'évade d'Edouard Louis, Seuil, 180 pages, 18 euros
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Littéraflure est le pseudonyme de critique littéraire d'une auteure qui a déjà publié cinq romans et dont l'identité est inconnue. Prochainement elle fera paraître ses Confessions d'une chroniqueuse littéraire.
Son credo : « Je porte aux nues et souvent j’érafle pour que vive la littérature ! »

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