Sélection

Nos coups de cœur de la rentrée littéraire 2023

Après vous avoir présenté les livres phares de la rentrée, ainsi que les premiers romans, nous avons sélectionné pour vous vingt-six livres coups de cœur, qui font partie des belles lectures de cette rentrée littéraire, riche en découvertes.

1. Western, Marie Pourchet, Stock, 304 pages, 20,90 euros

Quelle histoire ? « J’entends par western un endroit de l’existence où l’on va jouer sa vie sur une décision. » C’est à cette éternelle logique de l’Ouest que se rend Alexis Zagner, « la gueule du siècle », poussé par l’intuition d’un danger. Comédien renommé qui devait incarner Dom Juan, il abandonne brusquement le rôle mythique et quitte la ville à la façon des cow-boys – ceux-là qui craignent la loi et cherchent à fondre leur peur dans le désert. Qu’a-t-il fait pour redouter l’époque qui l’a pourtant consacré ? Et qu’espère-t-il découvrir à l’ouest du pays ? Pas cette femme, Aurore, qui l’arrête en pleine cavale et semble n’avoir rien de mieux à faire que retenir le fuyard et percer son secret. Tandis que dans le sillage d’Alexis se lève une tempête médiatique, un face à face sensuel s’engage entre ces deux exilés revenus de tout, et surtout de l’amour, qui les désarme et les effraie.

Pourquoi on aime ?  Dans ce roman galopant porté par une écriture qui confirme le talent de l'auteure de Feux, Maria Pourchet livre, avec un sens de l’humour à la mesure de son sens du tragique, une profonde réflexion sur notre époque, sa violence, sa vulnérabilité, ses rapports difficiles à la liberté et la place qu’elle peut encore laisser au langage amoureux.

2. Panorama, Lilia Hassaine, Gallimard, 240 pages, 20 euros

Quelle histoire ? « C’était il y a tout juste un an. Une famille a disparu, là où personne ne disparaissait jamais. On m'a chargée de l'enquête, et ce que j'ai découvert au fil des semaines a ébranlé toutes mes certitudes. Il ne s'agissait pas d'un simple fait-divers, mais d'un drame attendu, d'un mal qui irradiait tout un quartier, toute une ville, tout un pays, l'expression soudaine d'une violence qu'on croyait endormie. » Hélène, ex-commissaire de police, reprend du service pour retrouver un couple et leur petit garçon, Milo. Elle rencontre les dernières personnes à avoir été en contact avec eux. Depuis que la France a basculé dans l'ère de la Transparence, ces hommes et ces femmes vivent dans un monde harmonieux, libéré du mal, où chacun évolue sous le regard protecteur de ses voisins. Mais au cours de son enquête, Hélène va dévoiler une vérité aussi surprenante que terrifiante. À travers cette contre-utopie, c'est le monde d'aujourd'hui que l'auteur interroge. Ce roman haletant montre des êtres en proie à leurs pulsions et à leurs fêlures derrière leur apparente perfection.

Pourquoi on aime ? Dans ce nouveau roman, mêlant éléments tirés du polar et de la science-fiction, Lilia Hassaine nous donne à réfléchir sur les tensions entre sécurité et liberté. L’intrigue, située en 2049, nous porte à nous questionner sur l’avenir de notre société à travers le récit d’un monde fictif divisé par les différences sociales, économiques, politiques, familiales et religieuses. 

3. Le Jour et l’Heure, Carole Fives, JC Lattès, 144 pages, 17 euros

Quelle histoire ? « On s’est tous retrouvés à la gare de la Part-Dieu vers sept-huit heures. Maman avait son rendez-vous en début d’après-midi et elle n’avait qu’une peur, le rater. Le GPS annonçait cinq heures de route. On est partis avec la Peugeot à sept places. Papa et Maman devant, et nous, les quatre enfants, derrière, comme à la belle époque. Il ne manquait que les scoubidous et les cartes Panini. Papa a toujours eu une conduite assez brusque mais alors là, on aurait dit qu’il le faisait exprès. De la banquette arrière, je voyais Maman, à l’avant. Elle ne disait rien mais, à chaque fois que Papa freinait, ou accélérait, son visage se crispait. J’en avais mal pour elle. À un moment, il y a eu une énorme secousse, c’est sorti tout seul, je n’ai pas pu me retenir, mais c’est pas vrai ! Il va tous nous tuer ce con ! » Édith se sait gravement malade. Elle a convaincu son mari et leurs quatre enfants de l’accompagner à Bâle, en Suisse, où la mort volontaire assistée est autorisée. Elle a choisi le jour et l’heure. Le temps d’un dernier week-end, chacun va tenir son rôle, et tous vont faire l’expérience de ce lien inextricable qui soude les membres d’une famille. Dans un road trip tendre et déchirant, Carole Fives dresse avec délicatesse le tableau d’un clan confronté à l’indicible et donne la parole à ceux qui restent. L'accompagnement vers la mort vu de l'intérieur d'une famille.

Pourquoi on aime ? Dans ce roman poignant, Caroline Fives décrit le dernier voyage d’une famille confrontée à la décision d’un de ses membres. L’écriture simple de l’auteure donne un ton tendre et doux à ce sujet de société, représentant ainsi une ode à la vie plutôt qu’une confrontation à la mort.

4. Le Château des Rentiers, Agnès Desarthe, Editions de l’Olivier, 224 pages, 19,50 euros

Quelle histoire ? En levant les yeux vers le huitième étage d’une tour du XIIIe arrondissement de Paris, Agnès rejoint en pensée Boris et Tsila, ses grands-parents, et tous ceux qui vivaient autrefois dans le même immeuble. Rue du Château des Rentiers, ces Juifs originaires d’Europe centrale avaient inventé jadis une vie en communauté, un phalanstère. Le temps a passé, mais qu’importe puisque grâce à l’imagination, on peut avoir à la fois 17, 22, 53 et 90 ans : le passé et le présent se superposent, les années se télescopent, et l’utopie vécue par Boris et Tsila devient à son tour le projet d’Agnès. Vieillir?? Oui, mais en compagnie de ceux qu’on aime. Telle est la leçon de ce roman plein d’humour et de devinettes – à quoi ressemble le jardin d’Éden?? quelle est la recette exacte du gâteau aux noix?? qu’est-ce qu’une histoire racontée à des sourds par des muets?? –, qui nous entraîne dans un voyage vertigineux à travers les générations.

Pourquoi on aime ? Agnès Desarthe nous livre un récit empli de nostalgie à travers son écriture légère et douce. Situant son intrigue dans une communauté juive d’Europe centrale, l’auteure navigue à travers les thèmes de la vieillesse, des souvenirs et du temps qui passe, ajoutant une note d’humour à cette histoire attendrissante. C'est aussi un livre sur le mystère des transmissions et de la mémoire.

5. A ma Sœur et Unique, Guy Boley, Grasset, 480 pages, 24 euros 

Quelle histoire ? Elisabeth Förster fut l’unique sœur de Friedrich Nietzsche, écrivain, philologue, philosophe, être perpétuellement souffrant, vivant dans une solitude totale. De deux ans sa cadette, elle fut sa première lectrice, compagne, admiratrice. Tôt, elle se promet de tout faire pour que brille l'œuvre de son frère à laquelle elle n'entend rien. En effet, elle fera tout. Le soignera, l’assistera, le portera. Et ira jusqu’à vendre ses écrits à Adolf Hitler, homme que Friedrich eut haï s'il l'avait connu. Dans ce roman écrit d’un souffle, Guy Boley retrace chaque épisode de leurs vies : leur enfance complice à Naumburg, leur vie conjugale à Bâle où Fritz est professeur et où Lisbeth l’assiste, les week-ends chez les Wagner puis la rupture ; l’affaire Lou-Salomé, le mariage d’Elisabeth avec Bernhard Förster, antisémite déclaré avec lequel elle part en 1886 au Paraguay, fonder la colonie Nueva Germania. Pour revenir trois ans après, au chevet de son frère tombé dans la folie, inconscient, alité, qu’elle dit soigner mais qu'elle va trahir et spolier. Amour, solitude, vengeance, trahison ; ambition dévorante, génie, haine, héritage, cruauté. Tout y est. Même les dieux qui Là-Haut jouent aux dés. L’équivalent en prose d’un drame shakespearien.

Pourquoi on aime ? L’écrivain retrace la vie de la sœur de Friedrich Nietzsche, ce qui nous permet de découvrir les étapes dans la carrière du philosophe et ce qui a façonné sa philosophie. Le style d’écriture surprenant de Guy Boley nous entraîne dans une biographie passionnante, qui est autant en creux celle du philosophe que celle d'une femme au regard acéré. Un livre empli de fièvre.

6. Les Alchimies, Sarah Chiche, Seuil, 240 pages, 19,50 euros

Quelle histoire ? En 2022, en pleine crise de l’hôpital, Camille Cambon, médecin légiste vaillante et brillante, reçoit un mail énigmatique. Il y est question du peintre Goya et de son crâne volé après son inhumation à Bordeaux en 1828, et dont on a depuis perdu la trace. D’abord portraitiste officiel de la cour, aimé des puissants, le maître espagnol devint, à la suite d’une maladie, l’observateur implacable et visionnaire des ténèbres de l’âme humaine. Les parents de Camille et son parrain, neurologue, se sont passionnés pour l’œuvre de Goya, avant de devenir des scientifiques de renommée internationale. Camille part rencontrer à Bordeaux sa mystérieuse correspondante, une ancienne directrice de théâtre qui a bien connu ces trois-là, alors étudiants en médecine, dans les années 1960, et semble tout savoir de leur obsession partagée pour Goya. Une quête effrénée, entre passion scientifique et déraison, où chacun a pris toutes les libertés et tous les risques, au point de s’y brûler les ailes. Du siècle des Lumières à la création d’une société secrète de médecins, Les Alchimies est une fresque captivante sur l’origine du génie, les amitiés qui ressemblent à l’amour, les pouvoirs obscurs et merveilleux de l’art.

Pourquoi on aime ? Pour son cinquième roman, Sarah Chiche nous entraîne à travers une histoire dramatique et complexe : l’écrivaine mêle l’art de Goya avec des questions médicales dans une intrigue sombre et mystérieuse. Une quête où il est question d'art, de passion et de médecine. Une réussite. 

7. Une Histoire Romaine, Louis-Philippe Dalembert et Sabine Wespieser, 220 pages, 22 euros

Quelle histoire ? Louis-Philippe Dalembert nous entraîne à Rome. Tiraillée entre deux mondes que sépare le Tibre, Laura a bien du mal à s’affranchir des puissantes figures féminines qui ont marqué sa prime jeunesse : rebelle de pacotille dans le bouillonnement politique et culturel des années 1970, elle est insensiblement ramenée à sa double lignée, aristocratique et juive. Sur la rive droite, dans le quartier huppé de Prati, la contessa veille à tenir son rang et à sauver les apparences, malgré les revers de fortune chez les De Pretis : avare d’effusions, elle fascine sa petite-fille par ses récits de la tradition familiale. Elle n’a pourtant pas hésité à se séparer de l’impressionnante bibliothèque accumulée au fil des siècles, pour continuer de recevoir tout ce que Rome compte d’hôtes d’importance. Et quand sa fille Elena, la future mère de Laura, à qui elle désespérait de trouver un bon parti, lui présente enfin Giuseppe, peu lui importe qu’il soit juif, l’essentiel étant qu’il ne soit pas dans la gêne et que l’union soit bénie par l’Église. Son mariage conduit Elena à s’éloigner de son envahissante comtesse de mère et à s’installer rive gauche, dans l’immeuble de la Via Giulia où règne Zia Rachele : la plantureuse vieille dame, dont les poches débordent de dragées qu’elle distribue avec générosité, initie Elena, et plus tard Laura, à l’histoire de sa famille non pratiquante qui s’enorgueillit de lointaines racines romaines. Les lois raciales et la guerre l’ont durablement marquée, elle qui, avec sa fratrie, a été miraculeusement sauvée de la déportation grâce à un réseau de résistants.

Pourquoi on aime ? Maître dans l’art de tresser ces fortes destinées, Louis-Philippe Dalembert emporte le lecteur par l’intelligence, la finesse et l’humour avec lesquels il évoque ce double héritage. Le personnage principal de son allègre roman n’en reste pas moins la ville de Rome, dont l’écrivain dessine un éblouissant portrait – nourri par sa connaissance intime de l’histoire, des charmes et des secrets de la Ville éternelle. C'est un livre empli de curiosités et de sinuosités, comme les chemins qui mènent à la ville mythique.

8. Juliette, Abd Al Malik, Robert Laffont, 127 pages, 18 euros

Quelle histoire ? « Son chef-d’œuvre sera essentiellement mystique puisque Juliette Gréco perçoit toute chose sous l'angle de l'amour et de la liberté. Et, bien loin de toutes les gloses psychanalytiques et de simples auto-projections affectives, son éclat fascinant de femme - qui est plus qu'une femme (et qu'un homme donc) -, frange et longs cheveux noirs sur les épaules, toute de noir vêtue, n'est qu'une des infinies manifestations du divin ou, autrement dit, l'un des fourmillants réceptacles de l'absolu. » Dans cet hommage flamboyant rendu à la muse de Saint-Germain-des-Prés, l'esprit et la spiritualité croisent le fer au fil d'une méditation poétique et littéraire.

Pourquoi on aime ? Abd Al Malik utilise son expérience dans le monde de la chanson et du rap pour nous livrer un roman poétique et envoûtant : un magnifique hommage à la chanteuse Juliette Gréco. Un hommage fait de fascination et d'esprit, tel que l'aurait apprécié la grande Juliette.

 

9. Le Jour des Caméléons, Ananda Devi, Grasset, 272 pages, 20,90 pages

Quelle histoire ? Une île : Maurice, la narratrice du roman. Quatre personnages : un oncle las de la vie, sa nièce, unique lumière pour lui, une femme qui vient de quitter son mari, un chef de bande assoiffé de vengeance. Une journée où tout va exploser : la cité, les haines, peut-être l’île. Enfin, d’étranges animaux qui attendent patiemment que les humains finissent de détruire ce qui leur reste – leur humanité, leur foyer – pour vivre seuls, en paix : les caméléons. Unité de lieu, de temps, d’action. Le compte à rebours est lancé, le drame peut commencer. Mais reprenons. Le roman s’ouvre, la ville est à feu et à sang. Zigzig, le caïd meneur, tient dans ses bras une fillette ensanglantée. Les plus pauvres viennent de s’attaquer aux plus riches dans le centre névralgique de l’île : le shopping center, désormais en ruines. Au loin, un volcan gronde. Comment en sommes-nous arrivés là ? Quelques heures plus tôt, Zigzig partait avec les siens attaquer ses rivaux tandis que Sara regardait danser une femme libérée sur une plage abandonnée. L’île rembobine et nous raconte. On suivra tour à tour chacun des personnages, jusqu’à ce que leur destin se mêle. On remontera aussi le cours de l’Histoire pour comprendre comment les peuples, les servitudes et les logiques du monde moderne ont saccagé cette terre de merveilles et divisé ses habitants. Avec sa langue tour à tour tendre et ironique, tranchante et poétique, Ananda Devi nous emporte dans un roman impossible à lâcher pour nous plonger dans le chaos des hommes. Le destin est en marche. Mais dans cette histoire-là, ceux qu’on croit les plus féroces seront peut-être les seuls héros.

Pourquoi on aime ? Grâce à son style d’écriture charmeur, Ananda Devi nous plonge dans un conte percutant et hors norme : l’écrivaine, situant son roman entre polar et fable, s’appuie sur les réalités de notre société et les violences qu’elle peut engendrée pour nous questionner sur des problèmes philosophiques percutants.

10. Malgré toute ma Rage de Jérémy Fel, Rivages, 512 pages, 23 euros

Quelle histoire ? C’est enfin la liberté et l’insouciance pour Juliette, Chloé, Manon et Thaïs : les premières vacances entre amies, à l’autre bout du monde – l’Afrique du Sud. Mais celles-ci vont être de courte durée : l’une d’entre elles est enlevée au bout de quelques jours et sauvagement assassinée. Alors que l’enquête commence au Cap, les proches de la victime, évoluant dans le milieu feutré et trompeur de l’édition parisienne, tentent douloureusement de faire leur deuil. Véritable déflagration familiale, la mort de la jeune fille encourage les protagonistes à se dévoiler peu à peu, et souvent pour le pire. 

Pourquoi on aime ? Tandis que ses personnages se débattent avec leurs pulsions, de lourds secrets en révélations inattendues, Jérémy Fel pousse ses lecteurs dans leurs retranchements et les invite à s’interroger sur l’origine du mal et ses effets sur l’âme humaine. Un livre choc qui touche autant qu'il fait réfléchir.

 

11. Tout le Monde n'a pas la Chance d'aimer la Carpe Farcie, Elise Goldberg, Verdier, 160 pages, 18 euros

Quelle histoire ? Un grand-père meurt. Une petite-fille récupère son frigo et l’installe dans sa cuisine. La porte à peine ouverte, nous franchissons la frontière de la Pologne juive, et c’est un monde qui se découvre, un monde de foie de volaille, d’« ognonnes », de gefilte fish, la carpe farcie en yiddish. La cuisine ashkénaze n’est peut-être pas la plus sexy, et le yiddish n’a pas toujours été une langue bien normée. Mais ce sont autant de saveurs et de couleurs, de mots et de sonorités, toute une culture et une histoire qu’Élise Goldberg nous restitue ici, dans ce premier livre aussi drôle qu’émouvant. L’histoire familiale, dit la narratrice, est « un récit sans chair, dont ne subsisterait que la colonne, quelques arêtes » – une carpe, en quelque sorte, qu’il faut réussir à farcir si on veut l’aimer.

Pourquoi on aime ? Dans ce roman percutant, Elise Goldberg s’attaque à un monde qui n’existe plus, nous plongeant dans un voyage à travers la langue du yiddish. L’écrivaine lutte ainsi contre la disparition de ce monde, nous livrant un magnifique récit, rempli de senteurs, de saveurs et d'amour.

12. Réel Madrid, Mark Greene, Plein Jour, 138 pages, 16 euros

Quelle histoire ? Le récit d’une jeunesse madrilène des années 70 dans la lumière crépusculaire et étrange de l’Espagne assoupie de Franco jusqu’à la Movida. Je suis né à Madrid, dans les années soixante. Franco était encore au pouvoir et, de temps en temps, son cortège passait devant ma fenêtre. Quelquefois, ma mère et moi nous descendions pour voir de plus près. Je n’oublierai jamais cette attente, le défilé des limousines sur l’avenue. Paradoxalement, nous habitions un quartier d’étrangers et d’artistes où régnait une atmosphère authentiquement cosmopolite, une réelle décontraction. Un quartier qu’on appelait plaisamment Costa Fleming parce qu’on s’y sentait, disait-on, tous les jours en vacances. La vie, lorsqu’elle n’est pas corsetée par l’idéologie, nous réserve parfois des surprises. Je ne crois pas à la liberté absolue, qui ressemble trop à un rêve de toute-puissance, mais j’aime les parenthèses, les clairières du temps, quand les certitudes desserrent leur étreinte et laissent aux individus le loisir de respirer et d’inventer. J’évoque ici une période particulière de l’histoire de l’Espagne, les deux décennies comprises entre 1965 et 1985, qui sont aussi les années de mon enfance et de ma jeunesse. La dernière séquence du franquisme, la transition démocratique, la tentative de coup d’État, la Movida... En ce temps-là, les pays occidentaux semblaient encore très différents les uns des autres, et l’Espagne était l’un des plus singuliers. Depuis, une certaine uniformisation est à l’œuvre. Doit-on s’en réjouir, le regretter ? Il n’est pas interdit, en tout cas, de se souvenir.

Pourquoi on aime ? Ce roman nous fait voyager dans l’Espagne franquiste des années 1970 : l’auteur s’inspire de ses expériences personnelles et de son enfance en Espagne pour nous livrer un récit percutant et passionnant. Il porte un regard sur une ville qui se révèle miroitante, fascinante. 

13. La Reine aux Yeux de Lune, Wilfried N’Sondé, Robert Laffont, 240 pages, 20 euros

Quelle histoire ? Kongo, 1685. Le royaume, sous occupation portugaise, n'est qu'une terre de désolation. Une fillette aux yeux de lune voit le jour dans les eaux de la rivière Mpozo. Sa soeur jumelle ne survit pas. L'enfant miraculée est nommée Kimpa Vita, qui signifie « la jumelle née de la guerre ». En grandissant, Kimpa traverse des épreuves, et bientôt ses discours de résistance magnétisent. Pour ses fidèles, elle incarne l'espoir d'un avenir meilleur, telle une sainte africaine liée aux esprits. Ses détracteurs, eux, la réduisent au rang de sorcière. Kimpa Vita, aussi adulée que haïe, parviendra-t-elle à ranimer un peuple déchiré par les conflits ? 

Pourquoi on aime ? Inspiré d'un personnage réel, La Reine aux Yeux de Lune conte avec émotion le destin d'une femme sacrifiée. L’écrivain nous livre une histoire originale et rythmée, nous entraînant dans le récit passionnant de Kimpa Vita. Un destin et une voix qui porte encore sa force aujoird'hui.

 

14. Sauvage, Julia Kerninon, L’Iconoclaste, 299 pages, 20,90 euros

Quelle histoire ? A Rome, Ottavia Selvaggio a décidé à quinze ans d'être maîtresse de son destin. Ni ses histoires d'amour, ni le mariage, ni même la maternité ne la font dévier de sa route. Pendant que son mari s'occupe de leurs enfants, elle invente dans son restaurant une cuisine qui ne doit rien à personne. En robe noire et sans frémir, Ottavia avance droit, jusqu'au jour où un homme surgit du passé avec un aveu qui la pousse à douter de ses décisions. Comment être certaine d'avoir choisi sa vie ? Le désir a-t-il une fin ?

Pourquoi on aime ? Julia Kerninon nous entraîne dans une histoire passionnante, mêlant cuisine italienne et amour. Le style d’écriture rythmé de l’écrivaine rend la lecture haletante et gourmande. Un texte sur les miroitements de la vie et du désir.

 

 

15. Au-Dedans, Yannick Grannec, Anne Carrière, 338 pages, 21 euros

Quelle histoire ? Le surnom de « reine des glaces » colle à la peau de Christa Cristofersson, une ingénieure renommée de la Silicon Valley. Au-dedans, pourtant, elle vibre intensément. Mais l’émotivité est un luxe qu’elle ne peut se permettre. Elle dirige une entreprise de biotechnologies, maudit le jour où elle a rencontré son ex-mari, tente d’élever du mieux possible ses jumeaux, se bagarre avec son vieux bougon de père qui tempête contre notre monde de technologies déshumanisantes et, de temps en temps, elle rend visite à sa mère qui végète dans un hôpital psychiatrique. Au hasard d’un test génétique, Christa découvre que toute sa mythologie familiale repose sur une erreur. Sa mère ne l’a pas abandonnée à la naissance pour une quête de plaisirs superficiels, mais a en réalité sombré à cause d’une maladie jamais diagnostiquée : une dégénérescence neurologique qui la prive de l’accès à ses émotions. Christa est porteuse du même gène altéré et, potentiellement, de la même maladie incurable. Seule la présence à ses côtés d’un compagnon qui la connaîtrait intimement au point de pouvoir stimuler ses souvenirs et ses circuits émotionnels pourrait retarder l’échéance. Christa ne croit pas en l’existence de l’âme sœur, mais elle croit en la science, alors, cette âme-sœur, elle va la créer. Avec Au-Dedans, Yannick Grannec affronte une des plus grandes préoccupations contemporaines. S’il ne convient pas de la nommer ici, on peut suggérer que l’ombre de Mary Shelley plane sur ce roman visionnaire.

Pourquoi on aime ? Dans ce roman palpitant, Yannick Grannec nous entraîne au cœur de la Silicon Valley dans le monde de l’intelligence artificielle et du transhumanisme. L’écrivaine révèle les réalités des biotechnologies et nous questionne sur le futur de notre société.

16. Triste Tigre, Neige Sinno, POL, 288 pages, 20 euros

Quelle histoire ? J’ai voulu y croire, j’ai voulu rêver que le royaume de la littérature m’accueillerait comme n’importe lequel des orphelins qui y trouvent refuge, mais même à travers l’art, on ne peut pas sortir vainqueur de l’abjection. La littérature ne m’a pas sauvée. Je ne suis pas sauvée.

Pourquoi on aime ? A travers ce livre bouleversant, Neige Sinno raconte l’horreur qu’elle subit entre ses 7 et 14 ans, évoquant les thèmes de l’inceste et du viol. Par son écriture poignante, l’écrivaine entreprend un questionnement philosophique sur le mal et l’avenir des victimes.  Son livre a reçu le prix littéraire du Monde.

 

 

 

 

 

17. Etraves, Sylvain Coher, Actes Sud, 256 pages, 21,90 euros

Quelle histoire ? « Splach, le moussaillon vient tout juste de s'endormir quand le panneau coulisse et déverse son déluge sur le plancher du carré. Faut voir comme il sursaute, Petit Roux, il se dresse sur les coudes avec la tignasse hérissée et la gueule en sabord. C'est le moment, vocifère Furieuse en dévalant les quatre planches de la descente. » Un soir, à la proue du Ghost, un jeune marin s'oppose au reste de l'équipage. Sa mère, Câline, vient de mourir. Et, dans ce monde recouvert par les eaux montantes, le voilà qui lui murmure le serment de trouver un îlot où l'enterrer dignement. Même si pour cela il lui faut braver les lois et trahir les siens, même s'il doit s'enfuir, disparaître, désormais seul sur l'étendue tumultueuse. Il se jette alors d'une embarcation à l'autre en quête d'une terre promise, déjouant la foudre des éléments et la fureur des hommes, défendant le corps maternel au péril de sa vie, jusqu'au bout de la Mer-océane, jusqu'au jardin interdit. 

Pourquoi on aime ? Avec Étraves, Sylvain Coher réinvente le récit maritime dans une langue éclatante, aussi précise que ludique, tout droit sortie des flots. Il nous offre une odyssée atemporelle où résonnent furieusement certains enjeux de notre époque, mais qui nous ramène, surtout, au plaisir incomparable de la fiction, de toutes ces histoires en nous, ferments de notre imagination. Sylvain Coher est décidément l'écrivain de la mer et des océans.

18. A Dieu Vat, Jean-Michel Guenassia, Albin Michel, 477 pages, 22,90 euros

Quelle histoire ? «On ne choisit rien, on ne fait que mettre ses pas dans le chemin tracé, on accomplit toujours ce que l’on est.» C’est dans l’euphorie d’un monde à reconstruire, en 1924, qu’Irène rencontre Georges. Elle est serveuse, il est menuisier aux studios de cinéma, et ressemble à s’y méprendre à Rudolph Valentino, ce qui en chavire plus d’une. Le temps d’une valse sur les bords de Marne, ils tombent amoureux. Leur fille aînée, Arlène, fera partie pendant son enfance du carré magique : à ses côtés, il y aura Daniel, qui se destine à Saint-Cyr, et Thomas et Marie, les jumeaux de bonne famille. Ils sont inséparables. Mais Arlène n’est pas comme eux. Malgré son humble extraction, elle va s’évertuer à être l’une des premières femmes ingénieurs atomiques en France. Ce qui n’est pas sans embûches. Ce qui n’est pas sans sacrifices. 

Pourquoi on aime ? Chassé-croisé d’amours éperdues, de destinées funestes et de rendez-vous manqués sur fond de bouleversements sociaux et politiques, À Dieu vat est aussi l’épopée d’un siècle : celui d’une jeunesse fracassée par trois guerres successives, des filles qui voulurent échapper à leur condition, et des gens modestes qui eurent de l’ambition. Avec la langue toujours espiègle et entraîne de Guenassia.

19. Une Façon d’Aimer, Dominique Barbéris, Gallimard, 208 pages, 19,50 euros

Quelle histoire ? "Il n'était pas très grand ; des cheveux bruns, peignés en arrière et crantés, le front haut, une chemisette avec des pattes sur l'épaule. Il sourit en fumant. Puis tendit la main à Madeleine : Vous dansez ? Elle s'excusa : Non, je danse très peu, je ne danse pas bien. Mais il insista et il la tira vers la piste." Quand Madeleine, beauté discrète et mélancolique des années cinquante, quitte sa Bretagne natale pour suivre son mari au Cameroun, elle se trouve plongée dans un monde étranger, violent et magnifique. À Douala, lors d'un bal à la Délégation, elle s'éprend d'Yves Prigent, mi-administrateur, mi-aventurier. Mais la décolonisation est en marche et annonce la fin de partie... Tendu entre la province d'après-guerre et une Afrique rêvée, Une Façon d'Aimer évoque la force de nos désirs secrets et la grâce de certaines rencontres. Par petites touches d'une infinie délicatesse, c'est toute l'épaisseur d'une vie de femme qui se dévoile.

Pourquoi on aime ? Dans ce récit, Dominique Barbéris nous entraîne dans l’Afrique des années 1950 et met en scène la rencontre entre deux cultures, déconstruisant les préjugés et les attentes pour montrer les merveilles d’un autre monde. Une belle lecture pour continuer à voyager malgré la rentrée. Ce livre a reçu le Prix des libraires de Nancy-« Le Point » 2023.

20. Phrase d’Armes, Paul Greveillac, Gallimard, 192 pages, 19 euros

Quelle histoire ? Phrase d'armes : désigne en escrime l'enchaînement des actions réalisées lors d'un assaut. Fleurettiste de talent, avocat en pleine ascension, René Bondoux naît en 1905 sous une bonne étoile. Il devient champion olympique à Los Angeles. Il tombe amoureux. Mais traverser le turbulent vingtième siècle n'est pas une mince affaire : guerre, prison, évasions et combats aux côtés du général de Lattre... le destin de René Bondoux va épouser celui de la France.

Pourquoi on aime ? Dans ce roman, Paul Greveillac nous raconte la vie de René Bondoux, révélant la destinée incroyable de cet avocat au service de la France. Le style d’écriture rythmé et percutant de l’auteur rend la lecture agréable et rapide. Une habile variation sur l'escrime, la vie, et l'Histoire.

 

 

 

21. Ma Mère en Toutes Choses, Ludivine Ribeiro, Arléa, 244 pages, 20 euros

Quelle histoire ? Pour tenter de prolonger la présence de sa mère disparue, Ludivine Ribeiro fait l'inventaire des objets donnés ou retrouvés, des images, tous source de souvenirs enfouis, de secrets, de questions sans réponse. Je savais qu'elle pouvait tout me raconter, encore et encore, n'importe quand, elle était comme un livre à portée de main, à feuilleter à volonté, et elle avait promis de m'écrire l'histoire de sa famille, je vais le faire, disait-elle, mais le remettait chaque jour au lendemain, pensant comme moi qu'il y aurait encore des milliers de lendemains. Quand on perd sa mère, qu'est-ce qu'il reste ?
89 cartes postales, quelques recettes, un agenda, des instants fugitifs, des souliers dorés... Pour tenter de prolonger la présence de sa mère disparue. Ludivine Ribeiro fait l'inventaire des objets donnés ou retrouvés, des images, tous source de souvenirs enfouis, de secrets, de questions sans réponse. Ce qui aurait pu n'être qu'une liste, devient alors une enquête, presque le roman d'une femme. Et des profondeurs de l'histoire familiale remontent et s'entrelacent les récits, les mystères, les ombres et les enchantements d'une vie...

Pourquoi on aime ? Dans ce roman, Ludivine Ribeiro porte hommage à sa mère en écrivant un récit touchant et magnifique sur le temps qui passe, la nostalgie du passé et le mystère du futur. Poétique, inspiré et tellement émouvant.

22. Gare Saint-Lazare, Dominique Fabre, Fayard, 144 pages, 17 euros

Quelle histoire ? « J’avais une tâche pour la vie, qui en un sens résumait toutes les autres, me faire aimer de toi.» Derrière cette phrase qui pourrait passer pour romantique se cache en réalité le drame de toute une vie, car cette phrase, c’est celle d’un fils qui s’adresse à sa mère. Avec des décennies de recul, un homme revient sur les traces de son enfance et de son adolescence, dans la salle des pas perdus de la gare Saint-Lazare, les rues populeuses alentour, les cafés où les banlieusards boivent debout au comptoir avant d’attraper leur train. Habitant de la première couronne, c’était sa porte d’entrée dans Paris. A moins que la gare n’ait en somme représenté à ses yeux la ville tout entière? C’est de là qu’il partait pour l’internat. Ou vers des familles d’accueil. Là qu’il errait avec un ami pour éviter de rentrer chez cette mère qui n’était pas toujours contente de le voir. Là qu’il est tombé amoureux d’une vendeuse à la sauvette qui aimait se moquer gentiment de lui. Autour de lui, mille vies que son regard d’enfant meurtri lui fait voir avec une acuité particulière. Comme si la contemplation du monde en condensé que sont toutes les gares lui avait toujours tenu lieu de refuge, et offert l’espoir d’une réconciliation.

Pourquoi on aime ? Dominique Fabre nous livre un beau récit sur la gare Saint-Lazare et ceux qui l’empruntent. Le style d’écriture de l’auteur, directe et fluide, rend la lecture addictive. C'est beau une gare, le jour et la nuit...

23. Tu la Retrouveras, Jean Hatzfeld, Gallimard, 208 pages, 19,50 pages

Quelle histoire ? Budapest, hiver 1944-1945. Deux fillettes, Sheindel et Izeta, l'une juive, l'autre tzigane, ont trouvé refuge dans le zoo en ruine où errent des animaux affamés. Débrouillardes et vives, toujours en alerte, elles se donnent pour mission d'organiser la fuite des girafes, zèbres et autres résidents du zoo, hors de la ville tenue par les nazis et encerclée par l'Armée rouge. Longtemps après la fin de la guerre, Sheindel revient à Budapest, et entame une longue quête à la recherche de son amie. En 1995, à Sarajevo, elle poursuit toujours l'ombre d'Izeta... Malgré les décors d'apocalypse, le nouveau roman de Jean Hatzfeld est à la fois émouvant et plein de vie. L'amitié des deux fillettes, cimentée par leurs relations avec des animaux de toutes sortes, donne au lecteur le sentiment de pénétrer un mystère joyeux.

Pourquoi on aime ? Dans ce roman atypique, Jean Hatzfeld raconte l’amitié se tissant entre deux petites filles au cœur d’une guerre effrayante. Ce magnifique roman est un bel hommage à l’amitié, qui  survivra malgré les violences de la guerre. 

24. Frères, Alexandre Jardin, Albin Michel, 176 pages, 19,90 euros

Quelle histoire ? « Ce livre est mon secret, l'obscur le plus obscur de ma vie. » Le 11 octobre 1993, Emmanuel Jardin met fin à ses jours. Trente ans plus tard, Alexandre, son frère, se confronte à son fantôme et à sa culpabilité de survivant. Emmanuel, « le plus inclassable et dérangeant des Jardin », étourdissant de charme comme capable du pire, a laissé derrière lui un sentiment d'amertume et de honte. Un secret dont son frère cadet est le seul détenteur.

Pourquoi on aime ? Dans ce récit à vif, Alexandre Jardin évoque pour la première fois ce deuil qui ravive le passé et déchire le présent. Avec pudeur, il revisite la légende d'une famille où, entre parents et enfants, les rôles sont inversés, interroge la dualité d'un garçon qui finira par céder à la mort, et élève à ce frère une sépulture de papier. Alexandre Jardin écrit avec le coeur. Il épouse une gravité qui sied à son sujet. Et cela lui réussit.

 

25. Marchands de Sable, Agnès Mathieu-Daudé, Flammarion, 304 pages, 21 euros

Quelle histoire ? C'est sans entrain que Suzanne, avec mari et enfants, pose ses valises pour quelques semaines de vacances dans la maison de sa belle-famille, en Sardaigne. En tombant amoureuse de l'héritier Signorelli, Suzanne a voulu laisser derrière elle une enfance ordinaire passée dans le sud de la France. Mais la plage privatisée de la côte sarde ne lui fait désormais guère plus envie que celle de Palavas-les-Flots où elle s'est tant ennuyée. Et le vague sentiment de dégoût que lui inspirent ces derniers temps les Signorelli prend une ampleur nouvelle quand, d'un secret à l'autre révélé, elle mesure combien ils contribuent à faire tourner ce monde à l'envers - tout en dépliant joyeusement leur serviette sur cette plage plus inégalitaire que jamais et menacée par la catastrophe écologique. Ne serait-ce pas eux, plutôt que les dizaines de vendeurs ambulants, les véritables marchands de cette plage ? 

Pourquoi on aime ? En mettant en scène une famille d'industriels italiens dont l'histoire embrasse si bien le XXᵉ siècle qu'elle finit par se confondre avec celle du capitalisme, Agnès Mathieu-Daudé livre un roman aussi précis que féroce sur la façon dont les intérêts personnels, non seulement ne participent plus à l'intérêt général, mais finissent par se retourner contre ceux-là mêmes qui croient les suivre... Un récit familial aux accents sociétaux et politiques.

26. Fille de Tunis, Olivia Elkaïm, Stock, 342 pages, 21,50 euros

Quelle histoire ? « D’elle, il me reste un foulard bleu, une bouteille vide de son parfum et ce cliché sépia, conservé dans un cadre rouge : la vingtaine resplendissante, chignon laqué, bustier soulignant le galbe de sa poitrine, Arlette trône sur la cheminée de mon salon. Mais je ne sais presque rien d’elle, quelques dates, mes souvenirs d’enfance. Je fouille ma mémoire, gratte le passé. Comment la saisir, elle qui ne s’est jamais laissé attraper par personne ? »

Pourquoi on aime ? Entre Tunis et Marseille, Olivia Elkaim nous entraîne dans le sillage de sa grand-mère maternelle, une femme libre et magnétique au destin percuté par la guerre, la décolonisation et l’exil, dont elle livre un portrait incandescent. Un beau portrait de femme. L'émotion d'un hommage.

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