«Scènes et poèmes bibliques-Le souffle de Chagall» de Fabienne Chevallier : Chagall, Dieu et moi

Avec Récits, poèmes et prières de guérison, l’historienne d’art Fabienne Chevallier signait une mise à nu pudique autour de la thérapie transgénérationnelle comme remède aux blessures d’enfance. Scènes et poèmes bibliques - Le Souffle de Chagall, son troisième ouvrage, mêle l’expérience de la grâce spirituelle aux images de Marc Chagall illustrant des scènes de la Torah. Un texte lumineux qui donne des ailes au lecteur.

Après un burn-out et une succession d’épreuves personnelles, Fabienne Chevallier a connu une vision, à l’image des grands mystiques. « C'est un moment inoubliable. Je bascule dans un destin beaucoup plus grand que moi (…) Je sens mon cœur s'ouvrir », dit Abraham dans le poème « Abraham et les trois Anges ». Cette expérience de transformation profonde, de l’ordre de la grâce, a marqué pour cette historienne d’art, spécialiste de l’histoire de l’architecture, le point de départ d’une rédemption.

Une entrée en écriture sous le signe de l’ange

Une expérience du sublime – lointain écho à La lutte avec l’ange de Chagall–, qui a aussi ouvert à l’auteure la voie de l’écriture. Sa démarche littéraire s’apparente, elle aussi, à la vision hassidique qui « consiste à penser que Dieu est présent dans chaque aspect, dans tout interstice de la vie (…) [la vie] ! Elle est anoblie et inspirée par la présence de Dieu qui l'habite. Le Divin est en tout. Le hassidisme s'écarte de la tradition (…) intellectualiste du judaïsme, et se rend accessible au peuple. Il affirme que la joie est le sens suprême de l'existence, le sens espéré par Dieu pour ses créatures. »

La poésie vécue comme forme d’introspection

La vision spirituelle est palpable à chaque ligne, à chaque image. Elle porte le texte comme elle porte le lecteur. Laisser advenir l’amour, la douceur, la joie et la paix sont une manière de laisser Dieu s’exprimer au plus profond de soi. Scènes et poèmes bibliques - Le Souffle de Chagall est un texte qui se médite et qui ouvre des portes à l’intérieur de soi. Il donne comme des ailes au lecteur.

L’art, la littérature viennent sublimer la souffrance et la mélancolie. On l’oublie parfois trop facilement aujourd’hui. La poésie est vécue ici comme forme d’introspection. A travers l’écriture, Fabienne Chevallier exprime la force de la foi, qui passe par l’économie de mots. « Un Ange de Dieu est apparu dans le ciel. Il était bleu comme mon premier songe. » L’élan mystique ne peut se traduire qu’en langage simple. Humble. Car Dieu n’aime pas les orgueilleux.

Ecrire pour se sentir vivant

La mise en scène de la Création, à partir des représentations qu’en fait Chagall, est une manière de célébration. Faire acte de création en rendant hommage au fait de se sentir vivant, principe même de la poésie élégiaque. Ou la littérature vue comme l’art de rendre grâce. 

Cette exégèse personnelle de la Bible raconte un cheminement spirituel intense. Créer est une manière de renouer avec la vie « (…) après les larmes (…) ». A travers les épreuves auxquelles Dieu et et la vie soumettent les Patriarches, cette succession de poèmes revient sur les traces d’une rédemption lente et douloureuse. « Il arrivait pour me sauver, moi qui ne m’étais pas révolté. J’étais Offrande, et c’est à moi que la vie était offerte à nouveau. », témoigne Isaac que son propre père mène au bûcher pour obéir à Dieu.

Un baume au cœur

L’essai qui referme l’ouvrage évoque cette vertu de l’abandon. La nécessité d’« accepter nous aussi de chavirer pour pouvoir ensuite nous élever. C'est là pour moi le message par excellence de la scène mythique du combat de Jacob avec l'Ange.» L’histoire de Jacob et Esaü est une histoire de droit d’aînesse et de pardon. Les deux frères sont comme chien et chat. Rien de neuf sous le soleil. « Un par un, les souvenirs m'attiraient dans un gouffre. Je me débattais pour ne pas sombrer. Tu étais en moi. »

De manière un peu magique, par l’un de ces prodiges dont la Bible a le secret, la foi, un sentiment de plénitude et de paix aident à surmonter les conflits et à s’affranchir du « fardeau mémoriel ». La confiance l’emporte contre les peurs et souffrances héritées, tel un baume au cœur. « Reconstruis ton état intérieur avant de monter. », dit l’Ange à Jacob qui est resté en bas de l’échelle. « Aucune ascension n'est possible sans la grande Confiance. » Un livre ambitieux qui tient ses promesses et fait partager la confiance.

> Scènes et poèmes bibliques - Le souffle de Chagall de Fabienne Chevallier, Le Lys bleu, 72 pages, 11,50 euros >> Pour acheter le livre, cliquer sur le lien