Visite chez Cocteau

Le monde de Cocteau

 

"Le «monde» de Cocteau est particulièrement peuplé: ses amitiés artistiques longues (Picasso) ou météoriques (Radiguet), ses inimitiés irréductibles (Breton) ou jalouses (Gide), ses compagnons (Jean Marais), ses amies  (Piaf, Coco Chanel, Misia Sert), ses protectrices (Anna de Noailles), tous ceux qui l’ont peint ou photographié (Kisling, Picasso, Modigliani, Delaunay, Man Ray, Warhol); ceux qui l’ont suivi, qu’il a rassemblés et encouragés (le Groupe des Six); ceux qui l’ont impressionné (Chirico, Stravinsky)…Ce foisonnement des disciplines et des personnalités qui se croisent et s’influencent sont une matière pour Cocteau.

 

 

Différemment, le monde de Cocteau réside aussi dans la maison de Milly La Forêt qu'il achète en 1947. Dans cette maison, il recrée tout un univers très personnel et invite ses intimes. Pierre Bergé rachète la demeure en 2002 avec l'aide du département et de la région pour en faire la maison musée Jean Cocteau, ouvrant un chantier qui va coûter près de quatre millions et demi de travaux.

La maison espère accueillir 30 000 visiteurs par an qui viendront aussi voir la chapelle Sainte Blaise-des-Simples, dont les fresques ont été réalisées par Cocteau et qui y est enterré. Un ouvrage fort bien documenté est à paraître chez Somogy le 18 Août prochain. Ce livre accompagnera le lecteur dans sa visite de ce lieu très particulier, connservant la mémoire d'un grnad artiste

En 2012, le culte de Cocteau bénéficiera d'un lieu supllémentaire: le musée Cocteau de Menton dans les Alpes Maritimes.  

 

 Cocteau, Organisateur de Génies.

 Cocteau, intermédiaire, entremetteur. Il avait le don de savoir organiser et communiquer aux autres avec génie les influences qu'il avait rassemblées.Ce n'est point un hasard si Serge de Diaghilev, créateur des Ballets Russes et génial découvreur de génies s'est si souvent entouré de l'artiste. Cocteau était le destinataire de son célèbre " Etonnez moi " .
Son humour était mordant, parfois cruel.  Vif et toujours là où il fallait, il ne se passait pas une grande fête où Cocteau n'était pas. Mais, au delà de cette aspiration effrenée vers le dehors, Cocteau est profondément poète.
 

 Cocteau, du poète à l'artiste

Tout au long de sa vie, Cocteau a déconcerté car comme un magicien, il apparaissait toujours là où on ne l'attendait point. Poète avant tout, il aimait dire: "Ce visage de l'écriture est somme toute mon vrai visage, l'autre une ombre qui s'efface". Il métamorphose, transforme et tend vers un art total. Aimant ne jamais se fixer, il cherche à renaître à chaque nouvelle oeuvre.Il écrit en 1946 dans La Difficulté d’être.: "J’ai toujours eu les cheveux plantés en plusieurs sens, et les dents, et les poils de la barbe. Or les nerfs et toute l’âme doivent être plantés comme cela. C’est ce qui me rend insoluble aux personnes qui sont plantées en un sens et ne peuvent concevoir une touffe d’épis. […] Ils ne savent par quel bout me prendre".
 

L'artiste et le temps

"Cocteau demeure l'un des tout premiers artistes du XXème siècle pour qui le temps servit l'invention et la singularité. Cocteau est "un homme temps". Ce créateur "eut conscience avant beaucoup que le matériau artistique de son siècle, encore inutilisé parce qu'inaccessible était le Temps."

Cocteau aimait, défendait et illustrait le merveilleux. Il habillait ses oeuvres et son personnage de  parures féeriques, ne craignant pas d'ajouter des accessoires romantiques, symboliques ou lyriques, prônant un retour à l'antique comme un paradoxal anti académisme.

 

Les mythologies de Cocteau: Des liens avec Marguerite Yourcenar

 En mêlant poésie et mythologie grecques anciennes, on peut trouver de nombreux points communs entre Marguerite Yourcenar et Jean Cocteau. Yourcenar édite un petit recueil de poèmes, en 1956, sous le titre "Les Charités d'Alcippe" et consacre un de ses textes à Jean Cocteau, "Clair Obscur," qui peut se lire à la fois comme un hommage à l'oeuvre du poète mais aussi comme un remerciement à l'envoi de son dernier recueil.
 C'est de Milly La Forêt que Cocteau écrit à Marguerite Yourcenar en 1952 : "Tâchons d'entrer dans la mort les yeux ouverts." Dans la préface à un ouvrage de jeunesse, Yourcenar n'hésite pas à dire: "J'aimais (...) Cocteau; j'étais sensible à son génie mystificateur et sorcier. (...) Le précédent de Cocteau m'a assurément encouragée à employer le très ancien procédé du calembour lyrique (...)".
 Une beauté moderne nourrie de l’antique. Voilà ce que souhaitait Cocteau. Il réclame l’exactitude des apparences. Or, les échos à la mythologie grecque à cette époque sont nombreux, en particulier dans le ballet "Le Train Bleu", aussi bien à travers les souhaits de Cocteau que le rideau de scène de Picasso.
En 1917, ce dernier part en Italie avec Cocteau, Diaghilev et Massine. Ils vont à Pompeï, Rome, Florence. Ce voyage va marquer Picasso et son œuvre, La Course, datée de 1922, en est un bel exemple.
Ce voyage en Italie va bien sur aussi avoir des résonances sur l’œuvre de Cocteau. Cocteau défend un retour à l’antique comme un « paradoxal anti-académisme ». Dans un article sur les rapports entre Cocteau et Marguerite Yourcenar, ces deux auteurs qui partagent le même goût pour la « ré-écriture » des mythes,Yourcenar définit l’écriture contemporaine du mythe : « non pas ramener le passé au présent mais jouer à la fois sur plusieurs claviers du temps ». De même, pour Yourcenar, Cocteau est « cet énigmatique passeur qui établit le contact entre les anciens dieux et héros grecs et leurs frères modernes. »
 

 Un fascinant kaléidoscope

 Avec Cocteau se déploie un fascinant kaléidoscope de l'art du XXème siècle. Cocteau a pleinement vécu sa traversée du vingtième siècle. Les vertiges mondains, l’illusion que la guerre pût «être jolie», l’occupant allemand, les relations houleuses avec les artistes surréalistes, l’insulte pour anarchisme et la reconnaissance académicienne, la conscience et les enfers artificiels prolongés par de terribles périodes de désintoxication, enfin sa soif de découverte de nouveaux talents.