A l’ère de l’Homo communicatus, nous sommes abreuvés jusqu'à plus soif de multiples références, renvoyant à d’innombrables jeux de reconnaissance : démêler le vrai du faux, le singulier de l’ordinaire, l’original du plagiat devient mission presque impossible parmi une telle abondance de liens croisés.
Pire, comme l’a expliqué Michel Houellebecq lorsque certains l’ont accusé d’avoir repris quelques notices de Wikipédia, l’importation de ces documents neutres qui nous envahissent finit par appartenir à la réalité de nos univers. Le romancier ne peut que s’en faire l’écho.Plus récemment c'est Joseph Mac -Scaron, qui est tombé sous le feu des quolibets pour son Ticket d'entrée ( Grasset) qui a emprunté sans les citer plusieurs passages destraits d'un roman américain, ou encore Patrick Poivre d’Arvor qui vient d'être condamé pour avoir utilisé des lettres d'une de ses anciennes maîtesses et qui avait été aussi accusé d’avoir emprunté pour sa biographie d’Hemingway (Arthaud) une centaine de pages au précédent livre sur Hemingway de Peter Griffin. Malgré les excuses de l'éditeur de PPDA qui s’est empressé d’expliquer que ce document n’était qu’une ébauche de notes transmises par erreur, on ne peut que s’interroger sur la nécessité de reproduire même dans un brouillon les passages en question. Et on ne peut que se demander si ce livre, apparemment œuvre très collective avait grand-chose à voir avec le travail d’un auteur digne de ce nom…
Une interrogation qui rejoint la question du statut de l’auteur aujourd’hui. Plus le nom de l’écrivain est médiatisé, plus il devient un gage marketing et plus il est tentant de le traiter comme une marque susceptible d’être déclinée en produits dérivés avec l'aide d'une cohorte d’assistants qui seraient à l’écriture, ce que le bureau de style est à la couture. Certes, quand une simple signature permet de valoriser un tableau, une maison de mode ou un livre en multipliant par dix ou cent sa valeur, peu importe l’auteur, pourvu qu’on ait la signature….
Mais, alors que penser des Dj qui remixent avec génie et qui composent des playlists avec une recréation mélodique de l’ensemble ? Le remixage littéraire serait-il un concept envisageable, un nouvel art romanesque à l’heure d’Internet et des forums participatifs ? On savait l’écrivain prédateur du monde qui l’entoure, jusqu’à se nourrir de l’histoire des autres, s’approprier les inspirations du monde et la vie de chacun. Dans notre époque où les mots et les images dansent autour de nous sans relâche, l’écrivain va-t-il devenir le réceptacle tout puissant d’un monde reçu, digéré et recraché ?…
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