Anne Wiazemsky: 20 ans, 1968 et Jean-Luc Godard...

Dans « Un an après », Anne Wiazemsky a 20 ans. Elle est mariée à Jean Luc Godard et emménage dans le quartier latin. Débute alors mai 1968: fermeture de l’université de Nanterre ou elle étudie, interruption du Festival de Cannes, l’occupation d’Odéon… Alors qu’elle tourne « La Bande à Bonnot» en compagnie de Jacques Brel et d'Annie Girardot, la jeune fille s’intéresse aux manifestations parisiennes jusqu’à être finalement dégoutée par ces débordements.

La fin d’un conte de fées

Au fil des pages, l’auteure peint un portrait de son compagnon Godard comme quelqu’un qui se laisse un peu dépasser par les évènements historiques de l’époque. Rebelle, jaloux, s’éloignant du cinéma un peu bourgeois. C’est une réelle confession qu’elle fait à son lecteur car elle raconte, avec toute l’innocence de ses 20 ans, comment son couple chavire et comment elle a senti que la situation lui échappait. Son livre, paraît plus dramatique que les précédents car dans « Jeune fille », elle évoquait sa rencontre et sa relation avec le cinéaste Robert Bresson, dans « Une année studieuse », le début naissant de son histoire d’amour avec Godard, et finalement dans « Un an après », elle met en relation la tournure chaotique des évènements de mai 68 avec l’effondrement de son couple, de son mariage. 

Du témoignage à l’écriture d’une oeuvre

Une suite qu’elle n’avait pas anticipée. En effet, l’auteure a déclaré ne pas avoir prévu de faire une trilogie. « Ce n’est qu’après coup, une fois le roman terminé que cette idée m’est apparue ». Anne Wiazemski a démarré sa carrière littéraire en 1987. Elle publie des romans qui racontent, bien souvent, des faits de sa propre vie ou de celle de ses proches. C’est ainsi que le lecteur rencontre les parents de la jeune femme et sa venue au monde dans « Mon enfant de Berlin », ou découvre ses grands-parents paternels dans « Aux quatre coins du monde ». Cette trilogie, quant à elle, est dédiée à sa jeunesse… Car selon Anne Wiazemski, petite fille de François Mauriac :« La mémoire est une romancière incroyable ».

Le mot d'Anne Wiazemski

Pour présenter son livre voici ce que son auteure a écrit : «La traque des étudiants se poursuivait boulevard Saint-Germain et rue Saint-Jacques. Des groupes de jeunes, garçons et filles mélangés, se battaient à mains nues contre les matraques des policiers, d’autres lançaient différents objets ramassés sur les trottoirs. Parfois, des fumées m’empêchaient de distinguer qui attaquait qui. Nous apprendrions plus tard qu’il s’agissait de gaz lacrymogènes. Le téléphone sonna. C’était Jean-Luc, très inquiet, qui craignait que je n’aie pas eu le temps de regagner notre appartement. "Écoute Europe numéro 1, ça barde au Quartier latin!" Nous étions le 3 mai 1968.» 1968, année historique pour toute une jeunesse qui ne cesse de se remémorer de ce qui a basculé dans leur vie "cette année-là". Et année pour la jeune Anne d'un grand chaos intérieur...

>>> Anne Wiazemsky, "Un an après", Gallimard