Cela fait plusieurs mois que les rencontres littéraires sont revenues sur le devant de la scène : de plus en plus de lecteurs souhaitent rencontrer leur auteur favori, pour échanger quelques mots, soumettre des interrogations ou simplement pour assister à une lecture de son dernier ouvrage. Libraires, éditeurs et auteurs se pressent pour satisfaire les désirs du public, et imaginent parfois des rencontres atypiques et surprenantes. Décryptage d’une pratique littéraire qui remonte aux origines de l’écriture, et déploie encore ses instruments de fascination et de découverte aujourd’hui.
Les lecteurs contemporains s’attachent désormais à dessiner un visage, une main, un corps derrière un texte qui les a séduits : ils souhaitent rencontrer l’auteur, celui qui a créé cette fiction particulière qui a su les captiver pendant et après la lecture. Juste retour des choses : la rencontre a peut-être pour origine la simple mais honorable volonté de remercier l’artiste pour sa cathédrale littéraire. Alors que la présence de l’écrivain est de plus en plus rare à la télévision, par exemple, on constate des listes d’invités toujours plus impressionnantes à l’occasion des salons littéraires organisés à travers toute la France : le Salon du Livre de Paris 2011 avait ainsi invité pas moins de quarante auteurs nordiques ! Et la fréquentation record de cette année, 180 000 visiteurs en quatre jours, confirme l’attirance des lecteurs pour l’évènement qui propose une rencontre avec l’auteur.
Si la traditionnelle et incontournable file d’attente afin de dédicacer un ouvrage est quelque peu rébarbative, le dialogue « réel » avec l’auteur est l’occasion de partager ses impressions, de le questionner sur ses méthodes de travail, bref le moyen de dynamiser son rapport avec le texte. Si, dans son Contre Sainte-Beuve, Marcel Proust fustigeait l’approche « biographique » adoptée par le critique qui s’attachait à l’étude des relations sociales ou du comportement d’un auteur pour juger son œuvre, il reconnaît que le lecteur peut accéder au « moi » profond de l’auteur en recréant celui-ci, après la lecture, « au fond de [lui-même] ». Pouvoir s’entretenir de vive voix avec l’auteur le temps de quelques questions, c’est l’assurance de pouvoir éclairer les quelques points obscurs d’un texte, ou bien de développer en compagnie de l’écrivain une idée centrale de son œuvre. C'est l'objectif primordial de Daniel Picouly et de l'hôtel Hyatt Regency Paris-Madeleine, qui proposent aux passionnés de littérature un Brunch Littéraire, où la gastronomie n'est pas oubliée. Après un repas concocté par le chef-cuisinier de l'hôtel, Frédéric Charrier, La Chinoiserie se transforme en un véritable salon littéraire. Daniel Picouly rencontre en effet un auteur et s'entretient avec lui à propos de son oeuvre (tous les entretiens sont d'ailleurs disponibles en podcast). Des rencontres de haute qualité, placées sous le signe de la convivialité et de la proximité.
La rencontre littéraire ne se limite pas simplement à la dédicace effectuée pendant un salon littéraire : la lecture à voix haute, par l’auteur lui-même ou des acteurs professionnels, fait également un retour en force auprès des amateurs de littérature.
Une pratique qui remonte à l’Antiquité, quand les auteurs latins eux-mêmes, ou de jeunes affranchis désireux de devenir acteurs assuraient en pleine rue, chez un particulier ou dans un bâtiment public, la lecture à voix haute d’un texte. Virgile en personne aurait ainsi lu ses Géorgiques pendant… 4 jours ! Exercice exigeant, la lecture à haute voix permet aux spectateurs d’apprécier toute la musicalité qu’un auteur a voulu insuffler dans son texte, particulièrement lorsqu’il s’agit d’écrits poétiques ou à l’aspect formel très travaillé. Depuis plusieurs mois, à intervalles réguliers, l’Hôtel Lutetia propose aux amateurs, parmi un large choix de rencontres littéraires, des salons de lecture à voix haute assurés par des acteurs professionnels. Et si le lecteur souhaite tenter l’expérience, l’inscription est possible pour une série de séances destinées à améliorer le contrôle de son souffle et de son débit:quand la rencontre devient participation…
La lecture d’un texte est souvent l’occasion d’éprouver les liens que la littérature a tissés avec les autres arts. Ses affinités avec la musique ne peuvent plus être mises en doute : la Halle Saint-Pierre a ainsi décidé d’organiser des rencontres « pianistico-littéraires ». Un écrivain épris de piano se prête chaque mois au jeu en s’installant derrière l’instrument pour interpréter une série de morceaux de son choix. Un regard neuf sur l’auteur et une lecture de ses textes sur un autre rythme attendent des spectateurs ravis. La soirée PoésieRock, organisé par le Centre International de Poésie de Marseille, propose chaque année quelques exemples, live ! bien sûr, de collaboration entre l’énergie de la musique rock et la force poétique des mots (on se souvient du passage de Patti Smith à Paris, le temps de quelques lectures de ses poèmes). La Maison des Ecrivains et de la Littérature a choisi de présenter, en association avec l’INA, quelques passages mémorables d’écrivains à la télévision, suivis par une lecture de textes bien souvent inédits. Il y a quelques semaines, « Corps écrit » avait permis à un public nombreux de suivre la chorégraphie de la danseuse Karine Saporta, qui se mélait aux méandres du texte Syngué Sabour, pierre de patience lu par son auteur, Atiq Rahimi.
La littérature, institution sociale rendue possible par la création sociale qu’est le langage, est intrinsèquement liée à la rencontre et à la mise en commun. Les évènements littéraires, à la géométrie toujours variable, qui se multiplient témoignent d’un désir grandissant de la part du public pour une lecture changeante et ouverte des textes, tout en replaçant l’auteur au centre du dispositif. Ce faisant, ils entretiennent la curiosité de lecteurs attentifs, et confirment l’excellent état de santé de l’art littéraire.
Le Brunch Littéraire
Hôtel Hyatt Regency Paris-Madeleine
24, bd Malesherbes 75008 Paris
Les Rencontres du Lutetia
Hôtel Lutetia Paris
45, bd Raspail, 75006 Paris
www.lutetia-paris.com
Le Festival de la BD d'Angoulême vient de se terminer. Voici l'ensemble du palmarès.
« Deux Filles Nues » de Luz reçoit le Fauve d'or du meilleur album au FIBD Angoulême.
Après Posy Simmonds en 2024, c’est Anouk Ricard qui est élue par ses pairs Grand Prix de la 52ᵉ édition du Festival International de la Bande Dessi