Blogosphère

Le web et la plume

En France les livres sont sacrés, les écrivains des demi-dieux et les lecteurs, des critiques passionnés. Depuis quelques années, le web a vu fleurir une grande multitude de bloggeurs-chroniqueurs littéraires : le point sur ces plumes nouvelle génération.

En France, la sagesse populaire germano-pratine affirme qu’il y a autant d’écrivains que de français. Tellement d’ouvrages sont publiés qu’il ne suffirait d’une vie pour lire deux années de publication : 660 rien qu’en littérature générale pour une rentrée de septembre.  Et parmi ces ouvrages des perles, que l’on a envie de partager, recommander, disséquer. Car, en France, il y a autant de critiques que de français bloggeurs.  Tout bloggeur a parlé, parle ou parlera de livres. Mais qu’est ce qu’un bloggeur littéraire véritablement ? Comment faire partie du plus large club littéraire de France, les blogs littéraires ? Qui sont les stars à suivre ?

Un blog, un texte, une rencontre

Suffit-il de parler une fois dans ce journal qu’est le blog d’un livre pour entrer dans le club des blogs littéraires ?  Evidemment, non. Un blog littéraire a pour sujet principal le livre et l’expérience du bloggeur avec celui-ci. Il est un point de vue subjectif assumé car il est une narration d’un vécu de lecture.  Il ne suffit pas d’un post pour être un bloggeur littéraire, il faut en faire une vocation, et cela demande un rythme de lecture important, puisqu’apparait en moyenne un post tous les trois jours.  L’appareil critique de  chacun est à l’œuvre pour recommander (ou pas) des lectures. Chacun son style, chacun ses lectures, et surtout, chacun son parcours. 

Tout lecteur trouve sur le web un espace pour exprimer sa passion.  Aucun recensement ne les dénombre vraiment mais approximativement on peut  estimer leur nombre à 500 actifs. Les notes de lecture sont des exercices, pour certains même des exercices de style, qui demandent apprentissage de l’écriture web, de son format, mais qui aussi mobilisent les facultés critiques et donc argumentatives, quelles qu’elles soient d’ailleurs. Ecrire ces récits de lecture est une sorte de travail de mémoire et de partage. Storyteller une aventure aussi intime que la lecture sans pour autant faire un travail de professionnel critique : voilà l’enjeu du bloggeur. Car celui-ci, ou plutôt celle-ci, puisque majoritairement les blogs littéraires sont tenus par des femmes ( ce qui est cohérent avec les statistiques d’achat de livres) se revendiquent comme étant dans une logique d’amateur. La plupart d’entre eux n’appartiennent à aucun des métiers de la chaîne du livre : pas de csp distincitives, ils sont autant juristes, professeur de mathématiques, femmes au foyer ou ingénieur.  Evidemment, il y a les journalistes qui tiennent un blog, les Wannabee qui comptent sur l’e-reputation pour émerger, mais majoritairement, ce sont des amateurs sans autre prétention que d’écrire, si possible bien, pour donner aux autres l’envie.

Leur seul point d’union est l’amour des livres. Toute catégorie d’entre eux d’ailleurs : vous trouvez autant de blogs spécialisés en littérature fantastique, en littérature jeunesse, que de chroniques de romans français traditionnel. La concordance est dans le véritable travail de lecture et de restitution. La modalité de celle-ci relève de «l’extime» : c'est-à-dire cette part d’intime dessinant souvent un portrait en creux  de l’auteur de ce blog. Déposer sur la toile le récit de ses lectures, c’est offrir une fenêtre sur son univers intérieur, sa nourriture  intellectuelle et déborder vers cette part de subjectivité assumée qu’est le récit de soi en train de lire pour les autres.

Des rencontres, des défis, du partage.

Majoritairement, les bloggeurs littéraires choisissent des plate-formes gratuites d’hébergement de leur blog type overblog, hautetfort . Evidemment cela détermine en partie le graphisme de leur page. Mais ce qui les distingue entre eux ce sont leurs goûts et leur style. Une telle choisira des papillons roses et sera passionnée de littérature jeunesse, l’autre une ribambelle  de petits personnages,  et se damnera pour la littérature anglaise et les vampires de tout bord. Evidemment, là où l’on parle livre, on parle culture et tous les débordements sont permis : cinéma, série télé,  exposition.  L’important est de rendre accessible non seulement sa prose, et pas que pour les happy few, mais ses idées et ses coups de cœur.

Les coups de cœur appellent parfois les coups de gueule, souvent les débats, et  surtout le partage. Les livres sont faits pour circuler dans l’univers des blogs littéraires, tout comme les idées. On se connait et on se reconnaît, d’abord par les commentaires, ensuite parce que l’on se trouve lorsqu’on cherche des sources de recommandation sur un ouvrage. Et surtout, l’on se suit, se défie et se transmet : Swaps, challenge, prêts, tout est bon pour découvrir le plus d’ouvrages possibles, si possible recommandés par les bloggeurs que l’on suit, et dans lesquels on se reconnait.  Une vraie communauté dédiée et organisée se défie toutes les rentrées avec le 1% littéraire, s’échange des colis originaux avec les swaps, se rencontrent et se découvrent, toujours avec jovialité, et fournissent un vrai travail de recensement, d’interviews des auteurs. Les bloggeurs littéraires cultivent leur jardin de  livres et d’amitiés, sans problématique de concurrence, et les greffes sont souvent les bienvenues.  Soudée par le papier des livres (majoritairement la lecture sur écran ne leur sied pas trop), cette communauté est solidaire par l’écran.

A raison d’un post tous les trois jours environ et d’approximativement 500 bloggeurs, l’effet de dispersion de l’information peut être non seulement très rapide mais la couverture en nombre de pages très importante. Cette manne  est d’un intérêt croissant pour les maisons d’édition. Celles-ci  font un travail de repérage et envoient aux bloggeurs qui leur semblent les plus sensibles, si ce n est les plus favorables, des exemplaires presse pour maximiser la couverture de leurs ouvrages. Reste à maîtriser les codes du web social, et ne pas confondre le bloggeur et le journaliste. A l’inverse, certains bloggeurs conscients de leur pouvoir démarchent eux-mêmes les maisons d’édition. Entre reconnaissance, ambition littéraire, amour des mots et marketing, tout cet univers se lie, s’observe et finalement interagit encore difficilement, car le papier et le post n’ont toujours pas la même valeur. Même si le public plébiscite de plus en plus ces plumes qui n’hésitent pas à donner leur opinion : signe que dans le domaine des livres, l’ « imparfait subjectif » devient de plus en plus présent. S.P

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