Consommez !, qu’ils disent !
Participez au grand bal du carnaval…
Profitez, et dansez !
Dansez les yeux fermés : sur les déchets de vos excès et les corps de vos morts.
Dansez au milieu des immondices et fermez les yeux sur les enfants qui crèvent -le ventre gonflé du manque qui les vide jusqu’à la moelle…
Virevoltez sur les glaces qui fondent et les eaux qui montent -the show must gone…
Valsez et tapez du pied dans les favelas –l’odeur de la misère n’apparaît pas sur les photos souvenirs.
Et puis, chantez à tue-tête : la musique adoucit les meurs - masquant les cris des hommes qui s’étripent.
Alors on a participé, tous : dans les avions pour survoler les pôles qui pleurent leurs eaux douces et sur les ours qui dérivent, faméliques, sur des glaçons perdus.
La Terre vue du ciel, à un train d’enfer : au-dessus d’une jungle où se meurent en « couleur nature » les dernières tribus.
Au-dessus des déserts qui grandissent, les ghettos qui essaiment, les cœurs qui rapetissent…
Et l’on a capturé en numérique des éléphants qui meurent debout, la trompe paralysée par quelque épandage assassin.
Les tortures qui étouffent sous la pression de plastics meurtriers.
Les phoques mazoutés, les renards étripés - et les belles en défilés.
Sans oublier les enfants mutilés, les gosses sacrifiés, les terres ravagées....
Mais l’odeur du sang âcre n’entache pas la pellicule…
Et les cris des hommes emportés par les vagues déferlantes sont vite effacés par d’autres images, d’autres voyages…
On a voulu s’en mettre plein les yeux : avec des noubas du tonnerre, des giga teufs d’enfer -le monde au creux de nos mains.
Les yeux écarquillés face aux vitrines d’abondances, ou devant des rêves en trompe-l’œil dont il ne restera finalement que du vent balayant en tempête quelques tempes enfiévrées.
Consommez !, comme un bourdonnement qui rend fou.
Une ivresse…
Ça s’étale sur les murs en lettres rouges.
S’illumine sur les tours infernales de verre et de béton armé jusqu’à nos dents trop longues…
Valsez les yeux bien fermés, on y voit des étoiles !.
Et de valser sur les fleuves puants de nos excréments, assis sur nos graisses mollassonnes et sur les squelettes lointains de quelques enfants perdus - une collecte adoucira d’un instantané papier glacé la bonne conscience de notre si fugace mauvaise conscience.
Et de tournoyer sans faim sur notre sang trop riche, sur leurs fils trop maigres.
Consommez bonnes gens, ouvrez vos portefeuilles et fermez vos portes ! Profitez de la vie, du monde ou du temps – tant qu’il n’est pas trop tard… .
Profiter ! De tout, pour rien : dans des avions de feu fendant les cieux noircis comme de grands oiseaux blancs – pour survoler la banquise qui se désagrège et les ourses qui dérivent, pauvres fantômes déjà dépassés, sur des icebergs égarés entre les bateaux usines et les tankers.
Pour immortaliser sur papier bouffant des tortues garrottées par des sacs dérivants emportant avec eux toutes les larmes des sirènes. Et des dauphins pris au piège de filets assassins, des phoques écorchés vifs – tache rouge sur le blanc trompeur des étendues salies depuis bien longtemps.
La terre vue d’en haut, presque féerique ; et les cieux vus d’en bas -comme un suaire qui plombe l’horizon des métaux trop lourds, des intérêts trop courts.
Profitez de l’aubaine, profitez de l’instant ! …
Safari photo en Afrique où quelques pachydermes meurent sur pieds, pris d’une paralysie très peu naturelle, tragédie plus vraiment évitable…
Limousine super équipée et montgolfière dans le bleu du ciel – billet pour l’enfer :
A pister des aurores boréales et des pierres de lune - les pieds sur terre, le cul sur les cuirs fins des palaces étoilés.
Gauche caviar ou droite bling-bling: à prendre d’assaut les rues de Rio ou les sentiers de Katmandou ; comme nos pères, mais sans y croire.
Entre poignées de mains et persiflages, de compromis en désengagements, discutant ferme des traités bidon et des conventions pour rien.
Calculant des taxes ‘carbone’ en s’envoyant en l’air dans des monstres supersoniques – s’acclimatant à la chaleur d’ailleurs grâce au climatiseur acheté ici.
Se désolant face à quelques bûchers de haines, s’émerveillant devant des feux de joie - là où ne reste que l’espoir.
Et regardant des hommes s’agenouiller et des femmes danser, demi-nues - tout emplumées pour le cliché…
Car elles dansent encore ces femmes, sur leur terre meurtrie. Malgré leurs seins taris et leurs rêves effacés. Elles dansent nonobstant le sang trop vite absorbé par le sable, dans l’indifférence générale. Nonobstant les carcasses blanchies et les charniers puants. Elles dansent sur leurs souffrances ou sur leurs drames - pour ne pas s’effondrer.
On voit toutes ces choses. Et des fauves en furie, des hommes en guerre, des filles souillées.
Et puis, paradis perdu, une gazelle tétant une lionne…
On voit les coulées de boue, les séismes, les tsunamis, les famines, les combats, les massacres, tortures, folies, furies…
Et les camps de la honte….
Ou parfois, paradis retrouvé, des doigts qui se mélangent, des couleurs qui se fondent…
On voit et on ne sait même plus pleurer : scoop à la ‘Une’ et adrénaline….
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