Dans son nouveau roman, Cette main qui a pris la mienne (Belfond), l’écrivaine britannique Maggie O’Farrell mêle les destins de deux femmes, dans le Londres d’aujourd’hui et dans celui des sixties. Elle aborde la question de la maternité, de la perte, du danger des secrets dans ce roman émouvant, pour lequel elle a remporté le prestigieux Prix Costa en 2010. Elle nous parle de son livre, mais également de ses inspirations et de sa conception de l’écriture.
Installée dans le salon cosy d’un petit hôtel de la place de l’Odéon, j’attends l’arrivée de Maggie O’Farrell. C’est une jeune femme souriante et avenante, qui ne me voit pas d’abord. Je la poursuis jusqu’à la réception, et ai le plaisir ainsi de rencontrer son visage qui s'éclaire . Une fois toutes les deux confortablement assises dans les fauteuils en tissu du salon, l’interview peut commencer.
-Maggie O'Farrell : Le début de la maternité est un sujet que j’ai rarement vu abordé dans la fiction. Dans les mémoires, les récits autobiographiques mais pas dans les romans. Je pense que le roman parle vraiment de bouleversement, du fait de changer sa vie et je crois que c’est ce que signifie avoir un enfant. En tant qu’écrivain, le début de la maternité est un sujet très riche, puisqu’il permet de mettre le personnage dans une situation extrême, et c’est ce qu’un roman fait. Pour un auteur, écrire un roman est un peu comme avoir un enfant, du point de vue de la fiction.
-M. O'Farrell : Oui, mais pas d’une manière négative, c’est une bonne chose. Evelyn Waugh a dit « Change is the only evidence of life » [le changement est la seule évidence de la vie]. La vie serait ennuyeuse sans changement non ? J’ai beaucoup apprécié mes 20 ans, mais mes trente ans ont été complètement bouleversés grâce à mes enfants.
-M. O'Farrell : Tout à fait. Le titre fait référence aux personnes qui sont là dès que l’on en a besoin, aux premières personnes qui vous tendent la main. Mais aussi à la mère, qui est bien la première personne qui est là pour nous.
-M. O'Farrell : Oui, le roman aborde le thème de la perte. La mort est comme la naissance d’un enfant, elle est un bouleversement extrême. Le récit montre comment on peut se réinventer, à travers la perte d’un être cher, les personnages réalisent que leur vie ne sera plus jamais la même.
-M. O'Farrell : Oui, certainement. L’amour sous toutes ses formes et tous ses déguisements. Je me suis bien amusée avec le personnage de Félix ! (rires). Son problème est qu’il est trop amoureux de lui- même, beaucoup de gens sont dans son cas je crois ! Ce n’est pas un très bon père ni un très bon mari, mais ça reste un personnage que j’ai pris beaucoup de plaisir à décrire !
-M. O'Farrell : Initialement, l’idée vient d’une exposition du photographe John Deakin à laquelle j’ai assisté il y a des années. C’est un artiste des années 50, il faisait partie des proches de Francis Bacon à Soho, il voulait être peintre, il faisait des photos juste pour gagner de l’argent. Quand j’ai vu ses portraits, j’ai vraiment été impressionnée, et je suis retournée plusieurs fois à l’exposition. Puis l’idée d’un personnage qui quitte un environnement lisse pour s’installer à Londres à émerger. Je voulais transposer Lexie dans une photo de Deakin. Soho est un quartier que je connais bien. Je travaillais là bas pour mon premier job. Il a une histoire intéressante. C’est ce que je trouve fascinant dans les villes, un quartier, une rue a forcément été autre chose. Henri VIII allait chasser à Soho, puis au fil des années un voisinage assez riche s’y est installé. C’est finalement devenu le quartier bohème, réservé aux artistes, c’est un peu le mouton noir de la famille à Londres aujourd’hui. John Deakin apparaît brièvement dans le roman. C’est Francis Bacon qui a sauvé toute ses photos, il a retrouvé tous les négatifs sous son lit après la mort de Deakin.
-M. O'Farrell : Féministe est un mot complexe aujourd’hui, il n’a pas le même sens que dans les années 70. Dans les années 70, j’aurais été une féministe, ce que les femmes ont fait à l’époque est très important, c’est grâce à elles que vous et moi pouvons travailler aujourd’hui. Lexie est la représentation de ces femmes dans le roman. Mais la bataille n’est pas gagné, on a encore un long chemin à faire. Je suis choquée par la condition des femmes dans des pays moins développés que le notre, et même dans les pays qui se veulent développer, le statut des femmes n’est pas toujours respecté. Oui, le féminisme m’intéresse. Mais c’est un terme qui a trop souvent été employée de manière abusive.
-M. O'Farrell : Dieu vous bénisse ! (rires) Je ne sais pas si c’était intentionnel, mais Mrs Dalloway est l’un des romans que je préfère, je l’ai lu et relu, donc c’était inévitable. Je pense que Virginia Woolf est brillante pour saisir le moment.
-M. O'Farrell : Je ne sais pas. J’ai eu une proposition d’une boîte de production à Londres pour une adaptation au cinéma, mais je ne suis pas sûre. Je ne sais pas ce que pourrait donner le récit des deux périodes différentes à l’écran. Je pense que le roman est le meilleur moyen de raconter cette histoire. On verra bien. ..
-M. O'Farrell : Oui. Je prépare un roman à propos de la vague de chaleur qui s’est abattue sur l’Angleterre en 1976. Les conditions de vie étaient terribles, il n’y avait plus d’eau et il faisait 35° tous les jours. Ce sera l’histoire d’une famille, les enfants sont déjà adultes, ils sont éparpillés partout dans le monde. Ils vont devoir rentrer en Angleterre pour affronter une crise de famille.
-M. O'Farrell : Pour les auteurs contemporains, j’aime particulièrement William Boyd, Margaret Atwood, Alice Monroe. Pour les classiques, Flaubert, Camus, Joyce, Woolf évidemment et les sœurs Brontë.
Maggie O'Farrell, Cette main qui a pris la mienne, Traduit par Michèle Valencia , Belfond
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