Douglas Kennedy est un écrivain américain dont les livres sont des best-sellers. Ses fans se comptent par millions. De passage à Paris pour le festival America, nous l'avons rencontré. L'auteur accepte de lever le voile sur ses secrets d’écriture et répond aux remarques de ses lecteurs. Découvrons ses réponses avant de nous plonger dans son nouvel ouvrage, Cinq jours ( Belfond).
Vincennes, Festival America. Le stand des éditions Belfond est pris d’assaut : les fans de Douglas Kennedy se pressent et le célèbre auteur américain se prête au jeu des signatures. A une jeune femme qui lui tend deux de ses livres, il demande « C’est pour qui?» Et la jeune femme de répondre : « Pour Jean-Claude ». « Ah très bien » poursuit l’auteur en y allant de sa bafouille « A Jean-Claude, cordialement ». A la chaîne, les prénoms se suivent sans se ressembler, Douglas Kennedy essaie de conserver un peu de spontanéité pour chacun.
Pendant ce temps, nous interrogeons les lecteurs et lectrices qui font la queue, pour leur demander ce qu’ils pensent de leur auteur favori. Après un temps qui semble interminable, notre auteur qui est prêt à rendre les armes déclare : « Après, Monsieur, c’est fini ». Viennent quelques retardataires qui le supplient : celui-ci cède et repart pour quelques signatures, puis épuisé, décide que, cette fois-ci c’en est fini, se tourne et s’empare de son assiette de petits gâteaux secs, tentant ainsi de se remettre de l’effort en dégustant les plus chocolatés. C’est ainsi qu’un peu plus tard nous réalisons notre interview, sur la base des observations recueillies.
Viabooks : Commençons cette interview un peu particulière par l’observation de Marie-Céline S., ( cadre dans la fonction publique, Noisy le Grand). « J’apprécie particulièrement Douglas Kennedy pour la simplicité de ses récits ». Que lui répondez-vous ? Simple ou pas simple ?
Douglas Kennedy : C’est très juste, je crois et très flatteur ! J’essaie toujours que mon style soit accessible même si les idées peuvent être complexes. Je suis personnellement très marqué par les romans du XIXème siècle, avec leur sens du grand récit et leur tradition de brosser de grandes fresques avec une vraie histoire, avec une construction complexe mais une grande fluidité dans le déroulement du récit.
V. : Poursuivons avec l’observation d’Anne M. (enseignante, Vincennes) : « Pour moi Douglas Kennedy est un auteur de la psychologie. Il nous permet de rentrer en résonance avec les personnages. C’est pourquoi, mon livre préféré est Piège nuptial ». Une méthode pour pénétrer les consciences ?
D.K.: Il est vrai que j’aime beaucoup la vie quotidienne. J’ai la chance de vivre une vie de famille très équilibrée, ce qui me donne un ancrage dans la vie « réelle ». J’observe beaucoup ce et ceux qui m’entourent. Et dans mes romans j’essaie de me faire l’écho des inquiétudes modernes. C’est pourquoi il me semble que les lecteurs peuvent ressentir une résonance avec leur propre vie et leurs ressentis personnels. Je recherche cette possibilité de projection. C’est pourquoi je travaille beaucoup le fond de mes personnages, pour les décrire au plus juste.
V. : Autre observation de Christophe W. ( directeur de la qualité, Montreuil) : il apprécie en vos livres « leur capacité à raconter de belles et grandes histoires , qui vous prennent et qu’on lit de bout en bout sans s’arrêter ». Vous accepter d’être un « redoutable » conteur ?
D.K. : L’histoire est l’architecture de mes livres. Et je la travaille le plus possible pour lui donner du rythme et évacuer tous les ornements inutiles. J’essaie de ne pas aller dans les digressions ou les détours inutiles. En général j’écris entre trois et quatre jeux du même roman et chaque fois, je coupe, je coupe.
V : Vous comprenez cette phrase de Madame de Sévigné à sa fille qui s’excuse de lui écrire une lettre trop longue car « elle n’a pas eu le temps de lui en écrire une plus courte » ?
D.K. : Oh oui. Cette phrase me plaît bien ! C’est certain que plus on veut donner du corps et de l’efficacité à un récit, plus il faut le travailler et le « dégraisser ». Cela prend beaucoup de temps d’écrire « simple ».
V. : Agnès M. ( commerciale, Paris) loue aussi votre sens du suspense et votre humour…
D.K : Le suspense renvoie pour moi toujours à ces auteurs du XIXème qui sont des maîtres du genre et de qui j’ai beaucoup appris : Dostoïevsky ou Dickens par exemple, ou encore Flaubert dans Madame Bovary et Graham Greene. L’humour se crée par les entrecroisements et les jeux de rythme qui proviennent justement de ce suspense. L’humour est important car il permet de la respiration et parce qu’il reflète la vie qui n’est jamais parfaitement linéaire.
V. : Julie D. (Kinésithérapeute, Paris) nous a déclaré être touchée par vos livres « pour leur exceptionnelle capacité à décrire et comprendre les femmes ». Comment avez-vous fait pour percer le secret « des femmes » ?
D.K. : Je me souviens de ma mère qui était une femme très intelligente, frustrée de sa vie de femme au foyer et malheureuse dans son couple. J’ai beaucoup appris d’elle. Et puis, je crois que j’essaie toujours d’écouter les personnes que je croise, pas seulement celles qui partagent ma vie. Alors, bien sûr essayer de comprendre les femmes est essentiel pour un romancier qui veut raconter des histoires !
Douglas Kennedy, Cinq jours, Belfond
Douglas Kennedy, Quitter le monde, Belfond
Douglas Kennedy, L'homme qui voulait vivre sa vie, Belfond
Douglas Kennedy, La poursuite du bonheur
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Légende photo : Jérôme Garcin, Hervé Le Tellier, Rachida Brakni, Marthe Keller, Gaël Faye, Kamel Daoud, Rebecca Dautremer, Emmanuel Lepag
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