Saviez-vous que l'industrie du papier était l'une des plus durables et que l'apprentissage se fait mieux sur un support imprimé que sur un écran ? Jean-Philippe Zappa, délégué général de «Culture Papier» nous l'explique. Ce lecteur passionné nous démontre aussi pourquoi numérique et papier, loin de s'opposer, sont complémentaires. Interview.
-J Jean-Philippe Zappa : Pour nous, papier et numérique
sont des alliés. Congtrairement à ceux qui veulent opposer les deux, nous considérons que ces deux supports, loin d’être antagonistes, sont complémentaires.
D’ailleurs, c’est bien l’avis de 78% des Français, interrogés lors du premier baromètre de l’Observatoire Culture
Papier en octobre 2014, qui ne veulent pas être amenés à faire un choix entre les deux. Découvrir
les nouveaux usages de la lecture sur tablette ou sur liseuse, n’empêche pas les
lecteurs de continuer d’apprécier la lecture des journaux ou des livres en
version imprimée. En effet, papier et numérique sont perçus et utilisés de
manière différenciée par les usagers. Au papier sont associées les notions
d’émotion, d’affectif, le plaisir du toucher, du partage…Tandis que le
numérique laisse place à la réactivité, la mobilité, l’abondance, l’interactivité.
-J-P
Z. : Les études comparatives sur les conditions d’appropriation
d’un texte dans l’un ou l’autre des moyens de restitution, montrent que la
lecture sur papier favorise une meilleure concentration et surtout une meilleure mémorisation. Je
fais référence aux travaux de Thierry Baccino, Professeur en psychologie
cognitive. D’ailleurs savez-vous que dans la Silicon Valley, les écoles qui
reçoivent les enfants de tous ceux qui travaillent chez les géants du digital,
prônent une éducation déconnectée ? A méditer, n'est-ce pas ? Pour ce qui nous concerne, nous ne militons pas pas pour une position aussi extrême. Nous constatons simplement que, si nous voulons transmettre un socle
de connaissances, il est important de garder des livres en papier. En revanche s’il
s’agit de faire un exercice ou un travail collectif, utiliser les moyens numériques permet davantage d’échanges et d'applications pratiques. A l’école, il semble donc préférable de favoriser la coexistence des deux modes de lecture et de prendre le
meilleur de chacun pour des objectifs bien définis.
-J-P Z. : Loin d’être amené à disparaître au profit du numérique, le
papier a encore de beaux jours devant lui. Regardez ce qui s’est passé au moment des
attentats de janvier. Le tirage exceptionnel de Charlie Hebdo à 8 millions
d’exemplaires a montré le besoin de « matérialisation » dans l'achat d'un journal. Ou
encore le succès du livre de ValérieTrierweiller : c’est bien un livre
imprimé qui s’est arraché dans les librairies où les acheteurs faisaient la
queue. D’ailleurs une enquête du cabinet Deloitte de février 2015 indique que huit
livres sur dix seront achetés cette année en version papier dans le monde. Et
contrairement aux idées reçues, la publication de livres papier augmente, malgré le contexte de développement du numérique :
cette augmentation a été de 7% en 2014, selon Sylviane Tarsot-Gillery, Directrice générale
de la Bibliothèque Nationale de France. L'ensemble du temps consacré à l’information et la lecture sous toutes ses formes a augmenté en valeur globale. Dans ce contexte, les consommations numériques
viennent bien en complémentarité et non en opposition avec celles des produits
imprimés qui ont continué de croître.
-J-P Z. : Nous assistons à ce que nous appelons le développement du papier connecté : QR code, reconnaissance d’image, réalité augmentée et autres technologies, commencent à prendre place dans les pages de nos journaux et magazines et certainement bientôt de nos livres, ouvrages pédagogiques, imprimés, catalogues, etc. Cette alliance du papier et de la technologie ouvre de nouvelles perspectives aux lecteurs qui peuvent ainsi bénéficier d’un complément ou de mises à jour d’informations, d’interactivité avec une communauté, de partage de connaissances, par exemple.Nous ne sommes qu'à l'aube de ces circulations.
-J-P Z. : Le papier génère de nombreuses innovations et explorations. Aujourd’hui les chercheurs ont mis au point des papiers intelligents, par exemple les papiers peints qui bloquent les ondes, mais aussi un papier journal imperméable, un papier qui peut se transformer en écran, anéantissant les frontières entre toutes les techniques, un papier avec réalité augmentée… Le papier est un support aux mutiples possibilités, qui va évoluer d'autant plus vite, que les techniques d’impression sont aussi en pleine transformation.
-J-P Z. : Présenté au dernier Salon du livre de Paris par l’Institut de développement et d’expertise du plurimédia (Idep), le Fablab Ireneo est un projet expérimental de neolivre imprimé et connecté en moins de 5 minutes. Sous le slogan « Réinventons le livre, repensons ses usages », ce laboratoire de fabrication vise à engager une réflexion collective sur ce que pourrait être le livre imprimé de demain. Imaginez qu'en quelques minutes, grâce à cette machine extraordinaire, un livre est imprimé et assemblé à la demande, sans besoin de stock préalable... c'est une vraie révolution!
-J-P Z. : Ce n’est pas une simple opinion. C’est un fait. Il est faux de penser que le numérique est une industrie plus propre que celle du papier. Le numérique utilise de l’électricité pour fonctionner et les composants de ses terminaux sont hautement polluants et peu renouvelables. Il y a beaucoup d'idées fausses qui circulent. Nous avons même produit un petit fascicule pour les dénoncer. La vérité est que c'est tout le contraire : l’industrie forestière du papier et de l’imprimé est l'une des plus durables. La fabrication de papier participe même à la gestion durable des forêts et à leurs plantations. Car, en réalité, la déforestation est due à 90 % aux pratiques agricoles non durables, non pas à nos industries qui visent à entretenir et préserver la superficie des zones forestières. Enfin, fait très important, les papiers et les cartons sont des produits parmi les plus recyclés au monde (plus de 72%).
-J-P Z. : Il est vrai que nous avons la chance d'être encouragés par les écrivains eux-mêmes. A commencer par notre président qui un auteur de livres : Laurent de Gaulle. Notre parrain et soutien de la première heure est Marc Lévy. De nombreux autres écrivains ont aussi répondu présents comme Eric Fottorino ou Jean d’Ormesson, par exemple, qui a déclaré : « Je suis un grand partisan du papier. J’ai des relations très étroites avec le papier, il est mon allié naturel, mon ami(…). J’aime le papier pour ce qu’il véhicule de culture, de valeur, d’échange ». Ecrivains, chercheurs et universitaires sont sensibles à nos préoccupations, car ils savent bien que défendre le papier, c’est défendre la connaissance et le plaisir de lire. Le numérique n’a pas vocation à remplacer les livres. Il vient se surajouter. Et ce n’est pas juste une question de génération : les jeunes générations sont également attachées au papier, même si elles sont ultra-connectées. Ce que nous voulons montrer, c'est que le papier appartient à l’avenir, pas au passé.
Propos recueillis par Olivia Phélip
Culture Papier est une association créée en 2010, qui a vocation à devenir une fondation reconnue d’utilité publique. Elle a pour objet de sensibiliser l’opinion et les pouvoirs publics sur le rôle économique, social et culturel du papier et de l’imprimé, et ainsi d’en promouvoir le développement durable. Culture Papier a été créée par des acteurs du secteur du monde industriel, politique, scientifique, littéraire et des médias : l’Association des agences conseils en communication (AACC) ; l’Association française des distributeurs de papier et d’emballage (AFDPE) ; l’Association des techniciens de l’édition et de la publicité (ATEP) ; la Compagnie des chefs de fabrication de l’imprimerie (CCFI) ; le Groupement des métiers de l’imprimerie (GMI) ; le Groupement français des fabricants de papiers d’impression et d’écriture (GFFPIE), et membre de la COPACEL ; LA POSTE ; MEDIAPOST ; le Syndicat national des fournisseurs d’équipements pour industries papetières et graphiques (SPIG) ; le Syndicat de la presse magazine (ex SPMI) : l’Union nationale le l’imprimerie et de la communication (UNIC) ; la Chambre syndicale nationale de la reliure brochure dorure (CSNRBD)…Elle est présidée par Laurent de Gaulle et dirigée par Jean-Philippe Zappa. Plus de 50 parlementaires, des universitaires, des ONG, des chercheurs et des artistes soutiennent déjà l’association, dont le champ d’actions sera à la fois européen, national et régional. Plus d'informations sur le site de l'association.
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