Chantal Thomas a suivi les cours de Roland Barthes à l'Ecole des Hautes Etudes. Dans son livre "Pour Roland Barthes" (Seuil) elle confie son admiration pour l'auteur du "Degré zéro de l'écriture". Une admiration qui perce au plus juste l'homme des mots et du style, mort en 1980, qui aurait eu 100 ans cette année.
Chantal Thomas a eu la chance de rencontrer Roland Barthes. Il fut son professeur, puis un de ses proches amis. Rares sont eux qui savent reconnaître les personnalités exceptionnelles, avant que la notoriété ne leur accorde une aura indiscutable. Chantal Thomas a tout de suite compris l’extraordinaire singularité de l’auteur des « Mythologies ». Elle n’a pas attendu sa gloire pour savoir que son regard allait changer sa propre façon de voir le monde. Et c’est en toute « connivence » avec son mentor disparu que l’auteure du merveilleux « Les Adieux à la Reine » revient sur ses années « barthésiennes ».
Exercice d’admiration, mosaïques de souvenirs caractéristiques, ainsi est né « Pour Roland Barthes ». Cent vingt huit pages qui « découlent de la passion originelle, absolue, de Roland Barthes pour le langage-le langage, c'est-à-dire nous-mêmes, ce qui nous définit. ». Exercice d’admiration ou d’inspiration ? Chantal Thomas évoque un homme qui l’a aidée à construire son propre « système littéraire ». Son livre construit en brefs chapitres ose livrer une calligraphie portée par le souffle de la mémoire.
On y découvre un Barthes professeur, surprenant par sa diction lente et mélodieuse, captivant par ses digressions : « Pour Roland Barthes, la digression était dans la parole, l’équivalent d’un fragment dans l’écriture. » et fascinant par son art des silences : « Chose scandaleuse dans un théâtre de la parole publique (et enseignante), le silence y jouait un rôle significatif ».
On y rencontre un Barthes sage, racontant une histoire chinoise : « Un moine interroge Tchao-Tcheou : ‘Quel est l’unique et dernier mot de la vérité ?’ Le maître réplique : ‘Oui’. Le maître opposant un adverbe oui à un pronom quel, répond à côté. ». La vérité, à côté, c’est aussi l’inspiration à côté. Une liberté créatrice que le maître Barthes laisse à ses étudiants, ne les enfermant jamais dans un savoir figé, mais dans une pensée en mouvement.
Entre un Paris bordé par la place Saint- Sulpice et le Luxembourg et le Sud- Ouest de sa famille paternelle, entre Proust, Michelet et la poésie japonaise, Chantal Thomas parcourt les points signifiants d’une topographie imaginaire. Recherche d’harmonie dans un goût du présent, presque immanent qui laisse émerger le désir et sait saisir les signaux fugitifs des instants et des modes. Il est aussi question du style, non pas celui d’une apparence, mais le reflet d’une tenue intérieure. Style lexical ou style vestimentaire, image regardée, autant qu’image portée et représentée.
Chantal Thomas nous montre combien Barthes n’est jamais ni convenu, ni banal, qu'il est en quête d’« un imaginaire qui ne serait plus vécu comme obstacle entre soi et soi, mais serait source effusive et lyrique du moi ». Dans son « Pour Roland Barthes », Chantal Thomas efface elle aussi « l’obstacle du soi » entre elle et son ami, nous livrant ainsi quelques images jaillissantes. Fragments d’un discours aimant, adressés à celui qui restera à jamais l’homme du « langage ». Roland Barthes aurait eu cent ans cette année.
>Chantal Thomas, "Pour Roland Barthes", Seuil
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