La rentrée des classes met sur le devant de la scène la question de l'utilisation des tablettes, soit dans le cadre de la pédagogie scolaire, soit à la maison, comme support de savoir. La question se pose cette année même auprès des tout-petits. Est-ce une bonne idée de les préparer au plus tôt avec des programmes adaptés, pour leur permettre une meilleure aisance à l'école ? Cependant, ces tablettes nouvelle génération sont-elles vraiment sans danger pour les jeunes enfants? Le point sur les dernières études en la matière.
Depuis que les fabricants ont conçu des tablettes adaptées aux tout-petits dès l'âge de 18 mois, avec programme d’éveil ad hoc, la question se pose de leur rôle dans l'apprentissage de la lecture et du savoir. En pleine rentrée des classes, et alors que certaines écoles testent l'utilisation des tablettes dans les établissements, nous avons pensé utile de faire le point. D'autant que la lecture sur écran se banalise de plus en plus.
A la rédaction de Viabooks, nous avons lancé un rapide sondage. Les avis sont très partagés. Il y a ceux qui disent : attention danger, on se méfie : « Rien ne vaut la lecture traditionnelle avec les enfants, il faut les préserver de l’envahissement technologique ». Et ceux qui sont pour, car : « Les enfants sont nés entourés d’écrans et ils doivent apprendre à vivre avec ». La question mérite donc une enquête plus approfondie.
Regardons du côté de ce qui se passe à la Silicon Valley en Californie, chez les professionnels de la technologie, ceux-là mêmes qui nous promettent monts et merveilles à chaque innovation. Offrent-ils un téléphone portable à leur bébé en cadeau de naissance et une tablette pour sa première dent ? A notre grande surprise, la réponse est non, comme l’expose un article du NY Times qui a fait grand bruit en 2014 : les geeks sont les champions du no-tech pour leur famille. Ils se méfient des nouveaux supports, voire les bannissent chez leurs enfants. Steve Jobs lui-même, inventeur de l’Ipad avait déclaré en 2010 que : « A la maison, nous limitons l'utilisation des gadgets technologiques. » De plus , il est notoire que la plupart des geek entrepreneurs mettent leurs enfants dans des écoles traditionnelles qui n'ont pas recours aux nouvelles technologies. Certaines études montreraient que la mémorisation serait moins efficace par le biais des écrans numériques et surtout, que l'apprentissage de l'écriture manuelle a une utilité importante dans l'évolution cognitive de l'enfant.
Qu’en pensent les spécialistes de l’enfance ? Une tribune publiée le 14 septembre 2015 dans le journal Le Monde par un collectif de psychiatres, psychologues, orthophonistes, médecins et enseignants a clairement alerté le public sur les effets de l'usage précoce et abusif de la tablette numérique. Une réserve à laquelle il convient d’ajouter celle de l’ANSES du 13 juin 2016, qui a confirmé sans appel les dangers des ondes électromagnétiques chez les enfants, ondes associées aux tablettes connectées. Ces critiques viennent ternir les conclusions un peu plus nuancées, d’un précédent rapport rendu en janvier 2013 par l'Académie française des Sciences, intitulé « L'enfant et les écrans ». Faut-il alors bannir les tablettes à la maison et à l'école ? Pas systématiquement. Mais agir avec prudence, certainement. Une chose est sûre : avec le recul de quelques années, les conclusions des experts concordent sur le besoin de poser des limites d’usage.
Si vous voulez éviter les abus nocifs des supports numériques pour vos enfants, voici 5 règles d’or à respecter, définies à partir des conclusions des différents rapports que nous avons consultés.
1/Pas de tablettes connectées.
Les rayonnements électromagnétiques sont dangereux pour les enfants, car leur cerveau est plus poreux que celui des adultes. Donc : placer toujours la tablette hors-connexion.
2/Pas d’utilisation avant 3 ans.
La tablette n’est pas adaptée à l’éveil sensoriel et cognitif du tout-petit, qui a besoin de bouger, d’explorer, de manipuler et de toucher de véritables objets en 3 dimensions, pour se confronter à la réalité. Le psychologue Michael Stora résume : « Pour moi, avant 3 ans, « l’objet » avec qui l’enfant préfère avoir une interaction, c’est un de ses parents. »
3/ Entre 3 et 6 ans, utilisation avec des limites strictes.
Ces limites sont principalement :
>utiliser toujours les tablettes en présence d’un adulte pour interagir, apporter du langage et encadrer les gestes
>pas plus d’une demi-heure d’affilée pour éviter déficits de concentration et problème de vision futurs. A fortiori quand l'enfant devient grand. Les écrans sont très addictifs : limiter leur usage dans le temps est essentiel.
> jamais le soir au coucher à cause de la luminosité de l’écran qui altère le rythme de l’endormissement.
4/ Ne pas céder au culte de la performance.
Ne choisir que des programmes adaptés à l’âge de l’enfant et ne pas chercher à le sur-stimuler. Michael Stora constate : « La tablette numérique est intéressante pour valider les acquis, pas pour les anticiper.» S'il s'agit de lectures numériques, bien respecter les âges préconisés. Ce n'est pas parce que c'est sur la tablette et que cela a l'air plus ludique, que cela gomme les spécificités par niveau.
5/Privilégier l’échange psychosocial.
Les experts s’accordent tous sur le sujet : pour l’éveil et le bien-être de l'enfant, rien ne remplace l’échange psychosocial et affectif avec de vraies personnes, qui doit rester le principe, la tablette l’exception. En symétrie, cela signifie qu’en présence de leurs enfants, les jeunes parents doivent aussi essayer de s’astreindre à limiter l’usage de leurs propres écrans, y compris de leurs smartphones, afin de privilégier une relation sereine, détachée de tout instrument numérique.
Conclusion : rien ne remplace la relation personnelle qui accompagne un support, qu'il soit papier ou écran, qu'il s'agisse des relations avec les parents ou de l'éducation à l'école. Finalement, la vraie question serait donc plutôt celle-ci : la tablette n'est pas un robot qui se substitue au professeur ou aux parents. Elle n'est qu'un support parmi d'autres. C'est son mode d'utilisation qui peut devenir toxique. Il n'y a ni urgence, ni interdit à équiper vos enfants. Il n'y a que du bon sens dans l'usage qui en sera fait. Sans oublier que l'histoire que vous lirez vous-même à vos enfants le soir dans leur lit, que ce soit à partir d'un livre papier ou d'une tablette, restera en l'état le meilleur des apprentissages... Bonne rentrée à tous !
Les références pour aller plus loin
> Erik Osika, pédiatre, référent de «J'élève mon enfant», de Laurence Pernoud. Editions Horay
> Michael Stora, « Télé et jeux vidéo. Un bon dosage pour un bon usage ». Editions Nathan
>Etude de L’Institut NPD Group de 2013 qui montre qu’une tablette tactile préscolaire est le premier jouet offert.
>Lien vers le rapport de l’ANSES sur la toxicité des ondes chez les enfants
>Lien vers la tribune du Monde par le collectif d’experts de 2015 et une autre sur les dangers des écrans en 2013
>Lien vers l’article du NY Times de 2014
>Lien vers le rapport de l’Académie des Sciences de Mars 2013 : L'enfant et les écrans
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