Charlotte Alibert, co-fondatrice de Librinova s'interroge sur le phénomène spécifiquement français de la "rentrée littéraire". L'abondance de publications ne finit-elle pas par noyer les jeunes auteurs et à promouvoir uniquement les grandes signatures au détriment des autres ?
Environ 600 titres parus à chaque rentrée littéraire, mais de combien d’entre eux avez-vous entendu parler ? Je tente l’exercice. Sans tricher, j’arrive à citer : Amélie Nothomb, Frédéric Beigbeder, Olivier Adam, David Foenkinos, Grégoire Delacourt, Nellie Caprielian, Emmanuel Carrère, Christophe Donner, Eric Reinhardt… Et puis je cale. Ah, il y a aussi cette jeune auteure Gallimard qui a reçu une lettre de J.M.G Le Clézio, mais je ne me souviens pas de son nom.
Forte de ce constat, une question me vient : à quoi sert vraiment la rentrée littéraire, si elle ne met en avant que des auteurs que je connais déjà (et donc dont j’achèterai forcément (ou pas) les livres) ? Où sont les primo-romanciers et même les secondo-romanciers encore peu connus ?
Une réponse évidente vient à l’esprit : les prix littéraires qui ont lieu à l’automne récompenseront des auteurs déjà connus et reconnus et il faut donc sortir leurs livres au bon moment, pour qu’ils soient sélectionnés. Mais alors, me direz-vous, pourquoi aller sacrifier une myriade d’auteurs – ceux dont les livres sortent en septembre mais qui ne feront pas partie des 20 heureux élus présents dans les journaux – sur l’autel de cette « tradition » (qui n’est tout de même pas si ancienne que ça) ?
Sacrifié, le mot est peut-être un peu fort. Pourtant, être publié est déjà un parcours du combattant pour un auteur. Ecrire un livre est un travail long, fastidieux, solitaire et parfois douloureux. L’envoyer à des éditeurs, recevoir des lettres de refus, s’accrocher quand même et, parfois - une fois sur mille, peut-être moins - au terme d’une longue attente, recevoir enfin une réponse positive. Attendre ensuite, encore, car publier un livre est long – il sort souvent plus d’un an après la signature du contrat. Puis enfin, la lumière au bout du tunnel, voir son livre en librairie… Ou ne pas le voir car il disparaît sous les piles de livres de la fameuse « rentrée » ! Quelle frustration !
Quant aux auteurs qui cherchent à se faire connaître, y compris ceux qui n’ont pas d’éditeurs, septembre est pour eux une période bien difficile ! Pourtant, je le vois au quotidien dans mon travail, il y a parmi leurs livres de véritables pépites, intelligentes, sensibles ou drôles. Pour ces auteurs « numériques » nouvelle génération, Internet permet de confronter enfin leurs textes à un public de lecteurs curieux de découvrir de nouvelles plumes.
Moi-même, en tant que lectrice, je suis frustrée : j’aime découvrir de nouveaux auteurs autant que j’aime lire les livres d’auteurs que je connais et apprécie. Si tous les livres sortent en même temps, je suis noyée, je ne sais plus quoi lire et par où commencer et je passe sans aucun doute à côté de livres extraordinaires.
Quel espace trouver pour les primo-romanciers et auteurs peu connus ? Il existe déjà un prix Goncourt du premier roman et c’est un premier pas. Le second serait sans doute que les éditeurs publient les livres des auteurs reconnus tout au long de l’année, ils trouveront de toute façon leurs lecteurs, et qu’à la « rentrée littéraire », on fasse rentrer dans la cour des grands, des auteurs encore petits mais qui gagneraient à être connus. La rentrée littéraire devrait ainsi se faire à la fois en librairie et sur le web, véritable vivier de talents en devenir.
Du 27 novembre au 2 décembre 2024 Montreuil accueille le Salon du Livre et de la Presse Jeunesse en Seine-Saint-Denis.
L'écrivain Boualem Sansal d'origine algérienne qui a obtenu récemment la nationalité française, célèbre pour ses critiques en profondeur des d
Les organisateurs du Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême viennent de faire connaître leurs sélections d'ouvrages et o
Vous avez aimé Le Bureau des Légendes et Le Chant du Loup ?