Les Écrits

On ne retrouvera jamais mon corps.

On ne retrouvera jamais mon corps.

 

         Je ressens les feux infernaux s’approcher. Humeur sombre et sang bilieux. La langueur et la longueur des mauvais jours fabriquent ma folie et mon malheur. L’odeur des pavots consumés évoque les fantasmes enfantins dans les jardins enchantés. Barrières et frontières, les limites inconnues. La perception devient vaste et le monde et trop petit pour l’esprit. Les voyages sont trop courts, trop communs. Les souvenirs en sont incertains. Les yeux ouverts. Essayer de voir la réalité au delà de la matière. Je ne suis pas fière. Chagrin et colère. Les immondices jonchent le sentier battu. Epuisée, je souhaiterais m’écrouler, me laisser tomber. Ne plus essayer. Rudes effets de l’émoi.

        

         Emanations.

        

         Les rêves des enfants ont la brutalité et la préciosité de l’ébène.

 

         Mon corps demeure étendu dans ce mortuaire champ de fleur. Mes larmes sont des cailloux lancés sur mes joues. Humeur funéraire. Je retiens cette eau débordant que trop souvent de mes globes oculaires. Aspirant à la paix des fleurs, les rêves n’ont été que graves erreurs. Consciente et agonie lente, autant être une plante. L’arborescence de l’inconnue taillée, on peut se jeter à corps perdu dans les ronces de la réalité.

 

         Il y a longtemps j’étais autre. J’ai jeté mon nom. Je me suis forgé une identité pure, je me suis travestie. Ainsi, à ce jour je percevais la réalité d’une entité qui n’avait jusqu’alors exister que dans contes et rêveries.

         A moi l’une de mes folies ! Les jours les plus longs de l’année, et l’été. Une saison qui m’emplie de fureur rimbaldienne. Saison des enfers, saison de la chute. On devient fou, on s’égare. Que m’attaquent ces chimères. Ma peur ne serait qu’éphémère. Toutes ces charognes, cette terreur, mon ventre qui crie misère. L’Amour m’aura rendue stupide. Que suis-je désormais ? Je vacille, j’hésite, je ne peux me fixer. Les perturbations sont nombreuses. Je sens le poison, mes veines, la contamination. Tristesses et isolation. J’ai peur du vide, de ce gouffre. Ah ! J’ai tous les talents. Mon cher Satan, je me voue à toi désormais.

 Croyances païennes. On brûle des cierges. On prie pour apaiser la souffrance et la peine. Tout disparaîtra comme des larmes sous la pluie.

Toute réalité est perdue. Les saveurs restent inchangées, les textures inamovibles mais je ne puis rien toucher. Je suis paralysée.

 

 

Mémoire. Les souvenirs dérisoires.

 

Hier, jadis, dans les temps incertains. On était heureux, on était bien. Aujourd’hui, exhale mon odorat d’une émanation méphitique. Les romans et les poussières, toiles d’araignées et faux mystère, il nous en reste que des regrets. Hier a un goût de jamais. Ma vie rêvée au travers de ces films, ces séries et innombrables biographies malheureuses, ces livres, je les ai parcourus à m’en brûler les yeux, je suis ivre de mon absence de vie.

         Longtemps, avant, auparavant, je me suis rouée de coup, je me suis rendue à la terre, face écrasée contre l’asphalte, je me suis laissée emporter par le plaisir délictueux provoqué par les affres d’un malheur qui, malheureusement me sera jamais donné une seconde fois de traverser avec une telle intensité de jouissance. Délicieuse et malheureuse, je me suis transformée. Il aura fallu me corrompre, me rompre pour apprécier la préciosité de ma vision et de ma perception déplorablement déviante, folle, marginale.

         Mauvaise vie, mauvaise année, malheureuse engeance, époque de déchéance, instant de décrépitude, génération amputée et désillusionnée, plus de repère entre cette barrière qu’aura créer ce nouveau factice millénaire. Hier. Comme j’en rêve. Hier, ailleurs, je regrette, je répugne ma fausse existence. Absence et ignorance. Je régurgite cette époque. Il est trop tard pour mourir, j’entends ainsi par mourir volontairement. Il est trop tard pour mourir, j’ai vu trop de choses, je connais trop, et je confie que je me suis attachée à ma vie au travers du regard d’être aimés inconditionnellement.

        

Et pourtant, il est inutile d’avoir envie de vivre.

 

         Humeur tremblante, ambivalente. J’hésite et je m’effrite. Mon affect changeant, fluctuant. Plus rien n’est possible. Faire pousser des pavots relève de l’impossible.

 

 

         Il y a bien longtemps, j’ai jeté mon identité aux orties. Je me suis rebaptisée. Je ne sais que penser. Peut on réellement se façonner tel un personnage de fiction. La réalité peut elle transcender le rêve ?

         De ce que je suis. Poussières et néant. Engeance malheureuse en ma réflexion. Je me sens anéantie par ma prophétie. Les combles s’effondrent. Je m’ébranle. Mésaventure céleste ai-je parcouru. 

 

         Les envies démodées, murs décrépis, aucune envie. Annihilée par la douleur surpassée. Les rêves surannés ont été jetés. Je me suis jetée.

          Mon crâne me chatouille. Je gratte ma tête, du liquide sucré, du sang. De ma fouille, mes mains se sont recouvertes de petits morceaux qui résident sous mon encéphale. Mon cerveau. Il s’épanche et toute substance nourrissant mon corps se répand.

         Aucune révélation. Vous n’êtes pas sans savoir que les bleuets logent les démons.         

         Mon corps en perdition, mon cher Jésus me regarde du haut de sa croix. Aucune complainte. On devine un sourire de chagrin accompli. Les enfers et paradis rassurent nos ennuis.

         Le ciel était là, face au dessus le l’horloge de la gare. Les trains se préparent. L’automatisme est triste et rare. La perfection réside en la séduction.

 

         De mon affect. En émoi. Des larmes de joie malheureuses. J’ai le sang bilieux. Colère et trahison. Je n’écris pas. Je vomi.

         La pluie nettoie les infections. Purification. Le ciel s’est teinté d’un gris diluvien provoquant irrésistible attirance de noyer toutes larmes sous la pluie.

         Je régresse. Un reptile froid mort. Une peau desséchée, brûlée et rongée. La tristesse détruit. Un sanctuaire, un cimetière, une prière, un ange me regarde dormir dans mon lit d’enfant et un papillon  de nuit blanc accueille mon éveil.

         Les âmes des morts se changent en papillons de nuit pour rejoindre le monde des morts. La terre s’ouvre et m’avale.

 

         Les jouissances sont devenues ivresses rares. Mon tombeau m’étouffe, je griffe mon sépulcre et mes ongles s’arrachent. Je suis souvent vile et lâche. Parfois je me cache. Stupide peur.

         Transformation est un mot de constance. Ne jamais ressembler. Ne jamais se ressembler. Transmorphisme. Mon envie est tropisme. Modifier, maquiller, déguiser, travestir. Je m’efforce de fuir. Terreur de l’erreur. Ineptie des affronts. Crainte des échecs. Méfiance de juges. Horreur des pertes.

 

         Les cauchemars seront rares. Je suis au monde…

        

 

         Les larmes ne suffisent plus. Le repos et le prétendu réconfort du sommeil sont dévastateurs. Je cours les rues,  nue et je gratte les murs. Je m’obsède. Mon image en mauvais  pixels. J’y pense encore. J’y pense.

         Dans mon bas ventre une douleur triste et chaude me lance.

 

         Dans mes rêves, de la poussière dans mon lit. On ne veut pas s’occuper de moi. Un personnage macabre et malheureux, je semble. Juste une triste et mélancolique enfant sans innocence, je ressemble.

 

 

         Je voudrais me sacrifier, m’immoler par le feu sacré. Je voudrais juste te voir me pleurer. Mes peines et complaintes sont vaines.

        

         Juste un dernier baiser, j’en ai rêvé.

         Rien je ne méritais. Etre jetée.

 

         Avant je rêvais. Et ma triste mine que tu reprochais n’était-elle pas ces visions de la réalité de ton toi ? Tu penses …

         Un homme sain d’esprit ne sait pas que tout est possible.

 

         Je ne sais pas grand chose mais je vois. L’important ne réside-t-il pas en sachant ce que l’on ne perçoit pas.

         Visions ambivalentes. Odeur méphitique. Et ces pensées, mon esprit incapable de raisonner. Je suis troublée des affres de mon affect.

         Ce monde est une infection, une corruption. Une vaste conspiration. Les fous, les désaxés sont marginalisés car certains d’entre eux perçoivent plus de réalité que le commun, la masse. Les expériences sont vastes.

 

         L’empathie est mon ennemi. Ne rien recevoir. Ne pas voir. Envions quelques instants les braves moutons.

 

 

         Malaise.

 

 

         Chaque matinée ajoutait sa cruauté à mon état. Je m’éveillais triste et tremblante. J’ai froid. Cette émotion tremblante.

         Me cacher, mourir, m’arracher. Mes journées sont damnées. J’essaie de régurgiter ma nausée, je m’en étouffe. Vouloir fuir le malheur n’est qu’esbroufe. Mesquinerie, raillerie et tromperie. Je voudrais vomir ma vie.

         Aucun état n’est convenable, aucun état ne peut être supportable. J’exècre ma banale condition humaine. Les robots, les machines, les objets, les plantes et les animaux. Ne pas se donner à ses congénères. Etre avare comme la mer. M’étouffe ma colère.

         Fureur et malheur. L’œil hagard et le sang bilieux. Tristes cauchemars. L’empathie exacerbée, mes perceptions erronées. Satan joue avec moi. Folies et effrois. Frissons, j’ai encore froid. Une brume méphitique rôde à mes alentours.

         Vertiges et atrocités. Je vois des démons, j’entends les pensées, je n’ai plus le choix, la réalité m’est imposée. Rêver et phantasmer  me sont interdiction. Ma malédiction réside en l’amputation des facultés intellectuelles à la fuite mentale nécessaire pour la sauvegarde de l’apparence. Tout est possible, je le sais.

Vertiges et nausées.

 

 

 

 

Mon dépôt cadavérique dans un sanctuaire mortuaire.

 

 

 

         Les digitales emportent, emballent mon cœur, je suis morte dans ce cimetière, mon corps glacé, froide réalité, éloges funèbres, luminescence des ténèbres, allongée dans ce par terre de fleurs.

 

         Je vis en face du jardin mortuaire, je reviens comme en pèlerinage, en mémoire d’une autre vie, je viens m’y recueillir comme un cadavre allongé dans un champ de bruyère.

 

         Les tristesses sont d’un autre âge.

 

         On ne retrouvera jamais mon corps, mon existence incertaine se dégrade en décomposition.

 

         Explosion.

 

         Toiles de poussière et cimetière, habillement usagé, symboles chrétiens, rites païens et des armées d’araignées en majesté.

 

         Je suis née dans un sanctuaire maudit où beautés et fleurs mortuaires jaillissent des pierres.

 

 

         Assaillie de toute part, le refuge ne semblait pouvoir qu’être départ. Le sommeil lourd, les rêves pesants, les sentences tombées, je me suis éveillée écroulée. Vivre ainsi est une mauvaise vie. Contraintes physiques, contraintes morales, contraintes du cœur, contraintes sociales. Moi qui me dis au dessus de tout, qui me crois au dessus de tout. L’amère réalité me crache souvent au visage, je ris de folie et m’emporte la rage. Parfois je me propage, j’emmène la réalité dans mon sillage. Ravages.

         Idiots, imbéciles et ineptes personnages. Mon ignorance est bien plus vaste que les océans imaginaires. En quête de vérité, de voyance, je ne trouve que tromperies et chimères. Ah ! L’enfer, une trompette qui crie son chant, une femme volubile en danse.

 

         L’écriture évolue, je ne date plus.

 

         Ces chiens, je ne me laisserai pas desservir. Le royaume s’écroule car il n’y a plus d’empire. On nous ment. Les conspirations sont nombreuses. Le monde est vil. On ne croit plus. Obtenir est le seul but.

 

         Je ne sais plus ce que je ne veux plus. Etrange perdition qui ressemblerait à une malédiction. On me dicte de vivre en cette affliction. Je ne possède plus. Abandonnée, je ne suis plus. Se donner est comme signer un pacte avec le diable. Je me sens vide. J’ai donné mon âme. J’ai lu beaucoup d’histoires diverses. La mienne est banale. Mon malheur est simplement que je ne puis agir sans effusion sanglante de torpeur. J’espère que je serai rendue à moi-même dans une petite boite juste en un simple geste. Je deviens folle. Que l’on me libère.

         L’ennui, une pourriture, une raclure. Un sentiment qui ronge. Mon ennui réside la mélancolie. Nostalgie stupide. Les sentiments brûlent. Corrosifs. Je n’ai plus de château, je n’ai plus de forteresse. Je ne rêve plus et ma peau se dessèche. Je m’énerve, je me gratte, mon corps desquame. Je disparais. Je m’efface. Les chagrins sont coriaces, mon courroux est tenace.

 

         Je rêve d’une autre vie, d’un autre nom, d’un pardon. Je me sens à l’étroit. Un corps exigu qui ne supporte pas la force de ce qui l’anime. Célérité. Je rêverais de célérité si l’espoir m’était encore permis. Je m’oublie.

 

         Les mots me manquent…

 

         Rêve et réalité n’ont plus de frontière. Simagrées. On est au monde. La mode tourne. Cette nuit j’ai rêvé éveillée. Je suis allée visiter nombreuses contrées. A mon éveil dans mon lit, j’ai constaté la présence blanche d’un papillon de nuit à moitié éteint. Je l’ai ramené par mégarde des limbes, il m’a suivi au moment où la terre s’est entre ouverte.

 

         Dans l’air flotte une odeur de souffre, le diable ne doit pas être loin.

 

         Le papillon de nuit est resté dans mon lit pour y pondre avant d’attendre la mort. Il reste immobile à proximité de ses œufs. Il ne bouge plus et se meurt. La majesté d’un rêve qui transperce réalité.

 

Vieux souvenirs commémorés, les histoires anciennes sont lavées. Tout pourra être retranscrit. Les mots inutiles vide. Absorber le néant et manger le monde. Mon corps écrasé en proie aux hallucinations des traitements pour apaiser la douleur. Je ne connais pas la peur, juste profondes tristesses et horreurs.

 Le ciel s’entre ouvre pour cracher colère et malheur. Les fleurs s’arrachent. La terre s’engorge et aspire. Le déluge et la foudre, le monde s’écrase. Je cherche une emphase. J’essaie aussi de mentir et de vous tromper. J’aimerais m’exiler, un rêve d’une autre réalité. Un monde où flottent mélopées envoûtantes. Le charme est rompu, je ne crois plus. Je me crois parfois perdue…          Rêveries dégradés, champs dévastés, violettes corrompues et pensées arrachées, le malheur est couronné de fleurs. Je ne sais ce que je dis. Parle en moi un autre je. La répétition n’est nuance et dissolution. Le vide, le néant. Je dessine ce que je veux. Hier était parfois un adieu. Le démon me gagne. Je m’épargne. Je ne peux pas gagner, les armes jetées, le combat abandonné. Non lieu.

 

Un blanc papillon de nuit dans mon lit.

 

 

         L’assassine tristesse engorgée dans mes idées.

 

 

         Cette après-midi, lorsque j’ai pris ma douche. Je me suis regardée nue dans le miroir. Pour une fois, je ne me suis pas vue déformée. Nue devant ce miroir, je me suis trouvée si belle. La beauté de mon corps m’a rendue si triste d’être blessée. J’étais parfaite avant de me sacrifier, j’étais parfaite avant que mon esprit soit corrompu et désabusé.

 

         J’ai envie de rendre mon corps au sol comme mon esprit dévasté, m’écrouler. Les bleuets sont les fleurs démoniaques, je suis allongée dans un champ de démons. Les bleuets fleurissent, le mal prend vie. Je suis morte, je me décompose, je suis du compost pour les fleurs. Je suis désormais un bleuet. Désarroi, tristesse de l’innocence volé, toute l’espérance noyé du sang s’épanchant de mes plaies ne souhaitant se refermer. Le sang se mélange à la sève. Les bleuets se sont nourris de ma substance, je suis des leurs, damnée.

          

         J’ai mal, je crache un liquide noir m’étranglant. J’ai mal, je prie pour que le malin m’oublie. Que l’on me sanctifie, je crache ma folie. J’ai mal, tous ces fruits pourris, des insectes dans les cheveux, des larmes acides dans les yeux. J’ai mal, je rêve de linceul, d’immobilisme, de repos, des pavots, ma mort. On ne retrouvera jamais mon corps. J’ai mal, mon corps corrompu, mon esprit perdu. J’ai mal. Que l’on m’offre réconfort ou achèvement, j’ai mal, que l’on m’épargne. J’ai mal, achevez-moi !

        

         Jamais plus réconfort ne me sera offert, la souffrance reste fière. Je voudrais que l’on me serre fort, aussi fort que je sers mon ours de naissance lorsque je suis dans mon lit recroquevillée de douleur. Jamais plus on ne m’embrassera sans que sanglots m’étouffent et m’égorgent. Jamais je ne serai sauvée.

 

         J’ai la nausée. La terreur. L’horreur. Je suis engourdie par le désespoir. Je me laisse emporter par les flots des larmes de perdition. La trahison me ronge. Je suis si triste de m’être vue si belle et si dégradée dans le reflet de ce miroir. Mes damages sont plus que dommageables. Je m’affaiblis. Je me laisse envahir. J’ai dans l’œil l’humidité noire des espérances volées. J’avais toutes les qualités, je me suis éparpillée, idiote qu’a été ma générosité. J’ai été pillée. Sombre allure ai-je désormais. L’œil triste et le corps blessé.

 

         Une beauté dégradée. Je me regrette. La corruption de la trahison me rend aux fleurs des cimetières. Mon corps torturé git plus bas que la terre. Que je me volatilise dans l’éther. Les séraphins des ténèbres m’accueilleront comme la reine que je suis. Que la malédiction me brûle les poumons…

 

 

         L’Empire, sa Majesté, j’en suis la reine. Hier éclats de diamants m’ont écorchés. Je suis défigurée, Osez donc me regarder sans curiosité malsaine, convoitise et écorchures de jugement biaisé.

 

         Je provoque la réalité…

 

         Un banc de pierre, une lune éphémère autour, les papillons de nuit se brûlent les ailes à rechercher la lumière.

 

         Des papiers brûlés et une peau tannée par la misère, parfois je m’éclaire. Je flotte, les réalités se multiplient et je reste fixe. Inamovible caméléon que je suis. Je cache ma royauté, mon empire est un secret, je ne dévoile aucune clef, je ne montre rien, je suis avare, je garde les révélations convoitées. Ma Majesté est cruelle, comme elle m’aime, j’exècre ma sanctification.

 

         Que les dieux me foudroient ! Ils n’oseraient même pas. Le sang se répand, ma substance rouge perlant à la cadence de mon battement cardiaque. Exsangue, malade, fatiguée et usée, mes pouvoirs surnaturels en avaient été multipliés. Ma force se répandait dans un flot de décadence assurée. Tout est déjà gravé sous ces pierres dont jaillissent fleurs, merveilles et mystères.

 

         Toute réalité perdue, je me suis appropriée les landes délaissées. Osez donc aventurer votre corps dans ce désert de majesté sans être absorbé par le vide des floraisons.

 

         Je fixe l’inexistence de l’horizon. Personne ne voit au-delà…

 

 

Je suis impératrice des ténèbres.

 

 

         Mon royaume n’a plus de frontières. Venez ! Osez ! Je vous invite misérables sujets à baiser les pieds de ma reine. Sa majesté est grande, sa majesté est belle. Tous les pouvoirs lui appartiennent.

 

         Je suis le maître des folies. Je traverse les miroirs. Les reflets volent en éclats me déchirant la chair. Quelle belle impératrice de lambeaux de peau. Un corps parfait défiguré. Je me suis transvasée, mon urne funéraire est décorée. Que l’on me brûle, que mes cendres soient déposées dans mon démoniaque réceptacle, du vase je sortirai pour vous hanter.

 

         Cette nuit encore j’irai visiter mes sujets. Dans leur bouche entre ouverte d’un sommeil profond, de mes veines griffées je ferai couler dans leur gorge mon sang sacré. Je vous bénirai de la terreur. Le soupir sera votre peur.

 

         Gouffres, méandres et abysses, je vous offre la faveur de goûter à la démence des délices. L’air, ici, a le goût du nectar des dieux, la mort vous attend si vous n’êtes pieux.

 

         Affamée par les tristes pensées. Mon ventre crie famine. L’estomac se retourne dans le néant.  Vite ! Un sacrifice, du sang, de la viande, donnez moi de la viande. Assassin. Vide. Allez donc, mes braves fantassins. Allez en quête de vérité me voler ces corps. Je me nourris des entrailles et je bois le sang, Les chaires sont grignotées et les os rongés et rognés.

 

 

Mes bras se retournent. Je me détourne. Je me contourne. Epuisement maladif. Envies de perdition. Les moments d’éternité sont dépassés. Faisons place au pessimisme lucide. Tristesses avides. Les fixations maladives me sont dépressives. Je sens cet état ardent et convulsif. Mon esprit bouillonne et mon corps paresseux et décrépi diminue ma capacité au travail et à l’introspection.

         On se pose des questions. Questions ésotériques et métaphysiques. Je crains l’absolution du démon. Images furtives. Désirs de frénésie. Rien n’y répond. Nous y étions. La déperdition de l’âme. L’intégrité est amputée. Soyons écrasés et dévastés. Las champs stériles seront réparés. N’oublions pas ce que nous étions. Ah ! Les démons…

 

Sauvetage.

 

         Comment en suis-je arrivée là ? Comment ai-je réussi à cesser de mourir ? Je ne suis pas sortie indemne de ce naufrage. Je gagne en abandonnant, un coin de chemin, un croisement dans mon cœur, je possède mille vies. La tristesse m’avait rendue malade jusqu’à me conduire à l’hôpital. « Vous êtes bien maigre. », s’inquiétait une infirmière à mon propos, je me desséchais de malheur. Le temps m’a éloignée de l’emprise des jours, des choses, des gens et de mon amour. Je suis résignée, je suis prête à me laisser emporter par la vieillesse des années. J’ai mille vies et je dois choisir d’en vivre une seule et unique. J’ai choisi d’en vivre des fragments. Les fragments sont plus raisonnables, ainsi chaque vie garde de son intégrité et de son secret.

         Depuis longtemps, toujours, je rêve d’éternité jalonnée de drames et d’aventures. Onanisme de la pensée, créativité abrupte, mon esprit triste d’enfant ne m’a jamais quittée, vieillir est une déception, l’adagio atteint à la vingt et unième année, ensuite décrépitude et flétrissure, les blessures.

 

         Brisée, les espérances abandonnées, je me suis regagnée. Il me faut recracher pour avancer. Laissez moi vous conter.

Je danse, je suis heureuse d’avoir été encore et toujours plus forte, à quel prix, peu importe. La peur de rien, je me dis souvent, «  Que le diable m’emporte ! », malheureusement, le diable n’existe pas, ou le diable n’existe plus. Stupide science, imbéciles preuves de ce qui est contre le néant des éléments prouvant ce qui n’est pas, il reste encore des particules en suspension, on se doit de se réjouir de ce qu’il en reste et attraper tout ce qui flotte, tout ce qui bouge, saisir tout ce que nous n’avons pas encore réussi à lier. La science, délicieuse mécanique que l’on ne peut rejeter, j’ai l’esprit mathématique, je suis des plus scientistes passionnée de poétique. La philosophie, matière délétère, elle ne me plait que dans parfaite mécanique mathématique, comment réfuter le sens inné des appréhensions et perceptions.          Comprendre ne pose pas de questions, comprendre pousse la recherche. Je danse.

         Je danse, je sens m’envahir un bonheur inconnu, le vin ? Non, un instant je vois ce que je suis, ce que je sens, plaisir charnel d’étreindre mes livres, mes auteurs favoris m’inspirent la nécrophilie. J’aime les morts, les vieillerie, l’odeur de la poussière, les guêtres, les chemises à jabots, les simplicités des vies dévouées, j’aime ce qui n’est plus du moment, un regret d’avant, encore cet hier qui me cherche, parfois me désespère.

 

 

         J’ai la mine triste et engourdie, le regard malheureux et des pleurs débordent des yeux. Les traits affaiblis manquent d’éclat de rire, de repos, de plénitude. Mes relations sont délétères, je souffre d’une solitude amère, un manque grandissant, envahissant, un manque de présence, un manque d’échange, les relations humaines me font cruellement défaut. Je me considère comme une erreur, bancale, et parfois je suis excessivement affable. On me remarque non pour mes qualités mais pour cette façon non recherchée de me distinguer. Je n’arrive pas à me taire car je rêve que l’on m’écoute et me connaisse.         

         Je me sens déprimée et cassée, je me réfugie dans ma chambre d’enfant, de là tout peut recommencer ou pire s’enfoncer. Les journées emplies d’envies libidineuses non concrétisées. Des amitiés espérées, il n’en est rien. Les gens qui m’aiment pour ce que je suis, sont, étrangement, de bonnes personnes, toutes évoluant dans des sphères différentes, opposées. Contradiction, même en mes relations on peut percevoir mon ambivalence prédominante, écrasante.

         En cette fin de journée, agréable journée passée en compagnie d’un ami à la présence agréable, une ancienne fable rénovée, il possède de l’or dans ses doigts qu’il n’utilise pas. Et sous le coup de la fin de journée ardente d’un soleil écrasé d’été, je me suis sentie happée par un sentiment langoureux de dépression épouvantable. Je bois. Je fume à m’en étouffer. Je cherche peut être à mourir. En fait, j’espère que l’on me sauve.  Vivre n’a aucun intérêt et se donner la mort est une vile lâcheté que je repousserai jusqu’à suffoquer de ce mauvais air qui me falsifie les poumons.

         Corruption, trahison et démon. J’y pense encore, elle, mon obsession malheureuse. Je coule, l’eau emporte mon corps dans un courant violent, je n’ai même pas senti le navire, s’égarer et encore moins chavirer. Et, une fois à l’eau, rien pour me rattraper. On ne sauve pas ce que l’on veut voir sombrer.

         Cette après midi, j’avais croisé ce très cher Adel, ami bien aimé, il me sera dans ses bras, une étreinte à goût de perfection. Adel est un personnage qui mérite toute bénédiction, il a ce don, ce don de me faire sourire. Son épanchement affectueux et sincère me touchait tant il me manquait.

 

 

         La tombée de la nuit mêlée au nuage ressemble à une aquarelle, un beau, un sombre mirage. Les catacombes, ces odeurs de poussière, on s’énerve et dans le regard foudroyé, un éclat lumineux brûle les yeux et fait remonter le cœur, dans la gorge le cœur. Je ravale mon organe, le recracher aurait été d’une jouissante douleur, et comme je m’écoeure, impavide et livide, je me vide, substance inconstante. Des ratés dans mon battement cardiaque, des hésitations dans mon élan, je suis malade, mon esprit choqué, fragmenté, ma réalité est bien meilleure, malheureusement, désarroi, ma réalité est mineure.

         Et les fleurs, l’envie était à croquer des noisettes, des noisettes piquantes de leur délicieux salement. Je regarde mon coin de fenêtre laissant aller à la contemplation l’imagination rognée et entravée, mes yeux se noient dans un ciel d’encre japonaise, je vois des estampes érotiques, des épopées chevaleresques, et je me souviens, de rêve d’aventures impossibles tant dans les mondes de ma création cérébrale, tout est possible. Je m’éveille souvent, régulièrement, déprimée, déçue, et outragée d’être revenue à la réalité.

         Sous ma peau mes organes qui vieillissent et se dégradent, je ne peux être ange, je serai héros. Ma pourriture, décrépitude, je n’aurai jamais le temps de tout dire, de tout révéler. Comme j’aime à penser qu’un autre individu, au moins un noyé dans ces milliards connaît ce que je connais et espérons qu’il soit assez lettré pour révéler ce que je sais et tremble à l’idée de l’évoquer. Mon ultime héros, ce beau Rimbaud, j’ai lu et relu ces textes en large et en travers, il était à l ‘orée de ma pensée, lui aussi voyait et s’en vantait, il était beau mon Rimbaud, avare, et furieux, le sang bilieux, l’esprit fugace, et cette envie d’avaler la vie, qui nous déçoit cette charogne si on s’attarde à la déguster, la reluquer, la décortiquer.

         Maudite humeur inflexible que mon désespoir. Malheur inéluctable, inébranlable.

 

 

         Le ciel s’épanche et déverse toute sa rage. La terre foudroyée, abattue par la pluie a abandonné. La pluie, nécessaire pour nettoyer les misères et rabattre la chaleur. Une lascive envie de me souvenir m’assaille.

Je me souviens de mes 14 ans et de Charlotte, la meilleure amie de Gilles. Nous étions allés, Mathieu et  moi même voir Gilles dans sa ville, Lens. La journée avait été passée à fumer les premiers joints qui allaient être suivis de milliers, nous avions mangé une pizza, et dans le restaurant, le but des quatre adolescents était de choquer le client. Charlotte et moi nous nous embrassions tandis que Gilles essayer de détourner Mathieu. Je me souviens avoir eu envie de courir sur les toits de la fenêtre de la chambre de Charlotte. Un souvenir de parking souterrain qui craint, les adolescents et enfants qui se cachent se retrouve régulièrement dans les lieux sordides habités par les nymphomanes, les clochards et héroïnomane.

         Charlotte, je ne l’ai jamais revue, juste croisée, une seule fois, dans les rues arrageoises, elle était assise sur les marches du petit théâtre accompagnée de deux garçons, je l’ai saluée, juste un regard échangé de complicité et les talons tournés, j’allais souvent penser à Charlotte. Une relation amputée.

 

        

ANIMAL

 

         La crainte, le manque, la douleur, la mort.

 

         Je sais le faire.

 

         Par haine.

        

         La souffrance m’aura rendue violente.

 

         Je suis souvent stupide.

 

         Agir comme un animal.

                 

         Utiliser la rage pour ne plus avoir mal.

 

         Cela m’a aidée à ne plus avoir peur.

 

         Autrement que de me craindre.

 

 

 

         Fracturée.

 

         Les blessures sont nombreuses. Je me sens froissée. Les murs décrépits s’écroulent sur moi, je ne bouge pas.

         L’intérêt désintégré. Tout rêve et désir annihilés.

 

         Prostrée.

 

         Le ventre qui crie. L’ennui. Neurasthénie. Oubli.

Fractures et coupures. Mon véhicule endommagé, je me suis révolu à ne pas voyager. Pareil est partout.

        

         Effrayée.

 

         L’horreur est de voir la réalité. Survivre à ses abjectes perceptions. Projections de terreur. Poursuites et fuites. Ne pas vouloir y croire. Sachant ce qu’est hallucination. Le monde s’effrite. Aucune croyance ne nous habite.

 

         Peur.

 

         La haine et la colère. L’amertume qui ronge tel abus agrumes. Les yeux piquent. De larmes, on est triste. Regret. Mélancolie. Perte. Tristesse. Manque. Amour…

 

        

         Je n’ai ni maison ni patrie. Les lois me sont un interdit. Les journées longues et langoureuses coulent sur l’infini de mes vivres.

         Du ciel, tombent des cristaux, des animaux fous en farandole. Et parfois, je m’étonne. Les charniers sont entre ouverts, putréfaction des enfers. Il est un commun où l’on se perd. Travailler, uriner, et purifier. Les abjections sont de rigueur.

         Dans le temps, règne une moiteur.

 

         Cela ne finira jamais. La malédiction de l’inachevé. Mélange des humeurs, soubresauts des peurs. Le tabac est d’un ennui délicieux.

 

 

         Hécatombe.

 

         Finalement il est inutile d’avoir envie de vivre.

 

 

 

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