Niels Labuzan a écrit un premier roman Cartographie de l'oubli ( JCLattès) qui revient sur l'histoire de la Namibie et les exactions éthinques perpétrées par les allemands au XIXe siècle. Un livre sur fond d'Histoire et de mémoire, qui se lit comme un véritable roman d'aventure. Nous avons rencontré ce jeune auteur, qui sait voir grand.
Niels Labuzan: C’est une grande reconnaissance, car c’est mon premier roman. C’est toujours un parcours un peu difficile entre le moment où l’on décide d’écrire, de lire, puis de l’envoyer à un éditeur. Tout s’est déroulé rapidement. Je ressens de reconnaissance de faire partie de cette sélection Cultura : c’est formidable car les libraires sont finalement les meilleurs représentants du livre. Nous avons déjà un retour très favorable et chaleureux. La mise en avant du livre dure un an. Les cinq autres auteurs qui ont été sélectionnés comme moi ont l’air très intéressants, je ne les connais pas beaucoup, mais c’est un privilège !
N.L: Mon livre s’intitule Cartographie de l’oubli, il raconte l’histoire de la Namibie, lorsqu’à cette époque elle s’appelait encore le Sud-Ouest Africain. Cette histoire commence en 1889, quelques années après la conférence de Berlin où les grandes puissances établissent des accords sur les territoires d’Afrique.
L’Allemagne qui est devenue un puissant Empire décide de coloniser ce territoire qui est l’actuelle Namibie. Elle envoie une vingtaine de soldats sur ce territoire. La mission est de créer une colonie de peuplement et de passer des traités ou des accords de protection des peuples indigènes. On va suivre Jakob Ackermann, un jeune homme de 19 ans qui arrive plutôt naïf au début de l’histoire. Il va par la suite, participer à toute la construction de la colonie qui va durer plusieurs années, il va passer par toutes les épreuves. Au début c’est une vingtaine de soldats. Au fil du temps, ils vont vite se rendre compte que le pays détient encore plus de richesses. Les méthodes militaires vont se durcir. Il va y avoir une grande succession de différents gouverneurs qui sont des personnages historiques. On suit Jakob dans cette aventure, mais aussi dans son rapport avec les peuples indigènes, avec les autorités et lui-même. Le choix de prendre des décisions ou d’écrire une histoire différente de celle qu’on lui impose. Ce personnage va vivre des aventures romanesques.
N.L: J’ai voulu écrire aussi un roman d’aventure. Pas sseulement un livre historique. Pourtant, le héros va être confronté à des aventures terribles comme des confrontations directes ou des conflits. La naissance de l’amitié ou bien la découverte de l’amour dans l’un des endroits les plus isolés au monde. Le regard de Jakob devait pour moi se placer en perspective avec un autre regard plutôt contemporain, car l’histoire de ce pays est très riche. Le livre brosse aussi le portrait de la construction d’une nation. On suit donc un autre jeune homme qui assiste aujourd’hui à une cérémonie commémorative du massacre, premier génocide du XXe siècle, qui été perpétré à l’époque de Jacob. Ce jeune assiste à cette journée qui a vraiment eu lieu. Les lecteurs suivent l’histoire de manière linéaire. Au fil de l’histoire, nous trouvons un lien entre la partie historique et la partie contemporaine.
N.L: J’ai construit le personnage de Jakob, en ayant à l’esprit que nous sommes en 1889, que l’Allemagne avant était noyée dans un grand Empire, qu’elle est devenue elle-même un Empire puissant en quelques années. Le personnage débarque en 1889 sans savoir ce qui allait vraiment lui arriver. Il ne connait pas le XXe siècle non plus, bien évidemment. Toute cette complexité s’explique à travers ce personnage naïf et fragile au début. Au fil de l’histoire, il accepte ce qu’on lui dit derrière l’idée de civilisation et sur la plus puissance de la nation Allemande, car il y avait un problème démographique et il fallait avoir plus de colonies de peuplement.
N.L: Je ne suis pas historien. J’ai donc abordé ce livre en tant que romancier, avec la volonté d’en faire un roman. Le personnage de Jakob sort de la trame historique, c’est un roman porté sur la construction d’un personnage. C’était important pour moi de lire des documents sur cette histoire à travers des documentaires, de me renseigner et de connaître toute l’histoire de ce pays. Connaître les grandes dates, les différents gouverneurs et les grands événements pour être libre dans la partie romanesque. C’était un travail assez long qui a duré plusieurs mois. J’ai aussi voyagé en Namibie pour être directement sur le terrain et avoir la possibilité de rencontrer des gens et connaître ce pays. L’histoire de ce pays était assez brutale alors il fallait avoir certaines connaissances. Le côté romanesque montre aussi la préfiguration de ce qui va arriver au XXe siècle.
N.L: C’est l’histoire de la mémoire et de l’oubli qui m’a intéressé au début. Car on nous apprend surtout à l’école que l’histoire du XXe siècle a défini très fortement notre identité, avec 1914 ou 1933. J’ai voulu rendre compte que les bases étaient mises en avant, posées sur un territoire totalement inconnu dès la fin du XIXe siècle. Comprendre les méthodes militaires, celles d’une notion d’espace vital et d’une notion de pureté raciale qui avaient déjà cours au XIXe siècle et qui ont semé le gerle de ce qui est arrivé après.
N.L: Depuis que les peuples existent, il y a toujours été eu des métissages. Cette idée de double origine peut créer des problèmes, comme de ne pas vraiment savoir d’où nous sommes réellement. On vient d’un côté, mais aussi d’un autre. Et nous pouvons être rejetés, comme c’est souvent le cas. En Afrique du Sud, par exemple, être métisse, c’est être rejeté par les Blancs et par les Noirs. C’est une question délicate, à laquelle je n’apporte pas de réponse. Mais c’est une interrogation qui est importante. C’est toute la question de l’intégration qui est en cause.
>Niels Labuzan, Cartographie de l'Oubli, JCLattès
>Visionner l'interview en vidéo de Niels Labuzan
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